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Note d'analyse du décret n°2018-436 du 4 juin 2018 relatif à la simplification de la procédure de maintenance et de contrôle de qualité de certains dispositifs médicaux

(JORF n°0127 du 5 juin 2018, texte n°50)

13/07/2018

Le décret n° 2018-436 du 4 juin 2018 (publié au JORF n° 0127 du 5 juin 2018) a pour objet de fixer la nouvelle procédure de maintenance et de contrôle de qualité de certains dispositifs médicaux.

Pris après avis de la section sociale du Conseil d’Etat, ce décret visant à simplifier la procédure existante a modifié certains articles de la partie règlementaire du code de la santé publique (ci-après CSP), notamment la section IV du chapitre II du titre Ier du livre II de la Partie V dudit code.

Au visa des articles L. 5212-1 et L. 5211-6 du CSP, le décret modifie les articles R. 5211-5, R. 5212-26, R. 5212-29, R . 5212-30, R. 5212-32 du CSP et supprime l’article R. 5212-35 du même code.

Ce nouvel acte est entré en vigueur le lendemain de sa publication au JORF, soit le 6 juin 2018, à l’exception de l’article 2 qui n’est entré en vigueur que le 1er juillet 2018. Il est codifié à l’article R. 5212-29 du CSP.

L’article 4 du présent décret ne prévoit pas une période transitoire mais diffère son application jusqu’à l’entrée en vigueur de l’arrêté ministériel prévoyant les modalités d’accréditation des organismes visés à l’article R. 5212-9 du CSP.

L’exploitant d’un dispositif médical doit mettre en œuvre une politique de maintenance, visant à assurer la sécurité et la qualité des soins dispensés. Les enjeux du contrôle de qualité des dispositifs médicaux sont nombreux : assurer la sécurité du patient, faire de ces contrôles un gage de qualité pour les services de soins et garantir la traçabilité de ces produits.

Le présent décret simplifie et décline cette politique de maintenance et de contrôle de qualité appliquée à certains dispositifs médicaux :

  1. Il modifie la définition d’exploitant d’un dispositif médical en précisant qu’un exploitant est aussi une personne « rendant ce dispositif accessible aux tiers »
  2. Il modifie le mode de désignation des organismes de contrôle de qualité externe
  3. Il supprime enfin l’obligation faite à l’ANSM d’informer le préfet de région et le directeur général de l’ARS en cas de non-conformité identifiée à la suite d’un contrôle de qualité, ce dernier étant déjà informé par ailleurs.

1.Elargissement du champ d'application de la maintenance et du contrôle interne et externe des dispositifs médicaux

    1.1 Extension de la définition d’exploitant d’un dispositif médical

Au sens du décret n° 2004-802 du 29 juillet 2004 codifié à l’article R. 5211-5 du CSP, l’exploitant d’un dispositif médical pouvait se définir comme « toute personne physique ou morale assurant la responsabilité juridique de l'activité requérant l'utilisation de ce dispositif ».

L’apport premier du décret du 4 juin 2018 réside dans l’extension de la définition de l’exploitant, aux fins d’inclure explicitement dans son champ les personnes qui rendent un dispositif médical accessible aux tiers. Ainsi, l’article 1er du présent décret définit l’exploitant comme « toute personne physique ou morale assurant la responsabilité juridique de l'activité requérant l'utilisation de ce dispositif ou rendant ce dispositif accessible aux tiers ».

2. Simplification de l'organisation du contrôle de qualité interne et externe des dispositifs médicaux

On entend par contrôle de qualité d’un dispositif médical l’ensemble des opérations destinées à évaluer le maintien des performances revendiquées par le fabricant ou le cas échéant, fixées par des décisions du directeur général de l’ANSM.

