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Une retouche bienvenue aux règles encadrant la responsabilité des dispensateurs de crédit

Arnaud Reygrobellet, Of Counsel

28/04/2009

Une ordonnance du 18 décembre 2008, complétée par un décret du 12 février 2009, est venue réformer le droit français de l'insolvabilité, le nouveau dispositif étant entré en vigueur le 15 février. Les modifications n'entraînent pas un bouleversement du dispositif existant, mais apportent ici et là un certain nombre de précisions, d'ajustements, de corrections, dans un sens globalement pertinent.

Il en va ainsi du régime spécial de responsabilité régi à l'article L. 650-1 du Code de commerce. Le texte institue un mécanisme exonératoire au bénéfice des créanciers, dont la responsabilité pourrait être recherchée du fait des « concours » qu'ils ont consentis. Ils ne peuvent être poursuivis, sauf dans trois hypothèses spécifiques : en cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur, ou s'il s'avérait que les garanties prises en contrepartie de ces concours étaient disproportionnées à ceux-ci.

Le texte, dans son libellé ancien, soulevait deux difficultés.

La première, générale, avait trait au champ d'application du dispositif. Du fait de la place du texte dans le Code et des termes très généraux employés, certains défendaient l'idée que son champ d'application était général : selon eux, il pouvait jouer non seulement dans le cadre d'une conciliation mais aussi, indépendamment de toute procédure régie par le Livre VI du Code de commerce (conciliation par exemple). La modification apportée par l'ordonnance du 18 décembre interdit cette interprétation extensive. Le texte indique désormais expressément qu'il n'est applicable que « lorsqu'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte ».

Une autre difficulté, plus sérieuse, concernait la troisième exception. En effet, la sanction prévue contre le dispensateur de crédit en présence de garanties disproportionnées était pour le moins radicale : c'était la nullité des garanties prises en contrepartie des concours consentis. Concrètement, lorsqu'une faute du dispensateur de crédit était établie et que le juge avait identifié une disproportion, il était privé de toute faculté d'aménager la sanction adéquate. L'automaticité et l'énormité de la sanction expliquent sans doute que la règle n'ait quasiment pas été appliquée depuis 2006, date de son entrée en vigueur (par exemple, CA Paris 15e ch., 3 juil. 2008, n° 06/20946 SA Caisse d'épargne IDF nord, refusant de retenir la responsabilité de la banque). Aussi peut-on se féliciter que le libellé de l'article L. 650-1, alinéa 2, ait été remanié. Désormais, il prévoit une nullité facultative des garanties (elles « peuvent être annulées ») ou encore la possibilité pour le juge d'en décider la simple réduction.

C'est là en réalité un retour aux solutions jurisprudentielles qui prévalaient avant l'entrée en vigueur du texte et qui continuent d'être appliquées en dehors du droit de l'insolvabilité. On peut donc penser que la sanction de la disproportion se situera le plus souvent à hauteur de la partie jugée disproportionnée des garanties exigées, le garant devant s'exécuter pour le surplus

Article paru dans la revue Option Finance le 23 février 2009

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Arnaud Reygrobellet
Associé
Paris