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De nouveaux droits en matière de saisie et confiscation de biens dans le cadre des procédures pénales

01/02/2023

Vos biens ont été saisis dans le cadre d’une procédure pénale ? Vous souhaitez obtenir accès au dossier pénal et contester l’ordonnance de saisie rendue par le juge ?

La loi n°1.535 du 9 décembre 2022 relative à la saisie et la confiscation des instruments et des produits du crime a réformé le cadre législatif existant en matière de saisie et confiscation et introduit de nouvelles garanties procédurales et droits de recours pour les personnes concernées dans le cadre de procédures pénales.

Cette nouvelle loi a pour objet de conformer le droit monégasque aux récentes recommandations du Groupe d’Action Financière Internationale (GAFI) fondées notamment sur l’article 8 de la directive 2014/42/UE du Parlement Européen et du Conseil du 3 avril 2014 concernant le gel et la confiscation des instruments et des produits du crime dans l’UE.

Notre équipe a recensé les nouvelles garanties et droits concédés aux personnes concernées par des saisies et confiscations en matière pénale.

De nouveaux droits en cas de saisie conservatoire

Les dispositions de l’article 596-1 du code de procédure pénale autrefois applicables aux seules saisies conservatoires en matière de blanchiment, de corruption, ou de trafic d’influence s’appliquent désormais à l’ensemble des infractions pour lesquelles la peine de confiscation est encourue.

En contrepartie, l’article modifié prévoit de nouveaux droits et obligations pour les personnes concernées par une saisie conservatoire, c’est-à-dire lorsque la saisie de biens a pour objet de geler des biens en vue de l’indemnisation de la victime ou du paiement de l’amende : 

  • Obligation de signification (par voie d’huissier) de la mesure de saisie aux propriétaires ainsi qu’aux tiers ayant ou revendiquant avoir des droits sur le bien s’ils sont connus, avec la mention du droit de toute personne concernée par une saisie à l’assistance d’un avocat-défenseur ou d’un avocat, (NB : la voie de la signification a été privilégiée notamment pour les personnes non-résidentes en Principauté),
  • Obligation de notification de la mesure de saisie aux parties intéressées et au procureur général avec la mention du droit de toute personne concernée par une saisie à l’assistance d’un avocat-défenseur ou d’un avocat,
  • Possibilité pour le tiers concerné de relever appel de la décision de saisie,
  • Droit d’accès aux pièces de la procédure se rapportant à la saisie contestée pour les tiers,
  • Même à défaut d’appel, le propriétaire du bien et les tiers à la procédure peuvent être entendus à la demande des parties par la Chambre du Conseil sans accès au dossier cependant,
  • Allongement du délai d’appel à l’encontre de l’ordonnance de saisie lequel est porté de vingt heures à dix jours,
  • Encadrement de la durée de la mesure de saisie, laquelle ne doit rester en vigueur que le temps nécessaire pour préserver les biens en vue de leur éventuelle confiscation ultérieure,
  • Restitution immédiate des biens saisis qui ne font pas l’objet d’une confiscation ultérieure,
  • Droit à être assisté par un avocat-défenseur ou un avocat pour les personnes concernées par une décision de confiscation lorsqu’elles sont connues et obligation d’informer ces personnes de ce droit d’assistance.  

De nouveaux droits dans le cadre de la gestion des biens saisis par le juge d’instruction et le service de gestion des avoirs saisis ou confisqués

Avant l’entrée en vigueur de la loi n°1.535 du 9 décembre 2022, la gestion des avoirs saisis ou confisqués relevait soit du Procureur Général soit du juge d’instruction en fonction des circonstances et de la matière concernée.

Pour palier aux difficultés de gestion et uniformiser la procédure, la loi a créé une nouvelle entité juridique, le « Service de gestion des avoir saisis ou confisqués » afin de gérer lesdits avoirs.

Ce service qui est dirigé par un magistrat de l’ordre judiciaire sous l’autorité du Directeur des services judiciaires est chargé sur mandat de justice notamment de :

  • la gestion de tous les biens quelle que soit leur nature, saisis, confisqués ou faisant l’objet d’une mesure conservatoire au cours d’une procédure pénale pour leur conservation des actes d’administration (article 95-6 1° du code de procédure pénale),
  • la gestion centralisée de toutes les sommes saisies lors de procédures pénales (article 95-6 2° du code de procédure pénale),
  • l’aliénation ou pour les seuls biens meubles, de la destruction des biens saisis dont il a été chargé d’assurer la gestion (article 95-6 3° du code de procédure pénale).

Les dispositions des articles 268-11 et suivants du code de procédure pénale introduisent un cadre législatif nouveau en matière de gestion des biens saisis par le service de gestion des avoirs saisis ou confisqués.

Parmi les garanties procédurales et droits nouveaux pour les personnes concernées, figurent désormais :

  • la possibilité de remise, seulement sur ordonnance du juge d’instruction et sous réserve des droit des tiers des biens saisis, au service de gestion des avoirs saisis ou confisqués aux fins de gestion, afin que celui-ci réalise tous les actes d’administration nécessaires à la conservation et à la valorisation desdits biens (article 268-11 du code de procédure pénale),
  • La restitution sur demande du propriétaire du produit de l’aliénation des biens saisis par le service de gestion des avoirs « lorsqu’est devenue définitive une décision de non lieu, de relaxe ou d’acquittement, ou une décision de condamnation n’ayant pas prononcé la peine de confiscation » (alinéa 4 de l’article 268-12 du code de procédure pénale),
  •  La consécration du caractère suspensif de l’appel des décisions du juge d’instruction ordonnant l’aliénation ou la destruction avant jugement d’un bien saisi, rendant ainsi le recours pleinement utile puisque le bien est conservé dans l’attente de la décision (article 268-13 du code de procédure pénale),
  • L’information du propriétaire d’un bien saisi de son droit de demander la restitution du bien ou du produit de la vente, en cas de décision définitive de non-lieu, de relaxe, d’acquittement, ou en l’absence de condamnation à une peine de confiscation. A défaut de réclamation du bien à l’issue d’un délai de douze mois, il est également prévu que le bien non restitué devienne propriété de l’Etat sous réserve des droits des tiers (article 268-15 du code de procédure pénale).

Un droit d’action réduit dans le cadre d’une demande d’indemnisation sur les biens confisqués

L’article 621-1 du code de procédure pénale prévoit désormais que toute personne qui, s’étant constituée partie civile, a bénéficié d’une décision définitive lui accordant des dommages et intérêts en réparation du préjudice qu’elle a subi du fait d’une infraction pénale peut obtenir du service de gestion des avoirs saisis ou confisqués que ces sommes lui soient payées par prélèvement sur les fonds ou sur la valeur liquidative des biens de son débiteur dont la confiscation a été décidée par une décision définitive et dont le service est dépositaire en application de l’article 95-6 de la loi n° 1.398 du 24 juin 2013, modifiée.

Cette demande de paiement doit, à peine de forclusion, être adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception audit service dans un délai de six mois à compter du jour où la décision mentionnée supra a acquis un caractère définitif.

En cas de pluralité de créanciers requérants et d’insuffisance d’actif pour les indemniser totalement, le paiement est réalisé au prix de la course et, en cas de demandes parvenues à même date, au marc l’euro.

Les dispositions de la loi n°1.535 sont entrées en vigueur le 17 décembre 2022, de sorte que les droits et garanties développés supra peuvent être opposés aux procédures en cours.

Auteurs

Portrait deGéraldine Gazo
Géraldine Gazo
Partner
Monaco
Sacha NANTAS