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Le juge des référés n’a pas le pouvoir de prononcer la résiliation d’un bail

Lettre des baux commerciaux | Avril 2019

19/04/2019

S'il peut constater l'acquisition de la clause résolutoire d'un bail, le juge des référés ne peut pas prononcer la résiliation du bail.

Comme toute contestation dans le cadre d’un bail commercial statutaire (autre que celle relative à la fixation du prix du bail révisé ou renouvelé), la mise en œuvre d'une clause résolutoire relève, dans tous les cas et quel que soit le manquement invoqué, de la compétence du tribunal de grande instance du lieu de situation de l'immeuble (article R.145-23 du Code de commerce).

Un pouvoir d’appréciation limité au constat de l’acquisition de la clause résolutoire - Dès lors que ses conditions d'application sont remplies, et qu'aucune demande de suspension de ses effets n'a été formulée par le locataire (comme l’article L.145-4 du Code de commerce le permet), la clause résolutoire s'impose au juge qui n’a alors aucun pouvoir d’appréciation de la gravité de l’infraction commise (Cass. 3e civ., 16 juillet 1975, n° 74-13.221).

Le rôle du juge se limite à constater l'acquisition de la clause résolutoire, et non à prononcer la résiliation du bail, laquelle intervient automatiquement à la date d'expiration du délai d’un mois, fixé par l’article L.145-41 du Code de commerce, imparti par le commandement, et à ordonner l'expulsion du locataire.

A cet égard, la Cour de cassation a considéré que la demande de constatation de l’acquisition de la clause résolutoire d’un bail peut être faite en référé sur le fondement de l'article 808 du Code de procédure civile selon lequel, dans les cas d'urgence, le président du tribunal de grande instance peut ordonner en référé toutes les mesures qui lui paraissent justifiées, sauf s'il y a lieu de trancher une contestation sérieuse (Cass. 3e civ., 18 juillet 1972, n° 71-14.140Cass. 3e civ., 11 mars 1980, n° 78-15.175).

Dès lors, le juge des référés ne peut :

  • ni trancher une contestation sur l'exigibilité des sommes réclamées dans le commandement de payer (Cass. 1re civ., 14 décembre 1965 : Bull. civ. I n° 708) ;
  • ni se prononcer sur la portée et les effets contestés d’une autorisation de cession de bail avec changement de commerce (Cass. 3e civ., 18 juillet 1972, n° 71-14.140) ;
  • ni rejeter l'exception d'inexécution présentée par le locataire pour manquement du bailleur à son obligation d'entretien (Cass. 3e civ., 23 mars 2010, n° 08-21.358) ;
  • ni statuer sur une demande d'indemnité d'occupation (Cass. 3e civ., 23 mai 2012, n° 11-14.456).

A l’inverse, que le bail soit exempt de clause résolutoire ou que celle-ci ne soit pas mise en œuvre, chaque partie peut demander au juge du fond de prononcer la résiliation du bail si l'autre partie n'exécute pas ses obligations ; en pareil cas, la résiliation relève alors du pouvoir d’appréciation du juge, qui n’est pas tenu de la prononcer.

Absence de pouvoir du juge des référés pour prononcer la résiliation du bail - Par un arrêt du 20 décembre 2018, la Cour de cassation s’est prononcée sur le pouvoir du juge des référés de prononcer la résiliation d'un bail (Cass. 3e civ, 20 décembre 2018, n° 17-16.783).

En l’espèce, le bailleur avait délivré à son locataire un commandement, visant la clause résolutoire, d’avoir à justifier de la démolition de constructions érigées sans son autorisation et de la souscription d'une assurance, puis avait agi devant le juge des référés en résiliation du bail commercial statutaire.

La Haute juridiction a cassé la décision d’appel, qui avait prononcé la résiliation du bail, alors qu'il n'entrait pas dans les pouvoirs du juge des référés de le faire.

S’il peut constater l’acquisition de la clause résolutoire d’un bail, le juge des référés ne peut pas prononcer la résiliation du bail.

Ainsi, la Cour de cassation rappelle la subtile mais nécessaire distinction entre la résiliation judiciaire et la résiliation qui résulte du jeu de la clause résolutoire, laquelle soustrait la résolution de la convention à l’appréciation des juges. 


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