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Nouvelles réformes du droit monégasque concernant la lutte contre le blanchiment, le financement du terrorisme et la corruption

07/03/2022

Deux nouvelles lois viennent enrichir l’arsenal monégasque de lutte contre le blanchiment, le financement du terrorisme et la corruption. Ces deux lois, datées du 11 février 2022 (n° 1520 et n° 1521) résultent de la volonté de la Principauté de demeurer en conformité avec les standards internationaux les plus élevés de la matière, tout en tenant compte des spécificités monégasques. C’est sous la double influence du droit de l’Union européenne et du droit du Conseil de l’Europe que le législateur a dû procéder à plusieurs adaptations de la législation monégasque, dans ses deux volets administratif et répressif.

En premier lieu, le code pénal et le code de procédure pénale monégasques sont modifiés par la loi du 11 février 2022 portant diverses mesures pénales en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et contre la fraude et la contrefaçon des moyens de paiement autres que les espèces (n° 1521). Dans le Code pénal, les articles 218 et suivants relatifs au blanchiment du produit d’une infraction évoluent. En particulier, l’article 218-1-1 prévoie désormais un cas de responsabilité pénale des personnes morales pour des faits de blanchiment, « lorsque l’absence de surveillance ou de contrôle de la part d’un organe ou d’un représentant, a rendu possible la commission de cette infraction, pour le compte de la personne morale, par un personne physique soumise à leur autorité ». Par ailleurs, la loi sanctionne désormais le comportement d’une personne ayant, par négligence, apporté son concours à une opération de blanchiment (art. 218-2). Pour satisfaire à ses engagements européens, le législateur monégasque a aussi renouvelé la définition des « instruments de paiement autres que les espèces » dans le code pénal, pour y intégrer et préciser les formes modernes de monnaie (monnaie électronique, monnaie virtuelle). Le régime des peines est aussi touché par la réforme avec, de manière notable, sur le modèle du droit français, l’intégration dans le code d’un principe d’individualisation des peines qui n’y figurait pas encore (voy. art. 391-17). Le régime de la « confiscation » évolue pour saisir mieux adéquatement le produit du blanchiment.

La réforme concerne aussi plusieurs dispositions du code de procédure pénale. Doit être noté une modification des règles de compétences des juridictions monégasques en la matière : la restriction de compétence concernant les Monégasques qui se rendraient coupables de faits de corruption ou de trafic d’influence hors du territoire de la Principauté disparaît. La coopération internationale entre la justice monégasque et ses homologues étrangères est renforcée dans la mise en œuvre d’un réseau plus efficace (art. 596-7 CPP). Doit aussi être notée l’adoption d’une nouvelle procédure dite de « suivi bancaire » à la disposition du juge d’instruction qui pourra désormais « prescrire à une banque de suivre, pendant une période déterminée, les opérations bancaires réalisées sur un ou plusieurs comptes identifiés et de l'informer régulièrement des résultats de ce suivi ».

En second lieu, une loi du 11 février 2022 complétant la loi n° 1.503 du 23 décembre 2020 renforçant le dispositif de lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la corruption, retouche à nouveau la loi n° 1.362 du 3 août 2009. La liste des assujettis à la loi est modifiée, en particulier pour ce qui concerne les commerçants dans le secteur du luxe. Compte tenu de l’importance du secteur à Monaco, le législateur a fait de choix de désigner très précisément les commerçants assujettis aux obligations. Autre modification notable, les mesures que les groupes internationaux doivent mettre en œuvre dès lors qu’ils possèdent une filiale ou une succursale à Monaco, sont précisées. Quant au contenu des obligations, les diligences renforcées que doivent mettre en œuvre les assujettis en présence d’ « opérations atypiques » sont précisées. Surtout, le statut et la procédure devant la Commission d’examen des rapports de contrôle, désormais explicités en détail dans la loi 1.362, sont précisées, le caractère contradictoire de la procédure étant renforcé. Mais dans le même temps, l’éventail des sanctions à la disposition des autorités monégasques se diversifie, en particulier avec un nouveau régime du sursis qui vient assortir le cas échéant le prononcé de sanctions. C’est un signe de plus que le maître mot du dispositif monégasque est plus que jamais l’efficacité.

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David Bosco
Consultant
Monaco