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TVA : Qu’est-ce qu’un terrain à bâtir ?

Définition du "terrain à bâtir" dans la réforme de la TVA immobilière

15/06/2010

La réponse, qui était connue sous l’empire de l’ancien régime de TVA, dépend aujourd’hui de la classification du bien au regard des règles de l’urbanisme, ce qui introduit des incertitudes gênantes.

Etait précédemment un terrain à bâtir le terrain que son acquéreur avait l’intention de bâtir.

Depuis l’entrée en vigueur, le 11 mars dernier, de la réforme de la TVA immobilière issue de l’article 16 de la loi de finances rectificative pour 2010 (loi n° 2010-237 du 9 mars 2010), il n’est plus possible, ou pas encore, d’établir avec certitude si un immeuble est, ou non, un terrain à bâtir. Il s’agit pourtant d’une question essentielle puisqu’elle gouverne le régime de TVA applicable à la cession du bien. Les commentaires de l’administration sont donc, sur ce point comme sur d’autres, particulièrement attendus.

Le nouvel article 257 I 2 1° du CGI donne une définition du terrain à bâtir fondée sur des critères objectifs là où c’était auparavant l’intention de l’acquéreur pour le régime applicable en matière de droits d’enregistrement qui emportait principalement la qualification au regard de la TVA. Sont ainsi désormais considérés « comme terrains à bâtir les terrains sur lesquels des constructions peuvent être autorisées en application d’un plan local d’urbanisme, d’un autre document d’urbanisme en tenant lieu, d’une carte communale ou des dispositions de l’article L. 111-1-2 du code de l’urbanisme ».

Or, une opération immobilière, dont le régime TVA diffère selon que le vendeur est un assujetti ou un non-assujetti, est susceptible de porter sur trois principales catégories d’immeubles : les terrains à bâtir, les terrains autres qu’à bâtir et les immeubles bâtis.

Dans ce contexte, il existe actuellement un doute sur les critères permettant de déterminer si un terrain nu est ou non à bâtir (I) et dans quels cas un terrain recouvert de bâtiments perd sa qualification d’immeuble bâti pour suivre le régime du terrain à bâtir (II).

1/ Quels sont les biens constituant des terrains au sens des dispositions de l’article 257 I 2 1° du CGI ?

La question ne se pose pas pour les cessions opérées par un non assujetti, toujours situées en dehors du champ d’application de la TVA. En revanche, elle doit être résolue chaque fois que la cession émane d’un assujetti : la cession d’un terrain à bâtir est taxable de plein droit sur le prix total ou sur la marge (selon que l’acquisition avait ou non ouvert droit à déduction), tandis qu’elle est exonérée pour un terrain qui n’est pas à bâtir, sauf option du cédant pour le paiement de la TVA sur le prix total.

La référence aujourd’hui faite à la réglementation de l’urbanisme ne simplifie totalement les choses car un plan local d’urbanisme (PLU) comporte plusieurs zones qui appellent une appréciation différente de la constructibilité des terrains qui s’y trouvent implantés.

Les zones U ne posent pas de difficultés Ce sont par essence des zones constructibles dans lesquelles peuvent être autorisées des constructions.

Une première difficulté se présente avec les zones AU que le code de l’urbanisme divise en deux catégories : celles qui sont ouvertes immédiatement à l’urbanisation et celles qui ne le sont pas (zones fermées).

Les premières deviennent constructibles au fur et à mesure de la réalisation des équipements (prévus soit par une opération d’aménagement d’ensemble, soit par le PADD). Cette constructibilité anticipée est fonction de plusieurs conditions cumulatives : l’existence d’équipements (voiries et réseaux) nécessaires à l’urbanisation, leur localisation (à proximité immédiate de la zone AU considérée), leur capacité à desservir une nouvelle population. Les terrains classés dans de telles zones AU seront, selon toute vraisemblance, considérés comme des terrains sur lesquels des constructions peuvent être autorisées au sens de l’article 257 I 2 1° du CGI.

A l’inverse, lorsqu’une zone d’urbanisation future ne peut pas, de par sa localisation, bénéficier d’équipements et de réseaux suffisants, elle n’est pas immédiatement urbanisable. Elle est donc considérée comme inconstructible car non ouverte immédiatement à l’urbanisation. L’ouverture à l’urbanisation pourra se faire par une décision de la collectivité (modification ou révision du PLU), sans que ce mode d’ouverture à l’urbanisation semble être exclusif. Les terrains ainsi classés devraient en toute logique être exclus du champ d’application du nouvel article 257 I 2 1° du CGI.

En tout état de cause, la seule circonstance qu’un terrain soit classé en zone AU n’est pas un critère suffisant pour déterminer si des constructions peuvent y être admises : il importe d’examiner la localisation de la zone, la présence d’équipements ou non et les dispositions du règlement et du PADD y afférent.

