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La Lettre Douanes/Accises | Avril 2011

08/04/2011


Edito

Nous avons le plaisir de vous adresser le premier numéro de La Lettre Douanes/Accises.

Parce que nous conseillons régulièrement des entreprises confrontées à la complexité des règlementations douanières, tant européennes que nationales, dont les conséquences sont souvent préjudiciables financièrement et parfois même pénalement, nous avons pensé utile de partager notre expertise avec vous. Forte d’une expérience reconnue, notre équipe de spécialistes est à même de prendre en charge l’ensemble des problématiques rencontrées : de l’audit préventif au contentieux en passant par les négociations avec l’administration d’accords spécifiques.

Nous espérons que cette initiative rencontrera vos attentes et nous nous proposons de vous faire parvenir, par cette Lettre, notre éclairage régulier sur les thèmes d’actualité qui nous paraîtront pertinents pour la bonne conduite des affaires de votre entreprise.

Nous vous souhaitons une bonne lecture et nous tenons à votre disposition pour tout contact que vous pourrez souhaiter.

Bonne lecture,

L’Equipe Douanes/Accises

Sommaire


Modalités de la prise en compte des erreurs des autorités douanières et de la bonne foi de l’importateur dans le recouvrement a posteriori des droits à l’importation

Un commissionnaire en douane avait importé aux Pays-Bas entre juillet 2002 et novembre 2004, pour le compte d’une société importatrice néerlandaise HIT TRADING BV, des lampes fluorescentes compactes à ballasts électroniques, intégrés en provenance du Pakistan.

A l’époque des faits, ces lampes, à condition qu’elles soient originaires du Pakistan, bénéficiaient d’un traitement tarifaire préférentiel dans le cadre du système des préférences tarifaires généralisées, dès lors qu’elles étaient couvertes par un certificat d’origine Formule A délivré par les autorités pakistanaises attestant que les marchandises concernées remplissaient les conditions de reconnaissance de l’origine préférentielle.

En l’occurrence, les autorités compétentes pakistanaises avaient délivré un certificat d’origine Formule A et, les autorités douanières néerlandaises avaient accepté ces déclarations et accordé le bénéfice du traitement tarifaire préférentiel, c’est-à-dire une suspension des droits de douane.

A la même époque, les mêmes lampes originaires de Chine faisaient l’objet de mesures antidumping et l’Office Européen de Lutte Anti Fraudes (OLAF) avait également ouvert en 2003 une enquête sur le possible contournement des mesures antidumping frappant les lampes originaires de Chine via un certain nombre de pays tiers dont le Pakistan.

Les Etats membres ont été ainsi avertis des risques de contournement et invités à renforcer les contrôles sur les importations de lampes, ce qui a conduit les autorités douanières néerlandaises à procéder à des contrôles a posteriori dans les locaux de la société HIT TRADING BV.

La société HIT TRADING BV n’a elle, de son côté, été informée officiellement, de l’existence de l’enquête menée par l’OLAF que le 10 septembre 2004.

L’enquête de la Commission a confirmé les contournements des mesures antidumping, et les autorités douanières néerlandaises ont exigé auprès du Commissionnaire l’acquittement d’une part, des droits de douane dits « normaux » qui n’avaient pas été acquittés en raison de la suspension résultant de l’application des préférences tarifaires et, d’autre part, des droits antidumping dus en vertu de la réglementation antidumping.

Le commissionnaire a demandé la remise de ces droits notamment sur le fondement de l’article 239 du Code des douanes communautaire en liaison avec l’article 220-2b) dudit code.

- Sur les droits antidumping

Le requérant invoque notamment une erreur manifeste d’appréciation dans l’application de l’article 220-2b) du Code des douanes.

On rappelle que ce dernier énonce les conditions qui doivent être remplies de manière cumulative pour qu’une dette douanière puisse ne pas être prise en compte a posteriori. C’est le cas lorsque le montant des droits légalement dus n’avait pas été pris en compte par suite d’une erreur des autorités douanières elles-mêmes, qui ne pouvait raisonnablement être décelée par le redevable, ce dernier ayant agit de bonne foi et observé toutes les dispositions prévues par la réglementation en vigueur en ce qui concerne la déclaration en douane.

Au cas particulier, le requérant estime que les autorités pakistanaises avaient commis une erreur en acceptant de délivrer des certificats d’origine formule A, ayant pour conséquence la déclaration par le commissionnaire en douane d’ une origine préférentielle des marchandises, également acceptée par les autorités néerlandaises, entraînant une suspension de droits de douane. Cette erreur doit, selon le requérant s’étendre à la perception des droits antidumping.

Le Tribunal, a rejeté cette analyse en rappelant que le système des préférences tarifaires généralisées et celui de la législation antidumping poursuivent des finalités spécifiques et que leur mise en œuvre repose sur des critères et des instruments juridiques distincts.

Dès lors, l’erreur des autorités pakistanaises, dans la détermination de l’origine préférentielle pakistanaise des lampes, ne saurait être analysée comme une erreur portant également sur la détermination de l’origine non-préférentielle de ces marchandises. La demande de remise a été rejetée et la prise en compte a posteriori des droits antidumping a été maintenue.

