Le Conseil constitutionnel a rendu le 3 avril 2020 une décision très attendue relative au report d’imposition des plus-values d’échange de titres réalisées par des personnes physiques, dans le prolongement d’une décision de la Cour de justice de l’Union européenne du 18 septembre 2019.
Celle-ci a jugé que lorsqu’un résident français a transféré le contrôle d’une société A à une société B établie dans un autre Etat de l'UE, la plus-value en différé d’imposition doit être taxée selon les règles d’assiette et de taux applicables au jour de la vente des titres B.
Les régimes français de report d'imposition qui à l’inverse figent l’impôt définitif (assiette et, depuis le 14 novembre 2012, taux) selon les conditions en vigueur au jour de l’échange des titres B contre les titres A, doivent donc être écartés lorsque la société B est située dans un pays de l’UE autre que la France.
Les requérants, dont les plus-values d’échange avaient été réalisées dans un contexte franco-français avant l’instauration du PFU à 12,8 %, étaient taxables au taux marginal de l’IR (45 %) sans abattement d’assiette pour durée de détention. Ils ont reproché au droit français d'établir une différence de traitement selon que les titres reçus en échange sont émis par une société de l’Hexagone ou d’un autre Etat de l’UE.
Cette position reposait sur une décision « Métro Holding » du Conseil constitutionnel rendue en 2016 dont il semblait clairement résulter qu’il n’est pas permis de traiter moins bien les situations franco-françaises que celles intra-UE lorsque la différence de traitement résulte de la contrariété de la règle française à une directive européenne. Une différence de traitement constituerait une « discrimination à rebours » portant atteinte au principe constitutionnel d'égalité devant l'impôt.
Contre toute attente, le Conseil constitutionnel en a décidé autrement en 2020 au motif que la différence de traitement critiquée est notamment « fondée sur une différence de situation », que l’on a quelque peine à discerner... Les observateurs identifient plutôt une regrettable évolution de la jurisprudence dont l’effet paradoxal est d’inciter les Français, légitimement fondés à bénéficier des principes institués par les directives européennes, à structurer leurs affaires au travers de holdings étrangers situés dans l’UE, tel qu’au Luxembourg, sous réserve d’y localiser une vraie substance économique et juridique. Soit autant de moins pour la France. En ces temps difficiles, voilà un message qui laisse bien perplexe…
A retenir : Le Conseil constitutionnel juge possible de mieux traiter fiscalement les opérations franco-UE que les opérations franco-françaises. Le régime du report d'imposition des plus-values d’échange de titres en offre une illustration étonnante.
Article paru dans Les Echos patrimoine le 26 juin 2020
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