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Le projet de loi relatif à la transposition de mesures équivalentes à la 4e directive anti blanchiment est paru

La directive 2015/849 du 20 mai 2015, dite 4e directive anti blanchiment a été intégrée, par ordonnance souveraine n°5.713 du 8 février 2016, à l’annexe B de l’accord monétaire conclu entre Monaco et l’Union Européenne le 29 novembre 2011.

La Principauté de Monaco est désormais tenue d’adopter des mesures équivalentes à celles de la 4e directive. C’est dans cette optique que le projet de loi n°972 du 24 octobre 2017 est paru sur le site du Conseil national.

Ce projet de loi vient renforcer le dispositif monégasque de lutte contre le blanchiment de capitaux en modifiant plusieurs textes à savoir (i) la loi n°1.362 sur la lutte contre le blanchiment, (ii) la loi n° 56 sur les fondations, (iii) la loi n°214 sur les trusts, (iv) la loi n°1.355 sur les associations et les fédérations d’association et enfin (v) le Code pénal.

S’agissant plus spécifiquement de la loi 1.362, les principaux changements opérés sont :

  • L’élargissement de la liste des acteurs soumis au dispositif de lutte contre le blanchiment aux établissements de monnaie électronique, prestataires de services de jeux d’argent et de hasard, marchands d’art et d’objet de grande valeur, conseillers et intermédiaires en crowdfunding et agents sportifs) (Article 2) ;
  • Le remplacement de l’exemption de vigilance par une simplification du devoir de vigilance pour les clients réputés à faible risque (Articles 11 et 12) ;
  • L’interdiction de nouer une relation de correspondant avec un établissement de crédit ou un établissement financier « écran » (Article 16) ;
  • L’unification du régime applicable aux personnes politiquement exposées (plus de distinction entre PPE nationale et étrangère) (Article 17) ;
  • Le renforcement de l’identification des bénéficiaires effectifs par les acteurs soumis au dispositif de lutte contre le blanchiment (Articles 21 et 22) ;
  • La nomination d’un mandataire chargé de la conservation des documents et des informations pouvant faire l’objet d’une demande du SICCFIN pour les professionnels cessant leur activité sur le territoire monégasque (Article 26) ;
  • L’assouplissement et l’élargissement de la communication intragroupe des informations relatives à la lutte contre le blanchiment (Articles 28 et 29) ;
  • La mise en place d’un dispositif d’alerte interne lors d’un manquement aux obligations en matière de lutte contre le blanchiment (Article 30) ;
  • L’interdiction de payer en espèces des biens ou des services d’une valeur supérieure à 10.000 euros (Article 35) ;
  • Le droit d’opposition du SICCFIN à la suite d’une déclaration de soupçon est porté à 5 jours (Article 37) ;
  • La liste des destinataires possibles des informations relatives à l’existence d’une déclaration de soupçon et à son contenu est étendue (Article 45) ;
  • La mise en place d’outils permettant de renforcer la coopération entre le SICCFIN et l’autorité judiciaire (Article 49) ;
  • Le renforcement significatif des pouvoirs du SICCFIN et de la coopération internationale (Article 53 et suivants) ;
  • La création d’une Commission indépendante du SICCFIN et du Ministre d’Etat chargée d’établir une proposition de sanction administrative tout en préservant les droits de la défense (Article 64).

En matière pénale, les principaux apports du projet de loi n°972 sont :

  • La création de cinq nouvelles infractions pour manquement(s) aux dispositions de la loi n° 1.362 (Articles 74 à 78) ;
  • La refonte de l’infraction de corruption prévue à l’article 113-4 du Code pénal et la redéfinition de l’association de malfaiteurs afin d’y inclure certains délits ;
  • La création d’une présomption de blanchiment lorsque les conditions des opérations ne peuvent avoir d’autres justifications que de dissimuler l’origine ou le bénéficiaire effectif de ces biens, capitaux ou revenus (Article 17 - Livre IV).

En plus de ces nombreuses modifications qui auront nécessairement un impact dans la mise en œuvre du dispositif de lutte contre le blanchiment des acteurs de la place monégasque, la mesure phare de ce projet de loi consiste en la création de deux registres tenus par la Direction de l’Expansion Economique : un « Registre des bénéficiaires effectifs » et un « Registre des trusts ».

Les assujettis à la lutte contre le blanchiment monégasque seront tenus de communiquer à la Direction de l’Expansion Economique un certain nombre d’informations (dont le champ doit encore être déterminé par ordonnance souveraine) sur les bénéficiaires effectifs. Ces informations seront répertoriées dans le Registre des bénéficiaires effectifs, accessible par les autorités publiques compétentes, les professionnels assujettis à la lutte contre le blanchiment et toutes personnes justifiant d’un intérêt légitime.

S’agissant du Registre des trusts, ce sont les trustees qui seront tenus de communiquer à la Direction de l’Expansion Economique les informations portant sur l’identité du constituant, du ou des trustees, du protecteur (le cas échéant), des bénéficiaires et de toute personne physique exerçant un contrôle effectif sur le trust. Ces informations seront accessibles par les autorités publiques compétentes dans des conditions à déterminer par ordonnance souveraine.
Il ne fait aucun doute que l’adoption de ce projet de loi va profondément modifier les pratiques de la place monégasque en matière de lutte contre le blanchiment. Pour mémoire, la Principauté de Monaco s’était engagée à « transposer » par des mesures équivalentes la 4e directive anti blanchiment avant le 30 juin 2017.

L’adoption de ce projet de loi (sous réserve des modifications du Conseil national) devrait ainsi être imminente.

Auteurs

Portrait deOlivier Marquet
Olivier Marquet
Managing Partner
Monaco