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Exemptions et réductions de loyers soumis à TVA en période COVID-19 - Impact FISCAL

30/07/2020

Pendant la crise sanitaire qu’a connu la Principauté de Monaco donnant lieu à des mesures de confinement imposant la fermeture de la majorité des commences - sauf exceptions autorisées - a minima entre les 15 mars et 3 mai 2020, le Gouvernement Princier a pris pour les locaux commerciaux relevant du domaine de l’Etat, des mesures d’exemption de paiement des loyers et des charges locatives. 

Le Gouvernement Princier lançait également un appel aux propriétaires privés en leur demandant de faire preuve de civisme, en adaptant et/ou en étalant les paiements dus par leurs locataires dans le cadre des baux commerciaux. Cette situation non réglementée a engendré des mesures casuistiques et variables prises à l’initiative des bailleurs privés à l’égard de leurs locataires.

Or, les annulations et réductions de loyers soumis TVA portent conséquences fiscales que nous détaillons ci-après.

Bref rappel : quels loyers sont soumis à TVA?

Le régime TVA des locations immobilières repose sur la distinction fondamentale entre:

  • Les locations d'immeubles ou de locaux aménagés (de mobilier et du matériel ou des installations nécessaires à l’exercice de l’activité) qui constituent des opérations de nature commerciale et sont, à ce titre, normalement soumises à la TVA.
  • Les locations de locaux nus qui présentent, sous réserve d'exceptions limitées (locations pour le stationnement des véhicules, locations d'immeubles nus réputées commerciales), un caractère civil et bénéficient d'une exonération de TVA, mais pour lesquelles le bailleur peut opter, sous conditions, pour appliquer de la TVA à la location.
La TVA sur loyer exempté ou réduit doit-elle être collectée par le Bailleur ?

Par principe, la TVA sur les locations est exigible au moment où le loyer est encaissé.

Si le Preneur en a été exempté, il n’y a donc pas lieu de collecter la TVA. Il en va de même si le Bailleur a renoncé partiellement au loyer (réduction) pour une certaine période puisque qu’il ne collectera de la TVA que sur le prix réduit.

La jurisprudence de nos voisins français (dont les raisonnements des tribunaux peuvent se retrouver dans les jurisprudences monégasques puisque la France et Monaco forment un même territoire pour les besoins de la TVA), s’est penchée sur le traitement d’une renonciation volontaire par le Bailleur à la dette de son Preneur (autrement dit un abandon de créance). Il ne s’agit selon la plus haute juridiction française [1], pas d’un acte de disposition entrainant l’exigibilité de la TVA dans la mesure où la remise volontaire par le Bailleur de la dette du Preneur constitue un mode d’extinction de l’obligation de payer le loyer n’entraînant la perception d’aucune somme par le Bailleur, et donc n’équivalant pas pour ce dernier à un encaissement. Par conséquent, il n’y a pas lieu de collecter de la TVA lorsque le loyer n’est pas encaissé. 

Cas particulier du régime des débits

Les Bailleurs peuvent cependant opter – sur autorisation du Directeur des Services fiscaux - pour le régime des débits, auquel cas la TVA sur les locations est exigible au moment où la dette du Preneur est constatée, et donc à la facturation, et non plus à l’encaissement du prix. Dans ce cas, la TVA est exigible au moment où le Bailleur émet la facture de loyer, puisque c’est là qu’il constate sa créance sur le Preneur.

Si le Bailleur décide de renoncer au loyer après émission de la facture, il a déjà enregistré la TVA collectée au moment de sa décision, et il appartiendra donc de solliciter de la Direction des Services Fiscaux des clarifications sur le traitement à donner à la TVA enregistrée.

Si le Bailleur a en revanche purement et simplement renoncé au loyer avant que ne soit constatée la créance sur le Preneur, la TVA pas exigible.

Le Bailleur et le Preneur bénéficient-t-ils chacun pour ce qui les concerne, toujours de leur droit à déduction de la TVA alors que les loyers en sont exemptés ?

Pour le Bailleur

Le Bailleur peut déduire la TVA qu’il a payée sur ses propres achats de biens et les prestations qui lui sont fournies, de la TVA qu’il collecte (et reverse à l’Etat) sur les loyers soumis à TVA.

S’il ne collecte plus de la TVA sur les loyers (du fait de la conjoncture et de manière temporaire), cela ne peut pas être assimilé à une cessation d’affectation de l’immeuble à des opérations soumises à la TVA, de sorte que le Bailleur reste en droit de déduire la TVA payée de celle collectée sur les loyers.

Pour les immeubles comportant des locaux soumis ainsi que des locaux exonérés de TVA, l’exonération ou réduction de loyers aura un impact sur le droit à déduction.

En effet, pour rappel, la TVA déductible est déterminée dans ce cas en fonction d'un coefficient calculé notamment par rapport au chiffre d’affaires soumis à TVA: lorsqu’il est égal à 1 cela permet au Bailleur de déduire 100% de la TVA, lorsqu’il est égal à 0,5 cela ne permet de déduire que 50% de la TVA et enfin lorsqu’il est égal à 0 cela implique qu’il n’y aura pas de déduction de la TVA.

La non-perception de loyers en principe soumis à la TVA, faisant chuter le chiffre d’affaires soumis à TVA, aura donc pour effet de dégrader ce coefficient, et donc sur le droit à déduction de la TVA par le Bailleur).

Pour le Preneur

Le droit à déduction de la TVA payée par le Preneur prend naissance lorsque la TVA déductible devient exigible chez le Bailleur, en d’autres termes, au moment où ce dernier devra reverser la TVA aux Services Fiscaux.

Le Preneur n’aura donc en pratique pas de droit à déduction, puisque la TVA sur loyer exemptés ou réduits (pour la portion non payée) n’est pas due.

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Auteurs

Portrait deSophie Marquet
Sophie Marquet
Partner
Monaco
Audrey Ballester
Charlotte Juge
Sabah Belakbir
Alexia Delaunay
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