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Renforcement du régime de transparence sur les marchés financiers | Flash info Corporate

18/12/2015

Les obligations de transparence sur les marchés réglementés font l’objet de mesures de renforcement et d’ajustement récurrentes au gré des besoins et de l’observation des pratiques.

Dans ce mouvement, la transposition de la directive Transparence 2013/50/UE du 22 octobre 2013, déjà amorcée en 20141, trouve dans l’ordonnance 2015-1576 du 3 décembre 2015 (l’ « Ordonnance ») son dernier train de dispositions. Un arrêté d’homologation du même jour a modifié, en conséquence, le règlement général de l’AMF.

Ces dispositions concernent les obligations d’information par les émetteurs dont les valeurs mobilières sont admises à la négociation sur un marché réglementé et comportent deux volets principaux :

  • l'instauration de règles plus strictes en matière de déclaration de franchissement de seuils de détention de titres financiers ;
  • le renforcement des sanctions administratives prononcées en cas de manquement aux obligations prévues par la directive Transparence.

Ces dispositions sont entrées en vigueur dès le 5 décembre 2015.

1. L'instauration de règles plus strictes en matière de déclaration de franchissement de seuils de détention de titres financiers

L’Ordonnance adapte le régime des déclarations de franchissements de seuils, assortie d’une modification du règlement général de l’AMF lui-même homologué par arrêté du 3 décembre 2015.

On retiendra pour l’essentiel ce qui suit :

► Le champ de l’assimilation des actions déjà émises, sur lesquelles porte un accord ou un instrument financier ayant un effet économique similaire à la possession des actions elles-mêmes (instruments dérivés), est étendu pour le calcul du numérateur : l’assimilation qui visait seulement les dérivés donnant droit à un règlement en espèces est désormais étendue aux dérivés qui donnent droit à un règlement physique (C. com. art. 233-9, 4° bis ; règl. gén. AMF art. 223-11, II et III).

Le règlement général de l’AMF fournit une liste non exhaustive des accords et instruments financiers concernés :

  • les obligations échangeables ou remboursables en actions ;
  • les contrats à terme ;
  • les options, qu'elles soient exerçables immédiatement ou à terme, et quel que soit le niveau du cours de l'action par rapport au prix d'exercice de l'option ;
  • les warrants ;
  • la mise en pension de titres ;
  • les accords de cession temporaire de titres ;
  • les contrats financiers avec paiement d'un différentiel ;
  • les contrats d'échange relatifs à des actions ;
  • tout instrument financier exposé à un panier d'actions ou à un indice boursier.

Pour les instruments financiers exposés à un panier d'actions ou à un indice boursier, le règlement général de l’AMF prévoit des modalités de calcul qui tiennent compte de l’importance relative de l'action dans ledit panier ou indice. Les modalités de calcul en delta sont précisées.

Le nombre d'actions et de droits de vote à prendre en compte par le déclarant en cas d'instruments financiers, émis en référence à un panier d'actions ou à un indice boursier, est calculé sur la base de l'importance relative de l'action dans ledit panier ou indice dès lors que l'une des conditions suivantes est remplie :

  • les actions représentent 1 % ou plus d'une même classe d'actions émises par un émetteur ;
  • les actions représentent 20 % ou plus de la valeur totale des titres du panier ou de l'indice boursier.

L’exemption applicable au portefeuille de négociation est modifiée par cohérence pour intégrer les instruments dérivés des articles 4 et 4 bis de l’article L. 233-9 du Code de commerce (C. com. art. L. 233-7, IV ; règl. gén. AMF art. 223-13).

► Le bénéfice d’une exemption pour les actions acquises aux fins de stabilisation est ouvert pour autant que les droits de vote attachés auxdites actions ne soient pas exercés ni utilisés autrement pour intervenir dans la gestion de l'émetteur (C. com. art. L. 233-7, IV-5°).

► L’information relative aux déclarations de franchissements de seuils accède au statut d’information réglementée (au sens de l’article 221-1 du règlement général de l’AMF) dont elle devient une composante. S’agissant de ces éléments relatifs aux franchissements de seuils, l’AMF sera désormais en charge de leur publication effective et intégrale sur son site internet (règl. gén. AMF art. 221-3, II°). Pour les autres composantes de l’information réglementée, l’émetteur reste comme auparavant pleinement responsable de leur publication effective et intégrale.

