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Propriété intellectuelle

Quelles sont les potentielles conséquences en cas de Brexit dur ?

Un hard Brexit aura un impact plus ou moins grand sur tous les droits de la propriété intellectuelle (PI) et principalement sur les marques de l'Union européenne (UE) et les dessins et modèles communautaires dans lesquels l’harmonisation européenne est la plus achevée.Bien entendu le Brexit n’entraîne aucune conséquence sur la validité des marques et des dessins et modèles obtenus par la voie nationale ou par la désignation du Royaume-Uni (RU) dans un dépôt international, ou encore des brevets européens étendus au RU. Dans un cas comme dans l’autre il s’agit de titres nationaux. Explications sur les conséquences en cas de Brexit dur.

A quinze jours de la date officielle du Brexit, c'est toujours l'incertitude au RU en ce qui concerne la date et les modalités du Brexit. Après avoir exclu l'hypothèse d'une sortie sans accord de l'Union européenne (UE) par un très court écart de voix le 13 mars et avoir rejeté pour la deuxième fois, l’accord de retrait négocié par le gouvernement de Theresa May, la veille, les députés britanniques se sont prononcés le 14 mars, pour un report du Brexit probablement à fin juin 2019 et pour un nouveau vote sur l'accord de retrait. Ce nouveau vote devrait être organisé dans les prochains jours.

Dans sa version actuelle l’accord envisagé entre l’EU et le RU prévoyait une période transitoire allant jusqu’au 31 décembre 2020 pendant laquelle la législation actuelle continuerait à s’appliquer et la continuité des marques de l’UE et des dessins et modèles communautaires enregistrés, sans formalisme coût supplémentaire pour le titulaire, y compris lorsque ces droits ont été obtenus par le biais du système de Madrid s’agissant des Marques et de La Haye pour ce qui est des dessins et modèles.

Toutefois cet accord tiendra-t-il ? Après avoir déjà voté à deux reprises contre il ne parait pas très vraisemblable que le Parlement se renie lors du troisième vote, même s’il est soumis à une grande pression de la part le gouvernement.

Dans ces circonstances, l’hypothèse d’un hard Brexit, c’est-à-dire d’un Brexit sans accord de retrait n’est plus une vue de l’imagination mais devient le scénario le plus probable. C’est donc dans cette perspective que nous nous plaçons dans ces commentaires.

Cinq thèmes sont abordés ici : vous pouvez dérouler la page pour tous les lire ou cliquer sur l'un des thèmes ci-dessous pour y accéder rapidement.

 

Marques et dessins et modèles, quelles conséquences en cas de Brexit dur ?

Un hard Brexit signifiera tout simplement que le RU se retrouvera dès la date de sortie, dans la position d’un tiers relativement à l’UE et inversement.

S’agissant du droit substantiel, toutes les directives européennes régissant le droit des marques et des dessins et modèles y compris la deuxième directive d’harmonisation du droit des marques 2015/2436 qui devait être transposée avant le 14 janvier 2019, l’ont été et font partie du droit national. Par ailleurs les règlements européens étant d’application directe, le corps de règles régissant la substance du droit du RU dans ces matières, est très proche du droit français et de façon plus générale du droit national des autres Etats membres de l’UE et devrait probablement le demeurer un certain temps.

En revanche, dès sa sortie, les directives et les règlements européens en préparation et à fortiori les directives et règlements futurs n’auront plus aucun effet au RU qui cessera aussi d’être couvert par toute demande de marque de l’UE et toute demande de dessin ou modèle communautaire.

Marques et dessins et modèles enregistrés : concernant les marques européennes ainsi que les dessins et modèles communautaires enregistrés avant le 29 mars ou de la date effective de sortie du RU de l’EU, si les deux parties s’accordaient sur une autre date, les textes adoptés par gouvernement lesquels s’appliqueront quel que soit le scénario de sortie, (The Trade Marks (EU Exit) Regulations 2019 (https://www.gov.uk/government/publications/changes-to-trade-mark-law-if-the-uk-leaves-the-eu-without-a-deal/changes-to-trade-mark-law-in-the-event-of-no-deal-from-the-european-union), prévoient une conversion automatique en marques et dessins et modèles du RU sans aucun formalisme ni coût supplémentaire à charge des titulaires respectifs. Ces marques européennes et dessins et modèles communautaires conservent la même date de dépôt et le cas échéant de priorité voire la date de l’ancienneté d’une marque antérieure mais uniquement lorsque celle-ci est une marque du RU. On estime à près de 1,3 million de marques de l’UE et autour de 600 000 dessins et modèles communautaires qui seront ainsi automatiquement clonées en marques de l’UK.

