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Interdiction de consommation d'alcool dans le règlement intérieur d'une entreprise

Nouvelles précisions du Conseil d'Etat sur la consommation d'alcool en entreprise

24/07/2019

L'interdiction de toute consommation d'alcool dans le règlement intérieur fait l'objet de nouvelles précisions par le Conseil d'Etat. Celles-ci concernent non seulement les conditions de l'interdiction, mais aussi les modalités de rédaction du règlement intérieur et enfin la preuve du bien-fondé de cette interdiction. Le Conseil d'Etat apporte ainsi des clarifications bienvenues s'agissant du régime juridique de l'interdiction de consommation d'alcool prévue dans le règlement intérieur à la suite du décret n° 2014-754 du 1er juillet 2014 qui l'autorise expressément.

Conditions de l'interdiction de consommation d'alcool prévue dans le règlement intérieur

Le règlement intérieur est obligatoire dans les entreprises ou établissements employant habituellement au moins 20 salariés, conformément à l'article L.1311-2 du Code du travail. Rappelons qu'à compter du 1er janvier 2020, la loi PACTE (loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises) porte à 50 salariés le seuil imposant la mise en place d'un règlement intérieur.

Quant à son contenu, le règlement intérieur comporte notamment, parmi ses clauses obligatoires, des dispositions en matière de santé et de sécurité dans l'entreprise ou l'établissement (C. trav., art. L.1321-1).

A ce titre, peuvent être prévues des dispositions restreignant la consommation des boissons alcoolisées légalement autorisées sur le lieu de travail, à savoir le vin, la bière, le cidre et le poiré (C. trav., art. R.4228-20).

Selon le décret n° 2014-754 du 1er juillet 2014, ces mesures restrictives doivent être d'une part, justifiées par l'impératif de protection de la santé et de la sécurité des salariés et, d'autre part, proportionnées au but recherché.

La première de ces conditions se justifie par l'obligation légale de sécurité pesant sur l'employeur (C. trav., art. L.4121-1) tandis que la seconde résulte de l'interdiction légale de porter une atteinte disproportionnée aux droits de la personne ainsi qu'aux libertés individuelles et collectives (C. trav., art. L.1121-1 et L.1321-3).

Dans sa décision du 8 juillet 2019, le Conseil d'Etat rappelle l'existence d'une condition supplémentaire de validité du règlement intérieur lorsque ce dernier prévoit une interdiction de consommation d'alcool sur le lieu de travail.

En l'espèce, l'inspection du travail avait exigé le retrait de la disposition relative à la "tolérance zéro alcool" visant les postes "de sûreté et de sécurité ou à risque" inscrite dans une annexe au règlement intérieur relative aux contrôles de l'état d'ébriété, faute pour cette mesure d'être suffisamment circonscrite et précise s'agissant des salariés concernés. L'entreprise, spécialisée dans la fabrication d'équipements pour automobile, avait alors demandé l'annulation de cette décision.

Le tribunal administratif puis la cour administrative d’appel ont confirmé cette décision.

Le Conseil d'Etat rappelle tout d'abord que les mesures limitant ou interdisant la consommation d'alcool sur le lieu de travail doivent respecter les deux conditions prévues par le Code du travail :

  • être justifiées par un impératif de sécurité et de protection de la santé physique et mentale du salarié ;
  • être justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché.

Lorsque ces conditions sont réunies, l'employeur peut limiter voire interdire la consommation d'alcool sur le lieu de travail.

La Haute Juridiction ajoute que l'interdiction de toute imprégnation alcoolique de salariés déterminés requiert l'existence d'un danger particulièrement élevé pour ces derniers ou pour les tiers. Il s'agit d'une condition jurisprudentielle propre à cette hypothèse s'ajoutant aux deux autres conditions réglementaires.

Modalités de rédaction de l'interdiction de consommation d'alcool dans le règlement intérieur

Si les conditions de l'interdiction de consommation d'alcool sur le lieu de travail sont claires, reste à envisager les modalités de sa rédaction dans le règlement intérieur.

Le Conseil d’Etat y répond par une précision inédite :

  • l'employeur n'est pas tenu de faire figurer dans le règlement intérieur des éléments se rapportant au caractère justifié et proportionné de cette interdiction ;
  • le règlement intérieur peut se limiter à la fixation de "la liste des salariés concernés par référence au type de poste qu'ils occupent".

Par conséquent, au cas d'espèce, la cour administrative d'appel avait commis une erreur de droit en reprochant à l'entreprise de ne pas avoir précisé en quoi l'interdiction de consommation d'alcool dans son règlement intérieur est justifiée et proportionnée. Ce dernier peut se borner à indiquer la liste des postes des salariés concernés par l'interdiction de toute imprégnation alcoolique tels que les conducteurs d’engins de certains types, les utilisateurs de plates-formes élévatrices, les électriciens ou mécaniciens.

Ainsi, le Conseil d'Etat n'impose pas à l'employeur un formalisme rigoureux dans la rédaction des clauses du règlement intérieur interdisant toute imprégnation alcoolique à certains salariés.

L'employeur doit toutefois se ménager des éléments de preuve susceptibles de justifier du respect des conditions réglementaires et jurisprudentielles auxquelles cette interdiction est subordonnée.

Preuve du bien-fondé de l'interdiction de toute consommation d'alcool prévue dans le règlement intérieur

Le Conseil d'Etat décide que l'employeur peut se prévaloir du document unique d'évaluation des risques professionnels (DUER) pour établir le caractère proportionné de l'interdiction de consommation d'alcool aux salariés concernés, en dépit de l'absence de référence à ce dernier dans le règlement intérieur.

Ce moyen de preuve est particulièrement approprié pour justifier du choix des postes concernés par l'interdiction puisque le DUER contient des données relatives à l'évaluation des expositions individuelles aux facteurs de risques professionnels.

Dans ce domaine encore, le Conseil d'Etat fait œuvre de pragmatisme en facilitant la preuve par l'employeur du bien-fondé de l'interdiction de consommation d'alcool prévue dans le règlement intérieur concernant certaines catégories de salariés.


Alcool en entreprise 

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