► Le Code de commerce est modifié pour disposer expressément que le facteur déclencheur de l’obligation de déclaration de franchissement de seuils consiste désormais en la possession directe ou indirecte d’un certain nombre d’actions (C. com. art. L. 233-7, I). L’Ordonnance met un terme à toute lecture restrictive des cas d’assimilation qui serait limitée aux seuls cas de détention directe. Par coordination, la définition du contrôle est modifiée pour viser, en cette matière, plus largement « toute personne, physique ou morale » en lieu et place d’« une société » (C. com. art. L. 233-3, I). La chaîne de contrôle déclenchant une obligation de déclaration de franchissement de seuils s’apprécie désormais indistinctement, que la personne interposée soit une société ou une personne physique.

2. Le renforcement des sanctions administratives en cas de manquement aux obligations prévues par la directive Transparence

La volonté de durcir les sanctions, tout autant que de consolider leur fondement juridique, témoigne de l’engagement européen de faire de la qualité de l’information réglementée une pierre angulaire du bon fonctionnement des marchés de capitaux de l’Union.

Ces sanctions visent essentiellement les manquements aux obligations relatives aux franchissements de seuils de participation légal ou statutaire (C. com. art. L. 233-7), de publication du nombre d’actions et de droits de vote (C. com. art. L. 233-8, II) et d’information périodique (rapports financiers de l’art. 451-1-2 du C. mon. fin.). Ces manquements sont désormais visés par une disposition expresse distincte fondant la possibilité de les sanctionner.

La première sanction est celle de la publicité du manquement. L’AMF pourra ainsi rendre publique une déclaration précisant l’identité de la personne à l’origine du manquement ainsi que la nature du manquement (C. mon. fin. art. 621-14, I). La mise en œuvre de cette arme par l’AMF sera à observer tant l’enjeu réputationnel est important.

Plus classique mais non moins efficace, a fortiori lorsqu’elle est exprimée en pourcentage de chiffre d’affaires, une sanction pécuniaire pourra être prononcée. Son montant sera plafonné à :

  • 100 millions d’euros ; ou
  • 5 % du chiffre d’affaires annuel total sur la base des comptes annuels du dernier exercice (le cas échéant consolidé) ; ou
  • au décuple de l’avantage retiré du manquement ou des pertes qu’il a permis d’éviter, si ceux-ci peuvent être déterminés (C. mon. fin. art. 621-15, III bis).

Une liste non exhaustive de critères devra fonder la justification du quantum de la sanction. Parmi tous ces critères, on relèvera notamment ceux de la gravité et de la durée du manquement ; de la qualité et du degré d’implication de la personne en cause ; de la situation et de la capacité financières de la personne en cause, ou encore de l’importance des gains ou avantages obtenus ou des pertes ou coûts évités par la personne en cause.

Enfin, la publicité des décisions d’injonction ou de sanction pécuniaire sera de principe sauf à bénéficier des exceptions de report ou d’anonymisation motivées et justifiées par le préjudice grave et disproportionné ; la perturbation grave encourue pour la stabilité du système financier ou pour le déroulement d’une enquête ou d’un contrôle en cours (C. mon. fin. art. 621-15, V et sur renvoi art. 621-14, II).

3. Autre mesure : l'instauration d'une définition de la notion d'émetteur et son extension aux entités n'ayant pas la personne morale

Pour la partie du Code monétaire et financier afférente aux obligations d’information relatives aux comptes (par exemple, le rapport financier annuel), un émetteur est défini comme « une personne ou une entité dont les titres financiers sont admis aux négociations sur un marché réglementé ou dont les titres financiers, admis ou non aux négociations, sont représentés par des certificats admis aux négociations sur un marché réglementé » (C. mon. fin. art. 451-1-1).

Référence : ordonnance n° 2015-1576 du 3 décembre 2015 transposant en droit français la directive Transparence révisée du 22 octobre 2013


1 Notamment par les articles 9 et 12 de de la loi 2014-1662 du 30 décembre 2014.

Auteurs

Portrait deChristophe Blondeau
Christophe Blondeau
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Jean-Eric Cros
Associé
Paris
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Arnaud Hugot
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Christophe Lefaillet
Associé
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