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Consultation du comité social et économique (CSE)

Pas de vice de procédure en cas de prolongation du délai par l'employeur

07/06/2019

Quelles sont les conséquences de la poursuite de la consultation du comité social et économique (CSE) au-delà des délais préfix fixés par le Code du travail ? Le Conseil d'État, dans une affaire suivie par notre cabinet d'avocats, se prononce pour la première fois sur cette question, à l'occasion d'un contentieux relatif à une décision d'homologation d'un plan de sauvegarde de l’emploi - PSE - (CE, 22 mai 2019, n° 420.780). Analyse.
NB : Les solutions dégagées par le Conseil d'État à propos du comité d'entreprise sont parfaitement transposables au comité social et économique, comme l'indique l'arrêt lui-même.

PSE : l'avis du CSE rendu en cas de poursuite de la consultation au-delà du délai est valable

Depuis les lois du 14 juin 2013 (n° 2013-504) et du 17 août 2015 (n° 2015-994), la plupart des consultations du comité d'entreprise et, depuis l’ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017, du CSE sont encadrées par des délais préfix. Lorsqu'il est consulté dans le cadre de ses attributions économiques, le Code du travail prévoit que le CSE émet son avis dans un délai préfix, à l'expiration duquel il est réputé, s'il n'a pas rendu d’avis, avoir été consulté et avoir rendu un avis négatif (C. trav, art. L.2312-16).

Sauf accord en disposant autrement ou dispositions légales spécifiques, ce délai est fixé à un mois. En cas d'intervention d'un ou plusieurs experts, il peut être porté respectivement à deux mois ou trois mois, lorsque la consultation se déroule à la fois au niveau central et au niveau des établissements de l’entreprise (C. trav., art. R.2312-16).

S’agissant de la consultation du CSE en cas de projet de licenciement économique collectif d'au moins dix salariés sur une période de 30 jours, le Code du travail prévoit des dispositions spécifiques. Dans ce cadre, le comité doit tenir au moins deux réunions, espacées d'au moins 15 jours, et rendre son avis dans un délai qui ne peut être supérieur, à compter de la première réunion, à :

  • deux mois lorsque le nombre des licenciements est inférieur à 100 ;
  • trois mois lorsque le nombre des licenciements est au moins égal à 100 et inférieur à 250 ;
  • quatre mois lorsque le nombre des licenciements est au moins égal à 250.

Poursuite de la consultation : validité de la procédure en présence d'un avis rendu après l'expiration du délai initial
C'est dans ce contexte que le comité d’entreprise de la société British Airways France, après avoir rendu un avis explicite au cours d'une réunion tenue plus de deux mois après la première, a saisi le tribunal administratif de Melun d'une demande d'annulation pour excès de pouvoir de la décision d’homologation du PSE prise par l'Administration. Par un jugement du 24 novembre 2017 (n° 1707064), le tribunal administratif de Melun a fait droit à cette demande.

La société British Airways France a relevé appel de ce jugement au motif que le tribunal avait commis une erreur de droit en estimant notamment que le délai prévu par l'article L.1233-30 du Code du travail était un délai impératif qui ne pouvait être prorogé que par un accord. Pour la société, le dépassement du délai n’avait, en tout état de cause, ni pour objet ni pour effet d'entacher la régularité de la procédure de consultation. La cour administrative d’appel de Paris a validé ce raisonnement et annulé le jugement du 24 novembre 2017 (n° 17PA03921).

Saisi par le comité d'entreprise, le Conseil d'État s'est ainsi prononcé sur la question de savoir si la circonstance que l'avis du comité ait été rendu au cours d'une réunion tenue plus de deux mois après la date de la première réunion du comité était de nature à vicier la procédure et à entraîner l'annulation de la décision d'homologation du PSE.

Par un arrêt du 22 mai 2019, le Conseil d'État a répondu par la négative. Il a jugé que "lorsque la demande est accompagnée des avis rendus par le comité d'entreprise, il résulte des dispositions citées ci-dessus, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 14 juin 2013 de sécurisation de l'emploi de laquelle elles sont issues, que la circonstance que le comité d'entreprise ou, désormais, le comité social et économique ait rendu ses avis au-delà des délais qu'elles prévoient est par elle-même sans incidence sur la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité".

La procédure de consultation est donc valable et la décision d'homologation est confirmée par le Conseil d'État.

Cette solution, pragmatique, s'inscrit parfaitement dans la jurisprudence du Conseil d'État s'agissant du contrôle concret et global de la régularité de la consultation du CSE en cas de PSE (cf. CE, 22 juill. 2015, n° 385.816 ; CE, 7 déc. 2015, n° 381.703 ; CE, 23 mars 2016, n° 389.158). Elle permet d'éviter des annulations fondées sur un argument de pure procédure et se trouve d'autant plus justifiée qu'au cas particulier, la tenue de la réunion du comité avait été repoussée afin de permettre à l'employeur de répondre aux injonctions formulées par l'Administration et au comité de disposer du rapport établi par l'expert-comptable qu'il avait désigné.

Poursuite de la consultation : conditions de la validité de la procédure en cas d'absence d'avis explicite

Il a ainsi décidé que l'Administration ne peut légalement homologuer ou valider un PSE en l'absence d'avis explicite du comité d'entreprise que si :

  • d'une part, le comité a été mis à même, avant la demande d'homologation ou de validation, de rendre ses deux avis en toute connaissance, dans des conditions qui ne sont pas susceptibles d'avoir faussé sa consultation ;
  • d'autre part, le délai légal ou conventionnel dans lequel le comité doit, en principe, rendre son avis est échu à la date de transmission de la demande d'homologation ou de validation du PSE.

À notre sens, il en résulte que l'employeur peut légalement se prévaloir de l'avis implicite du CSE, après expiration du délai de consultation, à la condition qu'il l'ait régulièrement convoqué à au moins deux réunions avant cette échéance.

Consultation de droit commun et poursuite de la consultation au-delà du délai

Les solutions retenues par le Conseil d'État sont-elles transposables aux consultations de droit commun ? 
S'agissant de la tenue d'une réunion supplémentaire après l'expiration du délai légal et au cours de laquelle le comité a refusé de rendre un avis, la Cour de cassation a affirmé que seul un accord pouvait prolonger le délai de consultation. Il en résulte que le comité ne pouvait se prévaloir de la tenue d'une réunion supplémentaire pour établir que le délai aurait été prolongé (Cass. soc., 21 sept. 2016, n° 15-19.003).

Dans ces circonstances, l'employeur pouvait se prévaloir d’un avis négatif implicite, né dès l'expiration du délai de consultation.

En revanche, la Cour de cassation ne s'est, à notre connaissance, pas encore prononcée sur l'hypothèse où un comité rendrait un avis explicite au cours d'une réunion tenue après l'expiration du délai légal.

Compte tenu de sa conception particulièrement stricte des délais de consultation du CSE, il n'est pas évident que la Cour de cassation retienne une position similaire et fasse prévaloir l'avis explicite sur l'avis implicite.

Peu importe la solution retenue, il n'en reste pas moins que l'employeur pourrait se prévaloir d'un avis, qu'il soit implicite ou explicite, pour mettre en œuvre le projet sur lequel a porté la consultation.


A propos du Comité Social et Economique (CSE)

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