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Alerte TVA

05/10/2018

Les Etats membres de l’Union européenne (UE) ont adopté le mardi 2 octobre 2018 quatre des projets de réforme qui structurent le plan d’action de la Commission européenne pour la modernisation et la consolidation du système de la TVA.

1. Quick fixes

La principale réforme porte quatre aménagements du régime de TVA qui ont pour objectif de consolider le système dans l’attente de l’adoption du régime définitif des échanges intracommunautaires.

La première correction (art. 138 paragraphe 1) renforce les conditions requises pour bénéficier de l’exonération, dans l’Etat membre de départ, des livraisons intracommunautaires de biens (LIC).

L’identification valide de l’acquéreur et la souscription d’une déclaration d’échange de biens (DEB), comportant les mentions obligatoires, deviendront des conditions de fond pour bénéficier de l’exonération. Les entreprises n’auront donc plus la possibilité de justifier par d’autres moyens la qualité d’assujetti de l’acquéreur. En cas de manquement dans l’établissement de la DEB, la directive prévoit la possibilité d’échapper à la remise en cause de l’exonération à la condition de justifier du motif de l'erreur commise auprès des autorités fiscales, mais la portée de cette clause exonératoire nous semble fort mal définie. Ces deux mesures priveront, en pratique, les opérateurs de tout droit à l’erreur et rendront complexes certaines transactions, en particulier avec des entreprises qui débutent leur activité.

La deuxième correction vise à consolider la sécurité juridique des opérateurs en harmonisant les justificatifs qui permettent de présumer que la condition relative à l’expédition ou le transport effectif des biens, pour bénéficier de l’exonération de la LIC, est respectée (art. 45 bis du règlement 282/2011).

La troisième correction concerne les modalités d’application du régime simplifié des stocks en consignation (art. 17 bis).

Enfin, la quatrième correction consiste en l'établissement d'une règle harmonisée d’attribution de la LIC dans l’hypothèse de transactions en chaîne. Elle vise le cas dans lequel les mêmes biens font l’objet de ventes successives et où la livraison ou le transport intervient directement entre le premier vendeur et le dernier acquéreur de la chaîne (art. 36 bis). Dans de telles transactions, la directive détermine désormais de manière explicite celle des opérations successives à laquelle la LIC est attribuée lorsque la livraison ou le transport est assuré par l’intermédiaire ou pour son compte. La LIC est alors attribuée à la première livraison de biens consentie à l’intermédiaire, sauf si celui-ci communique à son fournisseur le numéro d’identification qui lui serait attribué dans le pays de départ de la marchandise auquel cas la LIC est attribuée à la livraison qu’effectue l’intermédiaire.

Les quatre quick fixes entreront en application le 1er janvier 2020.

Plusieurs mesures, qui figuraient dans les versions antérieures, n’ont pas trouvé d’accord entre les Etats membres mais méritent néanmoins d’être signalées.

La directive ne contient plus les dispositions par lesquelles la Commission entendait faire franchir au système une première marche vers le régime définitif prévu par son plan d’action à échéance de 2022. Ainsi, si l’instauration d’un régime définitif fondé sur le principe d’imposition au lieu de départ est supprimé de la directive TVA (art. 402), le principe d’imposition au lieu de destination, qui constitue désormais le socle du projet d’évolution du système, ne lui a pas été substitué. De même, la directive ne prévoit plus la mise en place d’un statut d’assujetti certifié que la Commission souhaitait voir appliquer par anticipation du régime définitif tel qu’elle le propose pour l’avenir.

De fait, l’ensemble des mesures nécessaires à la mise en place d’un régime définitif fondé sur le principe d’imposition au lieu de destination figurent désormais dans un nouveau projet présenté le 25 mai 2018 sur lequel la négociation entre les Etats membres débute à peine.

Par ailleurs, le texte adopté n’inclut que quatre corrections concernant le régime des livraisons intracommunautaires alors qu’une correction additionnelle avait été proposée par certains Etats membres pour étendre la portée du régime d’exonération des services rendus par les groupements de moyens à leurs membres (art. 132 paragraphe 1 sous f) de la directive). Selon une déclaration du Conseil annexée au projet de directive adopté par l’ECOFIN, la Commission proposera éventuellement un projet de directive à l’issue d’une étude portant sur cette question.

IP 532/118, 02 oct. 2018 - Text of agreed VAT "quick fix" package

2. Mécanisme d’autoliquidation généralisé

Jusqu’au 30 juin 2022, les Etats membres les plus exposés à la fraude carrousel pourront appliquer à l’ensemble des transactions B to B domestiques excédant 17 500 euros le mécanisme de l’autoliquidation de la TVA par l’acquéreur. Cette mesure entre en application le vingtième jour suivant la publication au JOCE de la directive. Mais en pratique, elle ne devrait être mise en œuvre par les Etats qui le souhaitent que dans plusieurs mois dès lors qu’ils devront préalablement présenter une demande à la Commission établissant qu’ils remplissent les conditions fixées par la directive, à savoir : 

  • d’une part que leur VAT gap de référence (2014, tel que déterminé dans un rapport de 2016) excède de 5 points au moins le VAT gap moyen des Etats membres ;
  • d’autre part que cet écart est constitué au moins pour 25 % de fraude carrousel suivant la méthode d’évaluation proposée par la Commission ; et enfin
  • que les gains escomptés de l’application de la mesure pour pallier l’inefficacité des autres mesures de contrôle excèdent au moins pour 25 % la charge que constitue la mise en œuvre de la mesure pour les entreprises et l’administration.

Une fois le dossier instruit, après d’éventuels échanges entre l’Etat membre et la Commission, l’application du régime doit être autorisée par une décision à l’unanimité du Conseil de l’UE sur proposition de la Commission qui conservera, par la suite, un "bouton d’urgence" lui permettant de mettre un terme à l’application de l'autoliquidation généralisée s’il s’avère qu’elle a des effets négatifs importants sur le marché intérieur.

IP 534/18, 02 oct. 2018 - Texte de l'accord

3. Taux applicable aux livres, journaux et publications en ligne

Les Etats membres pourront désormais appliquer aux livres, journaux et publications fournis par voie électronique un taux réduit, y compris inférieur au seuil général de 5 %. Pour mémoire, la France applique d’ores et déjà le taux réduit de 2,1 % à la presse électronique au même titre que la presse papier.

IP 563/18, 02 oct. 2018 - Texte de la directive tel qu'il a été approuvé

Enfin, le Conseil de l’Union a adopté définitivement divers aménagements du règlement n° 904/2010 de coopération administrative entre les Etats membres dans le domaine de la TVA.

IP 535/18, 02 oct. 2018 - Texte du règlement sur le renforcement de la coopération administrative dans le domaine de la TVA