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Précisions sur la régularisation du nombre d’actions de garantie

19/12/2011


La loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008, si elle est venue assouplir le régime des actions de garantie, n’en a pour autant pas réduit le contentieux, comme en témoignent deux récents arrêts rendus par la chambre commerciale.

On se souvient qu’avant la LME, les administrateurs (C. Com., art. L. 225-25) et les membres des conseils de surveillance (C. Com., art. L. 225-72) de SA devaient être, au jour de leur nomination, propriétaires d’un nombre minimum d’actions, dites actions de garantie. Ce nombre devait être déterminé par les statuts. A défaut, ces derniers étaient réputés démissionnaires d’office s’ils n’avaient pas régularisé leur situation dans le délai de 3 mois à compter de leur nomination. Le législateur en 2008 a supprimé l’exigence de propriété d’actions de garantie et porté le délai de régularisation à 6 mois. Pour le reste, le dispositif est resté inchangé. Néanmoins, la détention d’un nombre minimum d’actions peut toujours être statutairement imposée. Tel est notamment le cas des sociétés n’ayant pas modifié leurs statuts depuis la loi de 2008. Tel est aussi le cas de celles ayant fait le choix de faire figurer cette obligation au sein de leurs statuts. Des questions en matière de régularisation se sont posées.

Tout d’abord, quel sort devait-on réserver aux administrateurs qui, au jour de l’entrée en vigueur de la loi, ne détenaient pas le nombre d’actions de garantie requis et qui avaient laissé écouler le délai de 3 mois pour régulariser leur situation : pouvaient-ils bénéficier du nouveau délai de 6 mois à compter de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle ? La Cour de cassation avait répondu par la négative au mois de juin (Cass. Com. 7 juin 2011, n° 10-17.732) en jugeant que la loi nouvelle ne saurait avoir d’effet sur une démission d’office acquise antérieurement à son entrée en vigueur.

Ensuite, le prêt par un actionnaire d’une action au membre du conseil de surveillance permet-il de satisfaire l’exigence de détention en matière d’actions de garantie ? La Cour de cassation (Cass. Com., 15 nov. 2011, n° 10-19.620) a récemment considéré que la transmission de l’action au titre du prêt n’avait, en l’espèce, pas donné lieu à une inscription en compte au nom de l’emprunteur, « ce dont il résultait qu’il n’était pas propriétaire du nombre d’actions requis à l’expiration du délai qui lui était imparti pour régulariser sa situation. ». Pourtant, les articles L. 225-25 et L. 225-72, dans leurs anciennes comme dans leurs nouvelles rédactions, imposent que le nouveau nommé soit « propriétaire » des actions de garantie, condition qui paraissait remplie puisque le prêt de consommation a vocation à transférer la propriété de la chose (C. civ., art. 1893) et qu’il est, de ce fait, assimilé à une cession d’actions (CA Paris, 2 juill. 2002, Bull. Joly 2002. 1204, note P. Le Cannu ; comp. : CA Versailles, 25 févr. 2010, Dr. sociétés 2010, n° 162, note Gallois-Cochet).

On rappellera à cette occasion que le prêt de consommation d’actions est admis de longue date par la Cour de cassation (Cass. crim., 11 mai 1901 : DP 1902, 1. 415) et que le prêt de consommation tacite avait été admis par la cour d’appel de Paris dès lors que tel était l’usage dans la société en question (CA Paris, 3ème ch., sect. B, 10 juin 2005, n° 04/12304 de Gandt c/ SA Sun Chemical et autres).


Par Christophe Blondeau, avocat associé
Analyse juridique parue dans la revue Option Finance du 19 décembre 2011

Auteurs

Christophe Blondeau