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Energies renouvelables et loi ASAP

Nouveautés issues de la loi et retour sur le contentieux des énergies marines

24/02/2021

Sans bouleverser le droit des énergies renouvelables, la loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 d'accélération et de simplification de l'action publique (ASAP) apporte quelques retouches et nouveautés.

Les dispositions de la loi ASAP concernant les énergies renouvelables sont nombreuses : elles visent les énergies renouvelables en général, mais aussi, plus particulièrement, le contentieux des énergies marines et la géothermie.

On notera au préalable que l’article 63 de la loi, qui offrait la possibilité aux développeurs de projets d’installations de production, de procéder à des travaux de raccordement à la fibre optique simultanément aux travaux de raccordement électrique, aux frais du producteur, a été censuré par le Conseil constitutionnel en tant que cavalier législatif (décision n° 2020-807 DC du 3 décembre 2020). Il en est de même des dispositions relatives au transfert des colonnes montantes de gaz naturel aux gestionnaires de réseaux publics de distribution ou encore de la hausse de la réfaction tarifaire applicable aux petites installations de biométhane.

S’agissant des énergies renouvelables, l’article 52 de la loi ASAP prévoit notamment, par dérogation à l’article L.2122-1-1 du Code général de la propriété des personnes publiques (CG3P), que seule une publicité préalable est nécessaire pour l’occupation du domaine public de l’Etat par une installation de production de biogaz ou d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables, si celle-ci bénéficie par la suite d’une aide d’Etat après organisation d’une procédure de mise en concurrence conforme au Code de l’énergie. L’article 53 renforce l’information des maires par les développeurs des projets éoliens prévoyant de s’implanter sur leur territoire : cette information doit avoir lieu avant le dépôt du dossier de demande d’autorisation environnementale.

S’agissant des énergies marines en particulier, si les articles 52 et 53 de la loi ASAP s’appliquent également aux éoliennes en mer, la principale nouveauté concerne le contentieux des énergies marines, telles que les éoliennes posées ou flottantes, les énergies hydrolienne (des courants), marémotrice (des marées) et houlomotrice (des vagues) pour citer les plus connues. L’article 55 de la loi ASAP crée en effet l’article L.111-13 du Code de justice administrative et attribue compétence au Conseil d’Etat en premier et dernier ressort, pour statuer sur la plupart des décisions administratives susceptibles d’intéresser le développement de l’ensemble de ces énergies.

Le décret n° 2016-9 du 8 janvier 2016, déjà, avait donné compétence en premier ressort à la cour administrative d’appel de Nantes pour statuer sur ce contentieux spécialisé (art. R.311-4 du Code de l’énergie, modifié par le décret n° 2018-1204 du 21 décembre 2018).

L’article 55 de la loi ASAP supprime donc un nouveau degré de juridiction. On sait que le développement des parcs éoliens en mer a connu un important retard. Alors que l’autorisation d’exploiter les premiers parcs a été attribuée en 2012, l’instruction – qui s’effectue naturellement dans le temps long – des demandes d’autorisation environnementale et d’occupation du domaine public maritime, a été suivie d’un contentieux fourni, porté par des associations opposées à l’énergie éolienne, des pêcheurs s’estimant lésés voire des concurrents évincés.

Ces contentieux n’ont remis en cause aucun projet jusqu’à présent malgré quelques frayeurs :

  • un agent ne bénéficiant pas d’une délégation avait signé une autorisation d’occupation du domaine public maritime (CAA Nantes, 13 avril 2018, n°17NT01851, Gardez les caps et autres) ;
  • le partenaire d’un concurrent évincé a été indemnisé sans toutefois que la décision d’attribution ait été annulée (CE, 27 juillet 2019, n° 416862, Nass et Wind smart services,) ;
  • plus récemment, l’incompétence des auteurs d’arrêtés autorisant des dérogations en matière environnementale a été constatée, conduisant à l’annulation partielle d’un arrêté, à la suspension des effets de la partie de l’arrêté demeurée en vigueur ainsi que des autres arrêtés rendus en matière environnementale dans le cadre d’un projet de parc éolien en mer posé (CAA Nantes, 6 octobre 2020, n° 19NT01714, 19NT02501 et 19NT02520, Assoc. "sans offshore à l'horizon",) ;
  • enfin, l’exécution de l’autorisation environnementale d’un parc éolien flottant en Méditerranée a été suspendue dans l’attente de sa régularisation (CAA Nantes, 6 octobre 2020, n° 19NT02389, Assoc . Nature et citoyenneté Crau Camargue Alpilles, ).

En revanche, les nombreux recours ont grandement retardé le développement de l’éolien en mer en France, dont les seules installations en service sont des projets pilotes d’éoliennes flottantes. Aucun parc n’a donc encore été construit à une échelle commerciale alors que les premiers auraient dû être mis en service par tranches entre 2018 et 2020 ; les premiers parcs éoliens en mer posés devraient finalement émerger des eaux en 2022 pour atteindre une puissance installée de 2,4 GW au 31 décembre 2023 selon la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE).

Or, pour atteindre les objectifs de la PPE, 5,2 à 6,2 GW de capacités installées doivent être mis en service au large des côtes françaises d’ici le 31 décembre 2028. Alors que l’objectif d’attribution des projets par le ministre chargé de l’énergie est d’ores et déjà compromis (le lauréat du projet de 1 GW au large de la Normandie devait être sélectionné en 2020, or la consultation n’a finalement été lancée que le 15 janvier 2021), la suppression d’un autre niveau de juridiction est bienvenue. Il convient d’espérer que le sacrifice fait à la bonne administration de la justice portera ses fruits – sacrifice relatif, le double degré de juridiction n’étant ni un principe général du droit, ni protégé par des textes de nature conventionnelle (CE, 9 février 2000, n° 185667, Comparois, ; CE, 17 décembre 2003, n° 258253, Meyet).

S’agissant de la géothermie, l’article 45 de la loi ASAP modifie le Code minier afin d’intégrer la production de froid par géothermie (parfois dénommé "rafraichissement passif" ou "géo-cooling") au sein des dispositions historiques relatives à la géothermie. Ainsi, les porteurs de projets combinant extraction de chaleur depuis le sous-sol (titre minier de géothermie classique) et cession de chaleur au gîte géothermique c’est-à-dire stockage souterrain calorifique (jusqu’alors titre minier de stockage) ne sont désormais plus soumis qu’au régime applicable à la géothermie.

Cette disposition n’est pas sans rappeler l’article 27 de la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat, qui a étendu aux stockages souterrains de gaz naturel, d'hydrocarbures liquides, liquéfiés ou gazeux ou de produits chimiques à destination industrielle, la dérogation à l’obtention d’un titre minier, lorsque les travaux de création, d'essais et d'aménagement de ces ouvrages nécessitent l'extraction d'une substance soumise au régime légal des mines. L’objectif de cette disposition avait en effet un objet similaire à celui de l’article 45 de la loi ASAP : éviter au pétitionnaire d’une concession minière d’être soumis concomitamment au régime légal des mines et au régime légal des stockages souterrains.


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