    2.1 Elargissement de la compétence du directeur général de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé

L’article R.5212-26 du CSP dans sa rédaction issue du décret du 27 avril 2012 attribuait au ministre chargé de la santé la compétence pour arrêter, après avis du directeur général de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits (Ansm), la liste des dispositifs médicaux soumis au contrôle de qualité externe et interne des dispositifs médicaux.

Le décret n° 2018-436 du 4 juin 2018 en son article 2 modifie cette disposition. L’objectif affiché par le gouvernement étant la simplification de cette procédure, les listes des dispositifs médicaux soumis à maintenance sont désormais « fixées par décision du directeur général de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, publiée sur le site internet de l’agence ».

    2.2 Contrôle externe des dispositifs médicaux : la substitution d’une procédure d’accréditation à une procédure d’agrément

Les décisions du directeur général de l’Ansm définissent des modalités particulières de contrôle pour chaque type de dispositif médical (article R. 5212-26 du CSP). Depuis la publication du décret n° 2016-183 du 23 février 2016 (JORF du 25 février 2016), la publication des décisions sur le site remplace la publication au JORF.

L’article R. 5212-25 du CSP issu du décret n° 2004-802 du 29 juillet 2004 met à la charge de l’exploitant la mise en œuvre de la maintenance et des contrôles de qualité au regard des modalités et de la périodicité prévues par les décisions de l’ANSM relatives à chaque type de dispositifs.

Le décret n° 2001-1154 du 5 novembre 2001 a prévu, à l’article R. 5211-5 du CSP, deux types de contrôles : les contrôles internes (CQI), réalisés par l’exploitant ou sous sa responsabilité par un prestataire, et les contrôles externes (CQE), réalisés par un organisme indépendant de l’exploitant, du fabricant et de celui qui assure la maintenance du dispositif.

L’exploitant peut réaliser lui-même le contrôle interne de ses produits ou à défaut et sous sa responsabilité, le faire réaliser par un prestataire.

Le décret du 4 juin 2018 simplifie la procédure de contrôle externe des dispositifs médicaux.

En effet, le décret du 27 avril 2012 avait instauré à l’article R. 5212-29 du CSP une procédure de contrôle de qualité externe des dispositifs médicaux confiée à des organismes agréés par décision du directeur général de l’Ansm publiée au JORF.

Cet agrément était réalisé en fonction des garanties d’indépendance et de compétence présentées, de l’expérience acquise dans le domaine considéré et des moyens dont l’organisme disposait pour exécuter les tâches pour lesquelles il était agréé.

Désormais, le décret du 4 juin 2018 simplifie cette procédure : ce contrôle spécifique doit à présent être réalisé par un organisme de contrôle de qualité accrédité à cet effet par le Comité français d’accréditation (Cofrac) ou tout autre organisme d’accréditation signataire d’un accord européen.

Enfin, la constatation de la non-conformité d’un dispositif médical par le directeur général de l’ANSM l’obligeait à informer le préfet de région et, le cas échéant, le directeur général de l’ARS.

Ce mécanisme de communication à la suite d’un contrôle de qualité s’est vu simplifié par la publication du décret du 4 juin 2018 (Article 2).

A compter du 1er Juillet 2018, date d’entrée en vigueur des dispositions de l’article 2, l’obligation posée à l’article R. 5212-35 du CSP faite à l’ANSM d’informer le préfet de région et le directeur général de l’ARS en cas de non-conformité identifiée à la suite d’un contrôle de qualité est supprimée.

    2.3 Les nouvelles garanties apportées par les organismes d’accréditation

Un arrêté du ministre chargé de la santé déclinera prochainement les modalités d’accréditation de ces organismes.

Le décret du 4 juin 2018 (Article 2) modifie l’article R. 5212-29 du CSP et impose aux organismes accrédités des exigences de garanties de confidentialité, d’impartialité et d’indépendance dans l’activité de contrôle de qualité. Ces garanties conditionneront l’obtention de l’accréditation.

