En matière obligataire, les porteurs sont regroupés, pour la défense de leurs intérêts communs, dans une masse dont les décisions peuvent usuellement être prises en assemblée générale. Ainsi, le conseil d'administration, le directoire ou le représentant légal d'un émetteur souhaitant modifier les modalités d'obligations peut convoquer une assemblée générale d'obligataires à cette fin.
Les modifications qui sont soumises à l'approbation de l'assemblée générale des obligataires doivent avoir été autorisées par l'émetteur. Deux points de vue s'opposent quant à l'organe compétent en la matière :
- l'un considère que dans la mesure où l'article L.228-40 al.1 C.com reconnaît (sauf si ce pouvoir est statutairement réservé aux actionnaires) une compétence exclusive au conseil d'administration, au directoire ou aux gérants, selon le cas) pour décider ou autoriser l'émission d'obligations, et donc pour en décider les modalités, toute modification ultérieure des modalités relève également de leur compétence exclusive, par parallélisme des formes ;
- l'autre, plus souple et soutenu par le comité juridique de l'ANSA dans son avis n°10-050 du 8 septembre 2010, considère que, dans le cas d'une modification relevant d'une décision de gestion, un représentant légal tel qu'un directeur général serait compétent sans considération du parallélisme des formes susmentionné. La question reste donc entière si la modification envisagée n'est pas une simple décision de gestion, et dans ce cas, l'application du parallélisme des formes apparait plus prudente.
Ainsi, il convient de se poser la question au cas par cas, selon les modifications envisagées.
L'ordre du jour est fixé par l'auteur de la convocation et ne peut en principe être modifié ni par des obligataires qui souhaiteraient y porter de nouvelles questions, ni sur seconde convocation. S'ils veulent pouvoir tenir compte des éventuelles remarques des porteurs sur les projets de résolutions (et ainsi s'assurer qu'ils voteront en leur faveur) les émetteurs doivent donc les leur transmettre préalablement à la convocation. Les obligataires peuvent aussi demander qu'un waiver fee soit versé à la masse en contrepartie de leur participation à l'assemblée générale.
Les obligataires peuvent participer à l'assemblée générale en y assistant personnellement, en votant par correspondance ou en s'y faisant représenter. En pratique, le mandataire choisi est généralement le représentant de la masse en sa qualité de président de l'assemblée générale. L'émetteur doit porter une attention particulière aux formulaires de vote par correspondance et de procuration, qui sont généralement contenus dans un document unique. Outre les mentions obligatoires devant y figurer, il est très important que les obligataires votant par correspondance ou par mandataire puissent y indiquer si, dans le cas où des amendements devaient être votés en séance, ils souhaitent s'abstenir ou donner pouvoir à un mandataire. Faute d'avoir anticipé une telle situation, les obligataires votant par correspondance ou par mandataire ne pourront s'exprimer sur de tels amendements.
On notera à cet égard que, jusqu'à l'entrée en application de la loi n° 2024-537 visant à accroître le financement des entreprises et l'attractivité de la France le 15 juin 2024, les votes abstentionnistes étaient considérés comme des votes défavorables pour le calcul de la majorité alors que l'assemblée générale statue désormais, à l'instar des assemblées générales d'actionnaires, à la majorité des deux-tiers des voix exprimées, sans tenir compte des abstentions, des votes blancs et des non-votants. Si les obligations ont une valeur nominale de 100.000 euros ou plus (wholesale), cette disposition peut être aménagée pour continuer à prévoir que l'assemblée générale statue à la majorité des deux-tiers des voix dont disposent les obligataires présents ou représentés, plutôt que des voix exprimées. Mais ce n'est pas le cas si les obligations ont une valeur nominale inférieure à 100.000 euros (retail) : dans cette hypothèse, les votes abstentionnistes ne sont plus comptabilisés comme des votes défavorables.
Article paru dans Option Finance le 16/07/2024
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