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Un portefeuille boursier géré comme professionnel peut-il échapper à l'ISF?

19/04/2012

La loi fiscale peut-elle dire tout et son contraire ? Oui, car le Parlement est souverain ! Est-ce satisfaisant ? Non, bien entendu, car une législation démocratique de qualité doit garantir la prévisibilité des situations juridiques aux citoyens - fussent-ils contribuables !

Pour autant, on sait que la rétroactivité des lois fiscales prend régulièrement à revers et par surprise les situations les mieux établies. Telle opération, qui relevait à l'instant « t » d'un régime fiscal donné, se retrouve finalement soumise à un autre régime, rarement plus favorable ! On observe également qu'une même situation peut être traitée à un même instant de manière radicalement différente selon les impôts qui s'y appliquent. En voici encore une illustration. Le Code général des impôts (CGI) réserve un traitement particulier aux produits des opérations de Bourse effectuées dans des conditions qui caractérisent une activité exercée à titre professionnel.

Les gains correspondants sont taxés comme des revenus d'activité BNC (bénéfices non commerciaux) et non selon le régime des plus-values. Est-ce à dire que celui qui consacre une partie de son patrimoine à la gestion professionnelle, mais pour compte propre, d'un portefeuille boursier peut espérer échapper à l'ISF ? Autrement dit, est-il possible de tirer la conclusion que les actifs productifs de revenus qualifiés de « professionnels » par le CGI constituent dans ce cas des « biens professionnels » au sens de ce même Code ? Non, a récemment répondu la cour d'appel de Versailles (arrêt du 20 octobre 2011), dans une affaire où le contribuable avait structuré une société soumise à l'ISF pour y exercer ce type d'activité.

Car sous le prisme de l'ISF, la société a été considérée comme se livrant à la simple gestion de son « propre patrimoine mobilier », comme un brave père de famille soucieux d'épargner sans risque... La cour s'en justifie au motif que le CGI est indifférent à toute « analyse factuelle des conditionsd'exercice de l'activité », peu importe « les moyens mis en oeuvre, la nature, le nombre ou la complexité des opérations boursières réalisées ».

La logique s'égare, le bon sens renonce. Face je gagne, pile tu perds, semble railler un CGI sans cohérence d'ensemble. Duralex, sed lex...

Auteurs

Portrait deLuc Jaillais
Luc Jaillais
Associé
Paris