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Révision triennale du loyer

Incidence de la révision judiciaire du loyer sur la fixation du loyer du bail de renouvellement

12/07/2019

La révision judiciaire du loyer en cours de bail a-t-elle un effet sur le loyer de renouvellement ? Sur le fondement de quel loyer les règles du plafonnement s’appliquent-elles ? La Cour de cassation a eu à trancher pour la première fois cette question.

Les règles de la révision triennale du loyer

L’article L.145-34 du Code de commerce pose le principe selon lequel, à moins d’une modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l’article L.145-33, le taux de variation du loyer applicable lors de la prise d’effet du bail à renouveler, si sa durée n’est pas supérieure à neuf ans, ne peut excéder la variation, intervenue depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré, de l’indice trimestriel des loyers commerciaux ou de l’indice trimestriel des loyers des activités tertiaires.

Que le bail renouvelé ait pris fin à la date contractuellement prévue ou ultérieurement par l’effet de la tacite prolongation ne change rien : pour déterminer le montant du loyer plafonné, le loyer à prendre en considération pour l’application de la variation indiciaire est celui fixé par les parties lors de la prise d’effet du bail à renouveler (Cass. 3e civ. 17 mai 2006 n° 05-11.685 : pour un loyer à paliers).

Le loyer de référence pour la révision triennale : la pomme de la discorde

En l’espèce, l’application des règles de plafonnement du loyer définies par l’article L.145-34 du Code de commerce aboutissait à la fixation d’un loyer de renouvellement inférieur au loyer révisé fixé par le juge, en cours de bail, à la valeur locative. Le bailleur entendait donc faire juger que le loyer de référence devait être le loyer révisé judiciairement, sollicitant ainsi, à titre reconventionnel, le déplafonnement du loyer du bail renouvelé.

Pour le bailleur, en retenant que l’article L.145-34 du Code de commerce faisait référence à la variation, intervenue depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré sans que puisse être prise en compte une révision légale du loyer au cours du bail à renouveler, la Cour d’appel avait pris en compte un loyer qui n’était plus appliqué et avait fait ainsi échec à la règle d’ordre public de la révision triennale du loyer. Il soutenait aussi qu’une telle décision portait atteinte à son droit de propriété protégé par l’article 1er du premier protocole additionnel de la Convention européenne des droits de l’Homme en l’empêchant de louer son bien au tarif souhaité. Enfin, il estimait que la révision judiciaire du loyer, ainsi intervenue, se traduisait par une modification notable des obligations respectives des parties justifiant le déplafonnement du loyer.

La réaffirmation des principes classiques de la révision triennale par la Cour de Cassation 

La Haute juridiction répond à ces arguments (Cass. 3e civ., 11 avril 2019, n° 18-14.252) et énonce que :

 « - le loyer à prendre en considération pour l’application de la variation indiciaire était celui fixé par les parties lors de la prise d’effet du bail à renouveler, nonobstant la fixation judiciaire du loyer révisé au cours du bail expiré ;
le bailleur n’était pas fondé à invoquer les dispositions de l’article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, alors qu’il ne prétendait pas être privé de tout bénéfice financier ;
la fixation judiciaire intervenue en application des dispositions légales, dans des conditions étrangères au bail, ne constituait pas une modification notable des obligations respectives des parties justifiant le déplafonnement du loyer. »

Cette décision fait une application stricte de l’article L.145-34 du Code de commerce qui renvoie, pour la fixation du loyer du bail renouvelé, au « taux de variation du loyer applicable lors de la prise d’effet du bail à renouveler », ou encore à « la fixation initiale du loyer du bail expiré ». Ce principe est tout aussi clair en cas de prolongation du bail puisque l’article L.145-34 du Code de commerce précise : « En cas de renouvellement postérieur à la date initialement prévue d’expiration du bail, cette variation est calculée à partir du dernier indice publié, pour une période d’une durée égale à celle qui s’est écoulée entre la date initiale du bail et la date de son renouvellement effectif. »

Tout aussi intéressante est la précision apportée par la Cour de cassation en réponse au troisième argument soulevé par le bailleur.

La révision judiciaire du loyer en cours de bail n’est pas un motif de déplafonnement du loyer

Le bailleur arguait de la modification des obligations respectives des parties résultant de la révision judiciaire du loyer pour obtenir le déplafonnement dudit loyer.

La Cour de cassation suit la Cour d’appel : cette fixation judiciaire intervenue en application des dispositions légales, dans des conditions étrangères au bail, ne constituait pas une modification notable des obligations respectives des parties justifiant le déplafonnement du loyer.

On peut s’interroger sur la portée de cette précision sur les contentieux relatifs à certaines demandes de déplafonnement de loyer. Celles-ci peuvent en effet être fondées sur l’impossibilité, désormais, de répercuter sur les locataires la charge des grosses réparations visées à l’article 606 du Code civil lorsque le bail à renouveler reportait cette charge sur eux.


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Cet article a été publié dans notre Lettre des baux commerciaux de juillet 2019. Cliquez ci-dessous pour découvrir les autres articles de cette lettre.

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Auteurs

Brigitte Gauclere