Egalement, l’article R. 5212-30 du CSP dispose que les organismes accrédités mettent en œuvre, à la demande de l’exploitant, les contrôles conformément aux dispositions particulières prévues à l’article R. 5212-27 du même code.

Ainsi, l’organisme de qualité externe reçoit uniquement la commande d’un exploitant. Il ne saurait agir à la demande d’un intermédiaire, ou être rémunéré par ce dernier, ce qui contreviendrait à la garantie d’indépendance attendue.

A titre d’exemple, l’organisme de qualité externe ne saurait recevoir les commandes ou la rémunération du fabricant ou du fournisseur du dispositif médical à contrôler.

Enfin, les contrôles de qualité externe et interne entrant dans le champ d’une même décision du directeur général de l’ANSM ne peuvent être réalisés par un même organisme.

3. Modification du suivi des contrôles de qualité

    3.1 Renforcement des prérogatives du directeur général de l’ANSM

L’ancienne disposition prévue à l’article R. 5212-29 du CSP organisant les modalités du retrait de l’agrément par décision du directeur général de l’Ansm est supprimée par le décret du 4 juin 2018.

Dès lors que l’accréditation est confiée au Comité français d’accréditation (Cofrac) ou à tout autre organisme d’accréditation signataire d’un accord européen, la suppression de cette disposition semblait inévitable.

Cependant, un nouveau champ de contrôle du directeur général de l’agence sur ces organismes est instauré.

A cet effet, l’article 2 du décret du 4 juin 2018 codifié à l’article R. 5212-26 du CSP fait peser sur les organismes de contrôle une obligation d’information sur l’exercice du contrôle de qualité externe des dispositifs médicaux couverts par l’accréditation, relatifs à « l’obtention, de la modification ou du retrait de leur accréditation pour l’exercice du contrôle de qualité des dispositifs médicaux » sur demande du directeur général de l’Ansm.

Cette disposition précise et renforce l’obligation d’information des organismes envers le directeur de l’agence, l’ancienne procédure prévoyant seulement une information relative à « des conditions d'exercice de leurs activités, telles qu'elles sont énoncées dans leur demande d'agrément. ».

Selon ce même article, ces organismes « s’engagent à permettre aux personnes désignées par ce directeur général d’accéder à leurs locaux et de procéder à toute investigation en relation avec leurs activités de contrôle de qualité externe couvertes par l’accréditation ».

Enfin, la procédure d’agrément ayant été abandonnée, relevons que l’article 2 du décret du 4 juin 2018 supprime l’obligation de mention de la part du chiffre d’affaires effectué dans le cadre de l’agrément et ne fait subsister que les mentions obligatoires suivantes au sein du rapport de contrôle : nom de l’exploitant, dispositif contrôlé, nature des contrôles réalisés et non-conformités observées.

En définitive, la nouvelle procédure instaurée par le décret du 4 juin 2018 a substantiellement déplacé le périmètre de contrôle du directeur général de l’Ansm.

Si dans l’ancienne procédure, le directeur général de l’Ansm prenait une décision d’agrément pour un organisme de contrôle, il n’en demeure pas moins qu’au sein de nouvelle procédure d’accréditation, ses prérogatives interviennent désormais tout au long du contrôle de qualité externe des dispositifs médicaux couverts par l’accréditation -et même a posteriori-.

Conclusion :

Ce dispositif pose au moins deux types de questions :

  • Celle d’abord de sa conformité au nouveau règlement européen qui, pour la surveillance après commercialisation, n’envisage que les contrôles à l’initiative du fabricant, ce qui devrait logiquement s’interpréter comme n’autorisant pas les Etats membres à mettre en place des contrôles dits externes ;
  • Celle ensuite des conséquences de l’absence de période transitoire. Comment passe-t-on d’un régime d’agrément au 30 juin 2018 à un régime d’accréditation au 1er juillet 2018 ? Que deviennent les agréments en vigueur au 30 juin ?

Auteurs

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