- Sur les droits de douane

En application de l’article 220-2b)-4° du Code des douanes communautaire le redevable peut invoquer la bonne foi lorsqu’il peut démontrer que, pendant la période des opérations commerciales concernées, il a fait preuve de diligence pour s’assurer que toutes les conditions pour le traitement préférentiel ont été respectées.

Les opérateurs doivent également, lorsqu’ils éprouvent eux-mêmes des doutes sur la définition de l’origine de la marchandise, s’informer et rechercher tous les éclaircissements possibles pour vérifier si ces doutes sont confirmés.
Le redevable ne peut pas invoquer sa bonne foi lorsque la Commission a publié au Journal Officiel des Communautés Européennes un avis signalant les doutes fondés.

Sans difficultés, le Tribunal considère qu’à compter de sa connaissance, le 10 septembre 2004, de l’existence de l’enquête menée par l’OLAF le 10 septembre 2004, l’importateur ne pouvait se prévaloir de sa bonne foi sur le fondement de l’article 220-2b)-4° du Code des douanes communautaire.

Qu’en est-il pour les importations antérieures à cette date ? Le Tribunal rappelle qu’un redevable ne saurait se prévaloir de l’absence de publication d’un avis aux importateurs pour se soustraire aux conséquences de son propre manque de vigilance et que la Commission n’est tenue d’avertir les importateurs de façon généralisée « que lorsqu’elle a des doutes sérieux quant à la régularité d’un grand nombre d’exportations effectuées dans le cadre d’un régime préférentiel », ce qui n’a pas été le cas dans ce dossier avant qu’elle n’ait pu mettre en lumière les contournements de la législation antidumping seulement en août 2004.

Trib UE 16 déc.2010, aff T-191 / 09 Hit Trading et Berkman Forwarding c/Commission


Droits de la défense et Contributions Indirectes : la plume du législateur vivement inspirée par la jurisprudence !

La loi de finances rectificative pour 2010 a introduit un nouvel article L80 M dans le livre des procédures fiscales dont l’entrée en vigueur est fixée au 1er juillet 2011.

De manière résumée, ce texte applicable aux contributions indirectes dont le contrôle relève du livre des procédures fiscales (alcools, tabacs) permettra au contribuable d’être informé du redressement envisagé par l’Administration des Douanes préalablement à la mise en recouvrement des taxes réclamées et dans un délai suffisant pour faire valoir son point de vue.

En matière de droits de douane, une mesure similaire (appelée « droit d’être entendu », c'est-à-dire la possibilité pour l’opérateur économique de faire valoir son avis avant l’établissement d’un procès-verbal d’infraction) avait été instaurée par la loi de finances rectificative pour 2009 au travers des articles 67 A à D du Code des douanes.

On peut donc se féliciter de cette reconnaissance législative qui a introduit le contradictoire dans les procédures en matière de contributions indirectes même si, en réalité, cette évolution était inéluctable puisque des décisions de justice françaises et européennes avaient déjà reconnu ce droit aux contribuables sur le fondement général du respect des droits de la défense.

Curieusement, on notera que le contrôle de certaines taxes relevant de la compétence des services douaniers (notamment la taxe intérieure de consommation applicable aux produits pétroliers, la taxe générale sur les activités polluantes) ne fait toujours pas l’objet de la même amélioration législative : est-ce vraiment durable ? Faudra-t-il attendre une nouvelle décision de justice ?

La loi de finances rectificative pour 2010




Si l’OEA m’était (dé)compté…

La publication le 4 mars 2011 de Lignes directrices sur les conditions d’éligibilité au statut d’Opérateur Economique agréé (OEA) et sur la procédure à suivre pour les grandes sociétés et les sociétés multinationales, ainsi que la publication le 26 juillet dernier d’un nouveau Questionnaire d’Auto Evaluation (QAE) harmonisé au niveau communautaire témoigne de la détermination de la Commission européenne de placer cette certification au cœur de la réglementation douanière.

En pratique, le statut OEA devient fortement recommandé pour les entreprises qui ont une activité à l’international dans la mesure où :

  • l’établissement des déclarations relatives à la sûreté et la sécurité des flux internationaux de marchandises (déclarations sommaires d’entrée – ICS-EXS) obligatoires depuis le 1er janvier 2011 (avec quelques mesures pratiques de tempérament) est facilité pour les OEA,
  • les différentes modifications du Code des douanes communautaire et de ses dispositions d’application conduisent à aligner les critères et les conditions d’octroi des procédures simplifiées sur ceux du statut d’OEA (règlement n°1192/2008 du 17 novembre 2008),
  • la reconnaissance mutuelle du statut d’OEA par les partenaires commerciaux de l’Union Européenne se développe.

Ces différentes évolutions tant communautaires qu’internationales font que, contraint ou choisi, le statut d’OEA est en passe de devenir inéluctable pour les opérateurs du commerce international.

Lignes directrices sur les conditions d’éligibilité concernant les opérateurs économiques agréés (OEA et AEO) et sur la procédure à suivre dans le cas des grandes sociétés et des sociétés multinationales publiées le 04/03/2011


Equipe Douanes/ Accises

Auteurs

Portrait deNathalie Pétrignet
Nathalie Petrignet
Associée
Paris
Portrait deDenis Redon
Denis Redon
Associé
Paris