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Conventions de garantie

Avec la pandémie, un marché contrasté un peu plus favorable aux acquéreurs

07/04/2020

Alors que le premier confinement du printemps dernier a créé beaucoup d’incertitudes et un ralentissement de certaines opérations qui ont pu être mises en pause, le marché des fusions-acquisitions et du private equity est finalement resté très actif en 2020 malgré la crise sanitaire. Cette situation s’explique probablement par le maintien d’une abondance de liquidités disponibles pour les fonds d’investissement et l’accès à des financements externes dont le coût reste peu élevé. La crise a également accentué une situation pré-existante de rareté des actifs de qualité créant une compétition très forte entre candidats acquéreurs sur certains process de cession. Dans ce contexte, comment se situent la pratique et la négociation des conventions de garantie ? La situation actuelle semble assez contrastée entre l’émergence d’un marché globalement plus favorable aux acheteurs en raison de la pandémie et un marché très concurrentiel et encore pro-vendeur sur les actifs de qualité.

Ainsi, sur les transactions très disputées, la pratique courante sur les beaux actifs reste de réaliser des acquisitions sans garanties autres que quelques déclarations fondamentales consenties par les vendeurs sur leur capacité à vendre, la propriété des titres de la cible (et généralement, quand même, de ses filiales), l’existence des sociétés et l’absence de procédures collectives. Bien sûr, cette pratique est bien ancrée depuis longtemps sur les opérations entre fonds mais elle existe aussi sur d’autres transactions.

Toutefois, sur les opérations primaires et les transactions de fusions-acquisitions industrielles, en particulier sur les opérations de taille modeste, il reste courant pour les acquéreurs d’obtenir des garanties structurées sous la forme d’une liste de déclarations dont la violation entraine pour l’acquéreur le droit d’obtenir une indemnisation du préjudice. 

Que disent les études de CMS sur les pratiques en matière de conventions de garantie ?

Sur ce type d’opérations, quelles sont les grandes pratiques en matière de conventions de garantie ces dernières années ? Les études annuelles réalisées par CMS au travers de ses implantations dans plus de 40 pays et portant sur plusieurs centaines de transactions révèlent que les pratiques au cours de ces dernières années sont restées assez stables. Toutefois, l’étude CMS European M&A Study 2021, portant sur l’année 2020 et publiée le 24 mars 2021, révèle également des pratiques assez différentes entre le marché européen et le marché américain lequel s’avère être beaucoup plus favorable aux acquéreurs sur le terrain de la répartition des risques entre acheteur et vendeur et en particulier des garanties.

En matière de plafonds des garanties, l’étude CMS fait ressortir qu’en Europe, leur montant est assez dépendant de la taille de l’opération et qu’ils ont eu tendance à augmenter en 2020. Dans certains pays, le montant des plafonds peut atteindre celui du prix sur de petites opérations alors que les plafonds se situent généralement entre 10 % et 25 % du prix de cession dans les opérations de taille plus importantes. En France, les montants de plafond entre 10 % et 20 % du prix de cession sont les plus courants sur toute taille d’opérations (les montants ayant tendance à diminuer avec la taille de l’opération).

Concernant les durées des garanties, même si celles-ci se sont un peu allongées en 2020, la pratique européenne comme la pratique française établissent la durée moyenne des garanties (hors fiscal et social) entre 18 et 24 mois. La pratique qui consiste à prévoir un de minimis (seuil individuel par préjudice) dans les conventions de garantie semble quant à elle totalement généralisée. Le de minimis est présent dans plus des trois-quarts des transactions européennes et semble être aujourd’hui une norme de marché à travers l’Europe. Pour ce qui est des seuils et des franchises, la pratique est plus contrastée. Autant, la plupart des conventions de garantie prévoient des seuils de déclenchement (indemnisation à partir du premier euro lorsque le seuil est atteint) qui se situent le plus souvent autour de 1 % du prix de cession mais à l’inverse, les clauses de franchise (indemnisation au-delà seulement du montant convenu) se font plus rares (autours de 20 % des opérations à travers l’Europe).

