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Quelle majorité pour demander une réunion extraordinaire du CSE ?

Flash info Droit social

08/03/2019

Cass. soc., 13 févr. 2019, n° 17-27.889

La majorité des membres du comité d’entreprise – et demain, du comité social et économique (CSE) – nécessaire afin de formuler une demande de réunion extraordinaire s’entend de la majorité des membres élus ayant voix délibérative. C’est à l’occasion d’une affaire suivie par le cabinet CMS Francis Lefebvre Avocats que la Cour de cassation a apporté pour la première fois cette précision.

NB : la décision commentée a été rendue sous l’empire des règles applicables au comité d’entreprise mais est parfaitement transposable au CSE, les termes des articles L.2325-14 (relatif au comité d’entreprise) et L.2315-28 (relatif au CSE) du Code du travail étant identiques.

► La demande d’une réunion extraordinaire doit émaner de la majorité des membres du CSE ayant voix délibérative
À défaut d’accord collectif, la périodicité des réunions est fixée par la loi. Ainsi, le CSE se réunit (C. trav., art. L.2315-28) :

  • au moins une fois par mois dans les entreprises de plus de 300 salariés ;
  • et au moins une fois tous les deux mois dans les entreprises de moins de 300 salariés.

En complément de ces réunions récurrentes, la majorité des membres du CSE peut, si elle l’estime nécessaire, solliciter la tenue de réunions extraordinaires (C. trav., art. L.2315-28, al. 3). En présence d’une telle demande, l’employeur qui refuse de convoquer la réunion supplémentaire se rend coupable d’un délit d’entrave (Cass. crim., 14 sept. 1988, n° 87-91.416 ; Cass. crim., 11 mars 2008, n° 07-80.169). 

Dans la présente affaire, le comité d’entreprise d’une unité économique et sociale comprenait onze membres :

  • six titulaires ;
  • trois suppléants ;
  • un représentant syndical ;
  • le président du comité.

Par courrier, trois élus titulaires, deux élus suppléants et le représentant syndical ont sollicité la tenue d’une réunion extraordinaire. L’employeur a refusé de donner suite à cette demande au motif que la majorité requise n’était pas atteinte.

En l’absence de précisions légales et jurisprudentielles1, c’est donc autour de la notion de "majorité des membres" que s’est cristallisé le débat judiciaire. Deux interprétations s’opposaient : 

  • la première est une conception élargie de la notion de majorité des "membres", celle-ci comprenant l’ensemble des membres du comité, à savoir les élus titulaires, les élus suppléants, les représentants syndicaux et le président ;
  • la seconde est une conception plus restreinte, ne comprenant que les membres ayant voix délibérative, c’est-à-dire les élus titulaires et, lorsque la demande est formulée au cours d’une réunion ordinaire (voir ci-dessous), les suppléants remplaçant un titulaire absent.

Dans l’affaire commentée, la cour d’appel de Paris a retenu que la majorité des membres devait s’entendre de celle de tous les membres composant le comité. Dès lors, il convenait de prendre en compte, outre les élus titulaires, les élus suppléants, le représentant syndical et le président du comité2 pour apprécier le caractère majoritaire d’une demande. Au cas particulier, la demande de réunion extraordinaire devait être jugée recevable puisqu'elle émanait de six membres sur onze (CA Paris, pôle 6, ch. 1, 20 oct. 2017, n° 17/10513).

La Cour de cassation a rejeté ce raisonnement et a retenu la seconde interprétation : la majorité nécessaire afin de formuler une demande de réunion extraordinaire s’entend de la majorité des membres élus ayant voix délibérative (Cass. soc., 13 févr. 2019, n° 17-27.889). En l’espèce, la majorité n’ayant pas été atteinte, l’employeur était donc en droit de refuser la tenue d’une réunion extraordinaire.
► Demande formulée au cours ou hors d’une réunion récurrente
Par cette décision, la Cour de cassation pose un principe d’une logique imparable et d’autant plus justifié que lorsqu'une demande de réunion extraordinaire est formulée en cours de réunion, cette décision prend nécessairement la forme d’une résolution adoptée, en application de l’article L.2315-32 du Code travail tel qu’interprété par la jurisprudence, à la majorité des membres titulaires présents (Cass. soc., 25 janv. 1995, n° 92-16.778).

Ainsi, il résulte de l’arrêt du 13 février 2019 (n° 17-27.889) que la notion de majorité des membres nécessaire afin de formuler une demande de réunion extraordinaire s’entend toujours de la majorité des membres ayant voix délibérative, que la demande soit formée en réunion ou par courrier, entre deux réunions récurrentes.


1. Seul un arrêt de la cour d’appel de Colmar s’était jusqu’à alors, à notre connaissance, prononcé sur la question (CA Colmar, 9 févr. 2006, n° 05-00.449).
2. Dans une autre affaire récente, le tribunal de grande instance de Paris a fait évoluer sa position et a retenu que le président du comité ne devait pas être pris en compte pour le calcul de la majorité des membres (TGI Paris, 29 mai 2018, n° 17/17084).


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