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Plus-value des particuliers

le nouveau régime applicable aux cessions d’actifs numériques est commenté par l’administration

07/10/2019

Le 2 septembre dernier, l’administration a publié ses commentaires sur le nouveau régime fiscal applicable, à compter du 1er janvier 2019, aux cessions d’actifs numériques réalisées à titre occasionnel par les particuliers (CGI, art. 150 VH bis). Notre analyse.

La définition de l’actif numérique englobe, en les distinguant, les jetons et ce que l’on appelle communément les « cryptomonnaies ». Ainsi, un actif numérique désigne à la fois :

  • un jeton : tout bien incorporel, représentant sous forme numérique, un ou plusieurs droits, qui s’échange au moyen d’une blockchain ; en pratique, il s’agit notamment des tokens issus d’opérations de levées de fonds (ICO : Initial Coin Offering) ; sachant que les jetons répondant aux caractéristiques des bons de caisse ou des instruments financiers sont exclus de cette définition ;
  • une « cryptomonnaie » : toute représentation numérique d’une valeur non-étatique n’ayant pas le statut juridique d’une monnaie mais étant acceptée comme moyen d’échange et utilisée comme tel, comme le bitcoin.

On se souvient que la position historique de l’administration consistait à imposer ces gains dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, position censurée par le Conseil d’Etat (arrêts du 28 avril 2018) qui a jugé qu’était applicable le régime des plus-values de cession de bien meubles. Compte tenu des inadaptations de ce régime pour les cessions d’actifs numériques (impossibilité de compenser les pertes et les gains, obligation de déclaration et de paiement de l’impôt dans le mois de la cession), la loi de finances pour 2019 a introduit un nouveau régime consistant à soumettre les gains occasionnels de cession d’actifs numériques à une imposition forfaitaire au taux global de 30 %[1] (sans possibilité d’option pour le barème progressif)[2].

Dans ses commentaires, l’administration apporte les précisions suivantes.

Champ d’application

Personnes imposables – Selon l’article 150 VH bis du CGI, entrent dans le champ de l’imposition les cessions d’actifs numériques réalisées par les membres du foyer fiscal, directement ou au travers d’une personne interposée.

L’administration définit la personne interposée comme une société ou un groupement non soumis à l’impôt sur les sociétés dont le siège social se situe en France et qui exerce une activité non professionnelle (notamment l’acquisition et la gestion d’un portefeuille d’actifs numériques). Cette définition s’inspire de celle de la société interposée prévue en matière de plus-values de cession de droits sociaux.

Le régime ne vise que les cessions occasionnelles. Sur ce point, l’administration n’apporte pas de précisions déterminantes quant aux modalités d’appréciation du caractère habituel ou occasionnel de l’activité autres que la prise en considération du délai séparant les dates d’achat et de revente, le nombre d’actifs numériques vendus, les conditions de leur acquisition, etc.

Opérations imposables – Pour être imposable, la cession d’actifs numériques doit avoir pour contrepartie un prix exprimé en monnaie ayant cours légal, un service ou un bien autre qu’un actif numérique. En cas d’échange d’actifs numériques, l’opération bénéficie d’un sursis d’imposition sous réserve que l’échange ne comporte pas de soulte.

La réalisation de ces transactions fait appel à divers opérateurs (plateformes d’échanges ou membres de réseaux appelés « mineurs ») souvent rémunérés au moyen d’actifs numériques, conduisant à caractériser une opération imposable à raison du transfert des actifs rémunérant ces prestataires. Par mesure de simplification, l’administration admet – de manière bienvenue – que la cession en tant que telle ainsi que les différentes prestations de services liées à ces frais soient assimilées globalement à une seule et même opération imposable, pour laquelle le contribuable détermine une seule plus ou moins-value. La même mesure s’étend aux opérations d’échanges sans soulte pour lesquels l’ensemble des frais liés à la transaction principale bénéficie du sursis d’imposition.

Opérations exonérées – La loi exonère les cessions d’actifs numériques dont la somme des prix n’excède pas 305 € au cours d’une année d’imposition. L’administration précise que pour apprécier ce seuil, sont prises en compte les cessions imposables réalisées par le foyer fiscal au titre de l’année. Lorsque le seuil est dépassé, le foyer fiscal est imposable sur l’ensemble des cessions, y compris celles dont le prix individuel n’excède pas le seuil. Pour les cessions réalisées par l’intermédiaire de personnes interposées, il faut retenir comme prix de cession la quote-part du prix correspondant au droit de l’associé dans la société.