Un point important qui a été clarifié par ce texte concerne les renouvellements des enregistrements de marques ou modèles venant à échéance dans les six mois autour de la date de sortie du RU. Pour ceux dont la date d’expiration précédait la date de sortie et la formalité a été accomplie il n’y a aucune anomalie. Le renouvellement sera effectif et la marque ainsi renouvelée sera convertie en marque nationale. En revanche pour tous les enregistrements qui viennent à échéance après la date de sortie il ne sera d’aucune utilité d’anticiper la formalité en espérant réaliser des économies puisque, dans toutes les circonstances la partie RU du droit européen devra faire l’objet d’un renouvellement pour être maintenue en vigueur.

Dans certaines circonstances les titulaires de MUE ou de dessins et modèles communautaires enregistrés peuvent renoncer au clonage de leurs marques et modèles (Opt Out), mais uniquement dans l’hypothèse où ils n’auraient pas fait l’objet d’un usage au RU, d’une cession, d’une licence ou d’un quelconque autre accord au profit d’un tiers. Cette hypothèse est à considérer lorsque le titulaire d’une marque européenne ou d’un modèle communautaire s’est engagé vis-à-vis d’un tiers, généralement dans le contexte d’un accord de coexistence, à ne pas enregistrer sa marque ou son modèle au RU.

En tout état de cause les nouveaux enregistrements de marques ou modèles du RU, issus de la transformation des enregistrements européens antérieurs à la date de sortie, deviennent dès leur création, totalement indépendants des marques et modèles de base et, s’agissant des marques doivent pour pouvoir être maintenues, faire l’objet d’un usage local alors que l’usage dans l’UE continuera à être pris en considération pour apprécier l’usage sérieux pendant la période de cinq ans précédant le Brexit. En d’autres termes le clonage ne crée pas une situation juridique nouvelle relativement à ces marques et modèles mais ne fait que prolonger la situation antérieure.

De même, dès la date de sortie du RU de l’UE, la voie européenne ne sera plus possible pour protéger une marque ou un dessin ou modèle au RU, mais il faudra le faire via un dépôt national ou un dépôt international de marque selon le Protocole de Madrid ou modèle international en application de la Convention de la Haye.

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Marques et dessins et modèles en cours d’enregistrement : s’agissant des demandes de marques et modèles en cours d’enregistrement devant l’EUIPO, leurs titulaires disposeront d’un délai de neuf mois à compter de la date de sortie pour procéder à une demande nationale laquelle, si le re-dépôt a lieu dans le délai requis, conservera la date de dépôt ou de priorité de la demande européenne correspondante. On estime à près de 85 000 le nombre de demandes d’enregistrement de MUE et de 15 à 20 000 dessins et modèles en cours d’enregistrement, au moment du Brexit.

Un certain nombre de zones d’ombre demeurent encore s’agissant de ces nouvelles demandes. Une chose semble cependant certaine, le re-dépôt constitue une procédure totalement nouvelle et indépendante de la procédure devant l’EUIPO. Ainsi le déposant doit s’acquitter d’une nouvelle taxe et, s’agissant des demandes de MUE, le signe fera l’objet d’un examen complet de distinctivité et d’une publication afin de permettre aux tiers de faire valoir leurs droits, peu importe le stade auquel se trouvait la demande européenne.

Le Brexit étant un fait connu depuis le référendum du 23 juin 2016, beaucoup de titulaires de marques et modèles ont commencé depuis longtemps à désigner le UK dans leurs dépôts internationaux même si par ailleurs ils ont également effectué un dépôt de MUE. Ils peuvent ainsi se trouver, à la date du retrait, en possession d’une marque britannique et d’une demande européenne susceptible d’être convertie en demande nationale du RU. Dans un tel scénario ces personnes peuvent avoir un intérêt à renoncer à la transformation des demandes européennes afin d’éviter les aléas d’une nouvelle procédure et rencontrer des objections ou des oppositions qui pourraient par ricochet, rejaillir sur leurs marques nationales antérieures enregistrées ou se trouvant à un stade de la procédure plus avancé.

Marques de l’UE abandonnées ou refusées : dans certaines conditions une MUE refusée ou abandonnée pourra faire l’objet d’une conversion en marque du RU avec le bénéfice de la même date de dépôt ou de priorité, dès lors que l’abandon ou le refus sont intervenus depuis moins de trois mois à compter de la date de sortie.

Modèles non enregistrés : de modèle européen non enregistré sera également protégé mais uniquement indépendamment, semble-t-il, de l’Etat membre dans lequel a eu lieu la première divulgation. Par ailleurs le RU a indiqué qu’il allait adopter une législation nationale calquée sur la réglementation européenne, qui créerait un titre nouveau de modèle non enregistré laquelle bénéficierait bien entendu aux modèles divulgués au RU.

Epuisement des droits : concernant le point très important de l’épuisement des droits de marque et de dessins et modèles le RU a informé le public qu’il continuerait à appliquer l’épuisement des droits à l’échelle de l’Espace Economique Européen dont la compétence judiciaire relève de la Cour de justice de l'Association Européenne de Libre-Echange (EFTA Court).

