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Validité de la rupture conventionnelle dans la jurisprudence

L'appréciation souple des conditions se confirme

21/06/2019

Poursuivant son travail d'appréciation des conditions de validité de la rupture conventionnelle homologuée, la Cour de cassation juge que celle-ci est valable même lorsque l'employeur a été assisté alors que le salarié s'est présenté seul à l'entretien (Cass. soc., 5 juin 2019, n° 18-10.901) ou lorsqu'elle a été conclue avec un salarié déclaré inapte à son poste après un accident du travail, sauf cas de fraude ou de vice du consentement (Cass. soc., 9 mai 2019, n° 17-28.767). Elle a également précisé, s'agissant d'un salarié protégé, les conséquences de l'annulation de l'autorisation de conclure une rupture conventionnelle donnée par l'inspection du travail (Cass. soc., 15 mai 2019, n° 17-28.547). Panorama de la jurisprudence récente en la matière.

Validité de la rupture conventionnelle conclue entre un employeur assisté et un salarié non assisté

Le Code du travail prévoit que les parties au contrat conviennent du principe d'une rupture conventionnelle lors d'un ou plusieurs entretiens au cours desquels l'une et l’autre peuvent se faire assister :

  • s’agissant du salarié, soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise, soit en l'absence de représentant du personnel dans l’entreprise par un conseiller du salarié ;
  • s’agissant de l'employeur, soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise soit, dans les entreprises de moins de 50 salariés, par une personne appartenant à son organisation patronale ou par un autre employeur relevant de la même branche.

L'article L.1237-12 du Code du travail précise que l'employeur peut user de cette faculté "quand le salarié en fait lui-même usage". Il en résulte que lorsque le salarié se présente seul à l’entretien, l'employeur ne peut en principe se faire assister au cours de celui-ci.

C'est à la question de la sanction en cas de méconnaissance de cette règle que la Cour de cassation a répondu dans un arrêt récent (Cass. soc., 5 juin 2019, n° 18-10.901).

Dans la ligne de sa jurisprudence souple sur l'appréciation des conditions de validité de la rupture conventionnelle, la Cour de cassation estime que "l'assistance de l'employeur lors de l'entretien préalable à la signature de la convention de rupture ne peut entraîner la nullité de la rupture conventionnelle que si elle a engendré une contrainte ou une pression pour le salarié qui se présente seul à l'entretien" (Cass. soc., 5 juin 2019, n° 18-10.901). Rappelons à cet égard qu'elle avait déjà retenu que le défaut d'information du salarié sur la possibilité d'avoir recours à un assistant n'avait pas lui-même pour effet d'entraîner la nullité de la convention (Cass. soc., 29 janv. 2014, n° 12-27.594 ; Cass. soc., 19 nov. 2014, n° 13-21.207).

Toutefois et selon une jurisprudence constante, le salarié pourra obtenir la nullité de la convention de rupture conventionnelle s'il démontre que le défaut d'information sur la possibilité de se faire assister ou si la surreprésentation de la partie employeur a eu pour effet d'exercer sur lui une contrainte ou une pression viciant son consentement.

Validité de la rupture conventionnelle conclue avec un salarié inapte à son poste à la suite d'un accident du travail

La possibilité de conclure une rupture conventionnelle homologuée avec des salariés bénéficiant d'une protection particulière contre la rupture de leur contrat travail a été reconnue par la Cour de cassation, notamment en cas de suspension du contrat consécutif à un accident du travail ou une maladie professionnelle (Cass. soc., 30 sept. 2014, n° 13-16.297) ou encore pendant la période de protection liée à un congé de maternité (Cass. soc., 25 mars 2015, n° 14-10.149).

Cependant, la rupture d'un commun accord conclue avec un salarié déclaré inapte à son poste de travail avait été déclarée nulle par la chambre sociale (Cass. soc., 4 janv. 2000, n° 97-44.566). Mais cette décision avait été rendue sous l'empire de la législation antérieure à l'introduction de la rupture conventionnelle dans le Code du travail.

Saisie à nouveau de cette question, la Cour de cassation revient par un arrêt du 9 mai 2019 sur cette jurisprudence. Elle a ainsi décidé que "sauf cas de fraude ou de vice du consentement, une convention de rupture [peut] être valablement conclue par un salarié déclaré inapte à son poste à la suite d'un accident du travail" (Cass. soc., 9 mai 2019, n° 17-28.767).

Le salarié dont l'inaptitude – d'origine professionnelle ou non - est définitivement constatée peut parfaitement signer une rupture conventionnelle et en négocier le montant au moins égal à l'indemnité spécifique de rupture conventionnelle. En revanche, la Cour de cassation ne s'est pas prononcée sur le point de savoir si, en cas de d’inaptitude d’origine professionnelle, le montant de cette indemnité doit être au moins égal au double de celui de l'indemnité légale de licenciement, comme le prévoit l'article L.1226-12 du Code du travail en matière de licenciement du salarié inapte. A cet égard, il a déjà été jugé que, en cas de mise à la retraite d'un salarié consécutive à son inaptitude professionnelle, celui-ci peut prétendre au bénéfice de l'indemnité spéciale de licenciement (Cass. soc., 29 janv. 2002, n° 99-41.028). Il n'est pas exclu que la Chambre sociale retienne une solution identique s'agissait d’une rupture conventionnelle.

Le risque que l'employeur ait imposé une rupture conventionnelle au salarié inapte dans le but d'éluder les dispositions protectrices du licenciement pour inaptitude d'origine professionnelle et impossibilité de reclassement prévues aux articles L.1226-8 et suivants du Code du travail n'est pas pour autant exclu par la Cour de cassation. Elle permet ainsi au salarié de remettre en cause la convention de rupture conventionnelle s'il rapporte la preuve d'une fraude de l'employeur ou d'un vice de son consentement (la fragilité de son état de santé altérant ses capacités, par exemple).

Réintégration du salarié protégé dont l'autorisation de la rupture conventionnelle a été annulée

Le Code du travail prévoit la possibilité de conclure une rupture conventionnelle avec un salarié protégé. Celle-ci est alors soumise à l'autorisation de l'inspecteur du travail (C. trav., art. L.1237-15).

Dans un arrêt du 15 mai 2019 (n° 17-28.547), la Cour de cassation précise que l'annulation de l'autorisation délivrée par l'inspecteur du travail rend nulle la rupture conventionnelle individuelle signée avec un salarié protégé. Ce dernier doit alors être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent. La Cour s'aligne ainsi sur le régime de l'annulation de l'autorisation de licenciement.

Si l'employeur ne procède pas à cette réintégration, sans justifier d'une impossibilité de réintégration, le salarié peut agir en résiliation judiciaire, laquelle produit les effets d'un licenciement nul en raison de la violation du statut protecteur.

Le salarié protégé peut alors prétendre à l'indemnité due au titre de la méconnaissance du statut protecteur, égale à la rémunération qu'il aurait perçue entre la date de son éviction jusqu'à la fin de la période de protection dans la limite de 30 mois, sans préjudice des indemnités de rupture (licenciement, préavis et congés payés) dont il convient de déduire le montant de l'indemnité spécifique de rupture conventionnelle perçue.


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