Base d’imposition

La plus ou moins-value est égale à la différence entre, d’une part, le prix de cession et, d’autre part, le produit du prix total d’acquisition de l’ensemble du portefeuille d’actifs numériques par le quotient du prix de cession sur la valeur globale du portefeuille à la date de la cession.

Compte tenu de ce mode de calcul, alors même que l’opération de cession dégagerait une moins-value, la cession fera apparaître une plus-value taxable lorsque la valeur globale du portefeuille d’actifs numériques s’est appréciée.

L’administration précise que les éléments nécessaires au calcul de la plus-value doivent être, le cas échéant, convertis en euros par application du taux de change à la date de chaque opération. En cas de cession d’actifs numériques en contrepartie de biens ou services, on retient la valeur vénale, en euros, des biens ou services à la date de la cession.

Prix de cession - Le prix de cession peut, sur justificatifs, être réduit des frais de transaction supportés par le vendeur et qui couvrent notamment la rémunération des plateformes où s’effectuent les cessions ainsi que celle des « mineurs »[3].

Prix d’acquisition – Le prix d’acquisition est déterminé sous la forme d’une fraction du prix global d’acquisition du portefeuille correspondant aux seuls actifs cédés. Ce prix global d’acquisition est réduit des fractions de capital initial retenues lors de la détermination des plus ou moins-values de cessions antérieures. L’administration précise que le prix total d’acquisition du portefeuille ne doit pas inclure les prix d’acquisition des actifs cédés avant le 1er janvier 2019. En outre, elle indique qu’en cas d’échange entre actifs numériques réalisés, même sans soulte, antérieurement au 1er janvier 2019, le prix total d’acquisition à retenir à compter de cette date est constitué de la valeur de l’actif numérique remis lors de cet échange (valorisé à la date de l’échange).

Les commentaires mentionnent enfin la nécessité de conserver les justificatifs permettant de déterminer le prix ou la valeur d’acquisition des actifs numériques sous peine de la prise en compte de l’acquisition pour une valeur nulle.

La valeur globale du portefeuille couvre l’ensemble des actifs numériques détenus par le foyer fiscal. L’administration admet, pour la détermination de cette valeur globale au moment de la cession, que le contribuable utilise des dispositifs de valorisation tels que des sites internet proposant des historiques de cotation moyenne journalière sur les principales plateformes d’échange.

En cas de moins-value nette au titre d’une année, les commentaires administratifs rappellent que cette dernière ne peut être ni imputée sur une plus-value de cession d’un bien autre qu’un actif numérique ni reportée sur les années suivantes.

Obligations déclaratives

Sur ce point, les commentaires administratifs reprennent, sans apport significatif, les modalités contenues dans le décret 2019-656 du 27 juin 2019 qui seront applicables en 2020 au titre des gains réalisés en 2019. Il est toutefois précisé que les contribuables ayant réalisé des opérations d’échange sans soulte éligibles au sursis d’imposition seront dispensés d’obligation déclarative.

Rappelons qu’en revanche, les cessions exonérées doivent être déclarées (indication sur l’annexe du prix de chacune des cessions).

On retiendra que le nouveau régime de taxation, bien que non exempt de potentielles améliorations (notamment sur la définition du caractère occasionnel ou habituel des cessions) procure un cadre fiscal propice au développement des opérations sur actifs numériques et notamment des ICO (Initial Coin Offering) dont le régime juridique a été précisé de manière concomitante suite à l’adoption de la loi Pacte.

[1] 12,8 % au titre de l’impôt sur le revenu et 17,2 % au titre des prélèvements sociaux.

[2] Les activités de minage et d’achat-revente continuent d’être imposées, respectivement, selon les règles des bénéfices non commerciaux et des bénéfices industriels et commerciaux.

[3] L’administration précise que ces frais sont déductibles du prix de cession utilisé comme premier terme du calcul de la plus ou moins-value mais ne le sont pas lors de l’utilisation du prix de cession comme numérateur du quotient servant à déterminer le second terme.

Article paru dans le magazine Option Finance le 30 septembre 2019


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