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Enfants influenceurs et publicité déguisée

Un risque de pratique commerciale trompeuse ?

23/11/2021

L'UFC-Que Choisir a déposé plainte contre McDonald's France pour pratiques commerciales trompeuses devant le tribunal judiciaire de Paris. L'association de consommateurs reproche au géant du fast-food de recourir à des partenariats publicitaires dissimulés avec des enfants (communiqué du 13 octobre 2021).

A l’origine de la plainte de l’association de consommateurs, des vidéos diffusées sur YouTube mettant en avant de jeunes enfants en cuisine, recréant un restaurant : l’image prête à sourire mais pourrait, selon l’association, être moins innocente qu’elle n’y paraît. Les petits chefs aux fourneaux sont en réalité des influenceurs et le fameux restaurant "McSwan’s" dont ils font la publicité rappelle fortement ceux de la fameuse chaîne de fast-food McDonald. Par ailleurs, le célèbre logo de l’enseigne trône partout : des murs de la cuisine aux emballages en carton en passant par les noms de menus. Le menu pour enfants bien connu est décrit en détail sans oublier la mention du cadeau qui accompagne la commande.

D’un point de vue commercial, les influenceurs ont pensé à tout mais, selon l’association, ils auraient oublié sur le plan juridique une mention obligatoire : celle indiquant que la vidéo est en réalité une communication commerciale.

L’association considère à cet égard que "dissimuler la nature publicitaire d’un message, laissant ainsi croire à la communauté d’un influenceur, à un conseil désintéressé, est une pratique commerciale trompeuse sanctionnable". Elle estime que cette pratique est d’autant plus contestable qu’elle vise spécifiquement des enfants qui sont "moins armés que les adultes face à des messages publicitaires cachés".

Comportements trompeurs d’influenceurs à l’occasion de publicités déguisées : une pratique dans le viseur de la DGCCRF

Le Code la consommation prévoit différentes hypothèses de publicité trompeuse et notamment celle par omission. En effet selon l’article L.121-3 du Code de la consommation, "une pratique commerciale est également trompeuse si, compte tenu des limites propres au moyen de communication utilisé et des circonstances qui l'entourent, elle omet, dissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle ou lorsqu'elle n'indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte".

Cette absence d’indication du caractère publicitaire d’une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux a ainsi valu une amende de 20 000 euros à l’influenceuse Nabilla Benattia-Vergara pour avoir fait la promotion de services de formation au trading proposés par un site internet sans mentionner qu’elle était rémunérée à cet effet par les sociétés exploitant ce site. Comme l’a rappelé la DGCCRF dans un communiqué du 28 juillet 2021, "le défaut d’indication du caractère publicitaire de sa publication (par un logo ou une mention orale ou écrite par exemple) constitue une pratique commerciale trompeuse à l’encontre de ses abonnés qui peuvent croire à tort que la promotion de l’influenceuse résulte d’une expérience personnelle positive désintéressée".

Enfants influenceurs et engagement volontaire des entreprises

Face à ces messages publicitaires cachés, les enfants sont vulnérables. C’est ce qui explique que depuis une délibération n° 2010-4 du 16 février 2010 du Conseil supérieur de l’audiovisuel, les placements de produits sont proscrits dans les programmes télévisés qui leur sont destinés. En revanche, rien n’interdit aux marques de conclure des partenariats avec des enfants influenceurs pour faire de la publicité sur les réseaux sociaux.

Un certain nombre d’entreprises, parmi lesquelles figure McDonald’s, se sont engagées, au-delà de leurs obligations légales, à collaborer à l’initiative européenne d’autorégulation impliquant de ne placer aucune publicité pour des aliments ou des boissons dans les programmes et/ou médias destinés aux jeunes enfants (l’"EU Pledge").

En parallèle de ces engagements éthiques des entreprises, on voit également se développer des guides de bonnes pratiques, diffusés notamment par l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP). Ainsi, l’ARPP a publié des recommandations précises en matière de communication publicitaire digitale et indique par exemple, les règles à respecter par les influenceurs afin de préciser la présence d’un partenariat.

Quel encadrement législatif des enfants influenceurs ?

La décision attendue pourrait apporter des éclairages intéressants sur l’appréciation de la notion de partenariat concernant des enfants et notamment sur le point de savoir si le type de compensation perçu par les enfants influenceurs sera pris en compte.

Face au risque que les enfants influenceurs se trouvent eux-mêmes influencés, les parlementaires ont déposé, le 12 novembre 2021, une proposition de loi visant "à encourager l’usage du contrôle parental sur certains équipements et services vendus en France et permettant d’accéder à Internet". Renforcer la protection des plus jeunes lorsqu’ils utilisent leurs claviers pourrait être une façon de limiter l’impact de ces publicités digitales sur les enfants.

Par ailleurs, rappelons que les publicités déguisées privent les enfants influenceurs des dispositions protectrices du droit du travail dont ils bénéficient depuis la loi n° 2020-1266 du 19 octobre 2020 (pour en savoir plus sur ce statut, vous pouvez consulter notre article "Enfants stars des réseaux sociaux - Adoption d’une loi protectrice visant à encadrer l’exploitation commerciale de leur image").

La chaîne de fast-food a-t-elle fait appel à ces travailleurs d’un type nouveau en omettant de respecter les règles en matière de partenariat ou bien l’enseigne doit-elle s’inquiéter d’un usage illicite de sa marque par de très jeunes youtubeurs ? Ceux-ci ont en effet indiqué, en marge de la plainte introduite par l’UFC-Que Choisir, n’avoir noué aucun accord avec la marque et n’avoir réalisé une vidéo montrant des éléments connus des amateurs de la chaîne qu’à titre de clin d’œil adressé aux gourmets en culottes courtes. Affaire à suivre …


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