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Brevets : y aura-t-il des conséquences en cas de Brexit dur ?

Le RU étant membre de la Convention sur le brevet européen, dont l’appartenance n'est pas liée au statut d'État membre de l'UE, la situation concernant les brevets européens ne devrait pas être affectée de manière significative par le Brexit. Le brevet européen, qui correspond à une collection de brevets nationaux, restera disponible pour protéger les inventions au RU via un processus de demande centrale sous l’égide de l'Office européen des brevets, comme c’est le cas aujourd’hui.

En revanche, le régime des certificats complémentaires de protection (CCP) lesquels permettent, dans certaines conditions, de prolonger la durée de protection d’un brevet de médicament au-delà des 20 ans habituels, risque d’être affecté par le Brexit. En effet, les CCP sont régis par un règlement de l'UE lequel cessera de s’appliquer au RU après sa sortie EU. Comme il se propose de le faire pour les modèles non en registrés et eu égard, en outre, aux enjeux économiques et à l’importance de l’industrie pharmaceutique au RU, nous n’avons aucun doute que le pays adoptera une législation nationale spécifique sans doute calquée également sur la réglementation de l’UE.

Mais l’impact majeur concerne la Juridiction Unifiée des Brevets (JUB) laquelle constitue avec le brevet unitaire, la plus grande réforme du droit européen des brevets depuis l’adoption de la Convention sur le brevet européen.

En effet, le premier « pilier » du nouveau système, à savoir le brevet unitaire, a été créé par l’adoption d’un règlement de l’EU. Dans ce contexte, il semble difficile d’envisager que le brevet unitaire puisse avoir des effets sur le territoire d’un Etat non membre de l’Union tel que le RU après le Brexit.

Et pour le second « pilier », la JUB, l’accord prévoit d’une part qu’une partie de la division centrale aurait son siège à Londres et, d’autre part, que l’entrée en vigueur est subordonnée à la ratification par les trois pays les plus importants dont le RU fait partie. Au regard de ces éléments, il n’est pas exclu que le Brexit paralyse l’entrée en vigueur de l’ensemble du système. En outre, il semble difficile - en l’état actuel des textes - d’envisager une participation du RU en tant que tiers à l’UE.

Copyright et droit d’auteur

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Les différences fondamentales entre le copyright insulaire et le droit d’auteur continental, notamment en ce qui concerne la substance du droit lui-même, sont certainement à l’origine de l’échec de toutes les tentatives d’harmonisation de ces matières, initiées par la Commission Européenne. Ainsi tant le copyright que le droit d’auteur restent encore principalement des droits nationaux.

Toutefois au cours des 46 ans d’appartenance à l’UE le copyright a considérablement évolué vers un rapprochement du droit d’auteur. En principe, ces évolutions devraient subsister à la sortie du RU de l’UE.

Remarques et recommandations, les conséquences du Brexit sur les droits de PI

Au-delà des aspects principalement procéduraux que nous venons d’aborder, le Brexit aura un impact dans la vie quotidienne des droits de PI ainsi que dans la gestion et le management de ces droits.

Lutte contre la contrefaçon : afin de lutter contre la contrefaçon de leurs droits de PI, les titulaires font souvent appel aux douanes lesquelles dans le cadre de leur contrôle peuvent retenir les marchandises suspectes le temps nécessaire pour permettre aux intéressés de confirmer ou infirmer leur caractère contrefaisant. Ces demandes d’intervention sont régies par le règlement n° 608/2013 du 12 juin 2013 et présentent un caractère unitaire. Par conséquent elles cesseront de produire leurs effets au RU dès sa sortie de l’UE. Il est donc conseillé de déposer de nouvelles demandes nationales auprès des douanes du RU afin de pouvoir continuer à bénéficier de ce service pratiquement gratuit.

Licences et accords de coexistence : les contrats de licence actuels, les accords de coexistence et de façon plus générale toutes les conventions par lesquelles les titulaires de droits de PI organisaient la protection et l’exploitation de deux marques, reposent le plus souvent sur l'hypothèse d’une l'UE constituant un territoire unitaire englobant le RU. Il est donc d'examiner les accords existants afin de s’assurer qu’ils sont conformes à la situation nouvelle et à la volonté des parties concernant notamment l’utilisation des droits, les redevances, le règlement des litiges etc., et si nécessaire procéder aux ajustements imposés par cet événement que constitue le Brexit.

Le Brexit est une situation nouvelle. En effet jusqu’à présent aucun Etat membre ne s’étant déjà retiré de l’UE nous manquons totalement de points de repères. Nous sommes certains que des problèmes nouveaux auxquels personne n’a songé, ne manqueront pas de se présenter dans le domaine des droits de propriété intellectuelle mais aussi dans tous les autres domaines. C’est pourquoi nous aurions tant souhaité que, à défaut de pouvoir vivre ensemble, les deux parties s’accordent sur une belle convention de divorce mais la tâche semble bien difficile.

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