Une difficulté se présente également pour les terrains situés dans les zones A. dites de protection de l’activité agricole. En effet, si elles sont habituellement considérées comme des zones inconstructibles, il n’est pas exclu que ces zones puissent accueillir des « constructions et installations nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif et à l'exploitation agricole » Elles disposent donc d’une sorte de « constructibilité limitée » en fonction de la destination des constructions projetées. L

La rédaction retenue par le législateur ne paraît pas donc pas exclure que les terrains situés en zone A puissent être des terrains à bâtir alors que ces terrains sont, par exemple, écartés du champ de la taxe sur les terrains devenus constructibles prévue à l’article 1529 du CGI.

L’administration devra donc préciser ce que doit être, pour l’application de la TVA, un terrain constructible au sens d’un PLU, cette définition n’étant absolument pas évidente du point de vue du droit de l’urbanisme.

2/ Un immeuble bâti peut-il être considéré comme un terrain à bâtir ?

Tel était très habituellement le cas sous le régime antérieur : tout terrain acquis en vue de la construction prochaine d’un immeuble constituait un terrain à bâtir (documentation administrative 8 A 1131 n° 41, mise à jour au 15 novembre 2001). La qualification de l’immeuble pour l’application de la TVA résultait alors de l’intention de l’acquéreur et s’appréciait, hormis le cas des achats réalisés par les particuliers situés hors du champ de la TVA immobilière depuis le 22 octobre 1998, au regard de la capacité de l’acquéreur à bénéficier de l’exonération de droits d’enregistrement prévue à l’article 1594 0G A 1 du CGI. Pouvaient ainsi constituer des terrains à bâtir les terrains nus ou recouverts de bâtiments destinés à être démolis, les immeubles inachevés les droits de surélévation d’immeubles préexistants.

Désormais, les situations au regard de la TVA et des droits d’enregistrement sont clairement dissociées.

Pour l’application des droits d’enregistrement, la situation continue d’être appréciée en fonction de l’intention de l’acquéreur : l’exonération concerne tout immeuble (notons du reste que la loi ne dresse plus la liste des immeubles concernés) sur lequel l’acquéreur prend l’engagement d’effectuer dans un délai de quatre ans les travaux conduisant à la production d’un immeuble neuf. Pour l’application de la TVA en revanche, se pose la question de savoir si la notion de « terrains sur lesquels une construction peut être édifiée » à laquelle se réfère le nouvel article 257 I 2 1 du CGI, est susceptible d’inclure ou non des terrains munis de constructions.

Les immeubles inachevés doivent être écartés du débat : la loi les assimile à des immeubles neufs (CGI, art. 257 I 2 2°).

La jurisprudence récente de la Cour de justice de l’Union européenne jette en revanche un trouble sur l’analyse suivant laquelle un terrain bâti serait par nature exclu du régime des terrains à bâtir : la Cour a en effet récemment jugé qu’un terrain muni de bâtiments est un terrain à bâtir lorsque les bâtiments, vétustes, sont en cours de démolition à la date de la cession et que c’est au vendeur qu’incombe cette démolition.

La présence d’une construction n’exclut donc pas que le terrain soit « à bâtir » (CJUE, aff. C-461/08, Don Bosco Onroerend Goed BV du 19 novembre 2009).

Pour autant, l’administration fera-t-elle le choix, au-delà de la situation particulière jugée par la Cour, de considérer un immeuble comme un terrain à bâtir lorsque sa vétusté implique nécessairement que l’acquéreur n’aura pas d’autre choix pour en faire usage, que de procéder à sa démolition ou d’y faire procéder à des travaux d’une ampleur telle que leur réalisation est assimilée, par la loi, à un immeuble neuf (CGI, art. 257 I 2 2°) ?

En cas de réponse positive, quels peuvent les critères pertinents qui permettront de distinguer la vente d’un immeuble ancien de celle d’un terrain à bâtir ?

Rappelons que si la cession par un non assujetti d’un immeuble, bâti ou non, n’est en principe pas imposable à la TVA (1) , le régime applicable à la vente d’un immeuble par un assujetti diverge selon qu’il s’agit d’un terrain à bâtir (soumis de plein droit à la TVA) ou d’un immeuble ancien (2) (exonéré avec possibilité d’opter).

Ces interrogations démontrent que la clarté du texte désormais fondé sur des critères objectifs recèle en réalité des incertitudes pour lesquelles les précisions de l’administration, puis l’interprétation par le juge, seront les bienvenues.


(1) Seule est imposable la cession, dans les cinq ans de son achèvement, d’un immeuble bâti qui avait été acquis en l’état futur d’achèvement.
(2) L’assimilation à un terrain à bâtir d’un immeuble achevé depuis moins de cinq ans paraît peu vraisemblable.

Article paru dans la revue Option Finance du 3 mai 2010


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Elisabeth Ashworth
Associée
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Vanina Ferraci