Par ailleurs, les mécanismes de garantie de la garantie apparaissent sur les trois dernières années comme présents dans environ un tiers des opérations avec, lorsque ceux-ci sont prévus, une prédominance des conventions de séquestre pour sécuriser les engagements d’indemnisation des vendeurs à l’égard de l’acquéreur.

A noter enfin, s’agissant des garanties fiscales, que le Service de mise en conformité (SMEC) mis en place début 2019 par la DGFiP, pour permettre notamment à un nouvel acquéreur de procéder, à des conditions avantageuses, à la régularisation d’anomalies fiscales détectées chez la cible lors de son acquisition, a connu un démarrage particulièrement timide. Ce faible succès s’explique probablement par une certaine inertie liée à la pandémie mais aussi, et surtout, par le fait que cette démarche de régularisation n’est pas à ce jour compatible avec le bénéfice concomitant d’une garantie de passif fiscal consentie par le cédant1.

Croissance exponentielle du recours aux assurances garantie de passif

Si toutes ces pratiques restent relativement stables sur les dernières années, l’évolution la plus marquante reste le recours aux assurances garantie de passif qui a connu une croissance exponentielle sur la période récente. Ce mécanisme permet aux candidats acquéreurs de trouver une protection tout en offrant aux vendeurs une « sortie propre » constituant un avantage concurrentiel non négligeable dans les process compétitifs. L’étude CMS fait ressortir que l’usage des assurances W&I (Warranty & Indemnity) est passé de moins de 10 % des transactions en Europe sur la période 2010 - 2018 à 17 % en 2020 et a atteint presque 50 % des transactions dont le montant est supérieur à 100 millions d’euros.

Le recours aux assurances W&I permet de fluidifier les négociations entre les vendeurs et les acheteurs en évitant, notamment, la mise en place d’un séquestre et en déplaçant le risque de la garantie de passif sur la tête de l’assureur. Pour autant, un principe essentiel de ce produit assurantiel est de ne couvrir que les risques qui n’ont pas été « divulgués » ou « découverts » lors de la phase de due diligence. L’essence de ce type de contrat réside en effet dans l’aléa de la réalisation de ce risque juridique ou fiscal qui, par principe, ne doit pas être connu des parties lors de la phase des négociations. Or, il est admis que cette condition de l’existence de l’aléa n’est plus remplie dès que le risque est désigné et quantifié. A ce titre, lorsque qu’un risque est identifié au cours de l’audit de la société, les parties sont alors invitées à prévoir soit une réduction du prix, soit une clause d’indemnité spécifique dans le contrat de cession. Ainsi, dans ce dernier cas, si le risque identifié se réalise, cela ne sera pas la clause de garantie de passif qui aura vocation à être mise en œuvre, mais bien la clause de d’indemnité spécifique, écartant alors la couverture de l’assurance W&I puisque celle-ci ne peut jouer que lorsque la garantie de passif est enclenchée.

Enfin, force est de constater que les acheteurs manifestent aujourd’hui un intérêt croissant pour un nouveau produit qui consiste précisément à s’assurer pour un risque juridique ou un risque fiscal identifié (« Contingent Legal or Tax risk »). L’objectif de ce nouveau produit est de venir combler l’absence de couverture de l’assurance W&I en faisant peser le passif éventuel lié à ce risque identifié sur l’assureur et, ainsi, de « sortir » ce passif potentiel de la valeur de la société cible afin de garantir le rendement attendu au regard de l’investissement réalisé. 

Article paru dans La lettre des Fusions-Acquisitions de mars 2021


1. Cf. « GAP ou pas GAP : l’impact des nouvelles normes fiscales sur la rédaction des contrats de cession », par J.C. Benois et T. Louvel, Lettre des Fusions-Acquisitions et du Private Equity, Option Finance, 24 juin 2019.


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