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Financing of projects in the energy efficiency sector: how to create favourable investment climate? Overview of new cooperation forms (in French)

CMS article in Le Courrier de Russie

05/2011

 
Force est de constater que la problématique de l’efficacité énergétique figure aujourd’hui au premier rang des préoccupations des autorités russes. Le gouvernement russe a, en effet, intégré les avantages qu’il pourrait tirer de la mise en place de mesures en matière d’efficacité énergétique et s’est résolument engagé dans un vaste programme de réformes destiné à réduire la consommation d’énergie et promouvoir les énergies renouvelables. C’est ainsi que la loi sur l’efficacité énergétique a vu le jour fin 2009. Cette loi a, au premier chef, le mérite d’introduire un certain nombre d’idées novatrices comme le principe de différenciation des produits de grande consommation et des immeubles à usage d’habitation en fonction de leur efficacité énergétique (classes et labels), des exigences et normes nouvelles en matière d’efficacité énergétique dans le secteur de la construction, la personnalisation de la consommation et facturation d’énergie (via la mise en place progressive de compteurs d’énergies) ou encore la responsabilisation des acteurs, tant publics que privés, par l’introduction de mesures coercitives en cas d’infractions à la nouvelle réglementation. Pour autant, s’agissant d’une loi cadre qui, au demeurant, touche directement ou indirectement de très nombreux secteurs de l’économie, elle doit encore être complétée par l’adoption d’une série de décrets d’application relevant de nombreux ministères afin de produire pleinement son effet, ce qui ne facilite pas la tâche.

Par ailleurs, et in fine, afin que cette loi ne demeure pas lettre morte et qu’elle se traduise par de réels investissements dans des technologies propres et/ou générant des économies d’énergie, le gouvernement russe devra s’efforcer de créer des conditions propices au développement d’une offre de services financiers attractive ce qui, dans le contexte économique actuel, ne sera pas chose facile. A défaut, le risque ultime serait bien étendu que le marché de l’efficacité énergétique ne soit réduit a sa portion congrue et demeure confiné à une poignée d’acteurs : un mixte de grandes banque d’état russes -dans le cadre d’un mandat politique assigné par le gouvernement- d’institutions financières internationales dans leur rôle traditionnel de sponsors des économies en développement et de groupes internationaux, disposant d’une assise financière suffisante.

Dans ce contexte, il apparait essentiel de développer de nouvelles formes de coopérations, permettant de réconcilier capacité d’investissement et innovations avec contraintes de financement et rentabilité. Aujourd’hui, compte tenu tant de contraintes d’ordre technique, réglementaire et politique que des spécificités des marchés offrant des débouchés en matière d’efficacité énergétique, deux principaux modèles de coopération sont susceptibles d’offrir de réelles opportunités : le premier est fondé sur un partage des risques opérationnels et financiers entre investisseur et client (partenariats publics-privés, dits «PPP») ; le second sur le principe d’une rémunération de l’investisseur en fonction des économies d’énergie réalisées (contrats de performance énergétique). S’agissant du premier modèle, la demande accrue en infrastructures modernes et la réalisation d’initiatives nationales constituent un réel facteur d’expansion pour les PPP en tant qu’outil permettant de fournir des services publics tout en partageant le financement et/ou les responsabilités entre les secteurs privé et public. Dans ce contexte, le concept de PPP a gagné en popularité en Russie et obtenu une certaine forme de soutien de la classe politique.

La loi fédérale "Sur les Contrats de Concession" de juillet 2005 (ci-après, la “Loi CC”) constitue l’épine dorsale du système des PPP. Ayant ouvert la voie à la réalisation de projets de PPP dans de nombreux domaines du secteur public cette loi devrait donc , que ce soit directement ou indirectement, notamment bénéficier aux investissements dans des technologies générant des économies d’énergie. Pour autant, certains aspects ne sont toujours pas réglementés et certaines contraintes juridiques perdurent sources de problèmes non négligeables en pratique qui rendent la négociation des PPP complexe, comme l’absence de définition claire des droits de propriété portant sur de nombreux actifs relevant des infrastructures étatiques, l’impossibilité de donner en gage les actifs ou droits reçus dans le cadre du contrats de concession, les inconvénients de la réglementation russe en matière budgétaire, de marchés publics et tarification ou encore l'incertitude du régime juridique des contrats de concession en droit russe.

Une autre forme de coopération possible permettant de réaliser des investissements générant des économies d’énergie réside dans la négociation de « contrats de performance énergétique ». Le principe est que l’investisseur se rémunère sur la base des économies d’énergies générées dans le cadre du projet. Ce modèle permet ainsi aux autorités publiques et sociétés d’état de mener à bien des projets d’investissement en matière d’efficacité énergétique à moindre frais puisque l’investisseur est généralement sensé supporter l’essentiel des coûts d’investissement (dépenses opérationnelles et en capital) et se rémunérer sur le profit résultant de l’économie d’énergie réalisée. Mais la difficulté de ce type de schémas réside dans le fait que la période de retour sur investissement (« payback ») peut être relativement longue et incertaine en fonction du montant de l’investissement initial et du profile du projet. Il est donc crucial pour que le projet soit suffisamment attractif et viable financièrement, que l’investisseur obtienne des assurances tant financières (des banques privées et/ou publiques et/ou régions/municipalités lorsqu’elles sont parties au projet), que tarifaires.

Il est en outre essentiel que le prestataire ait un droit d’accès et contrôle suffisant sur les installations faisant l’objet de mesures d’efficacité énergétique (pré-étude de faisabilité, audits et évaluations des économies d’énergies réguliers, entretien et gestion des installations, etc.). Pour autant, la Russie a des besoins considérables de modernisation de ses infrastructures et de son outil de production et a beaucoup à gagner au niveau notamment de la réduction de ses émissions de CO2 et de sa facture énergétique. Les perspectives de développement du marché russe de l’efficacité énergétiques sont donc bien réelles et, à condition d’allier audace et pragmatisme dans la sélection des projets d’investissement, de belles opportunités à court et moyen terme s’offrent aux investisseurs étrangers disposant d’un savoir-faire et d’une expertise réels dans les technologies propres et sources d’efficacité énergétique.

Authors

Dominique Tissot