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La faute inexcusable de l’employeur et ses conséquences pécuniaires

24/03/2015

La faute inexcusable de l’employeur, consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle, emporte pour celui-ci des conséquences financières dont le coût global peut parfois être très lourd. On observe cependant aujourd’hui que le champ des réparations judiciaires tend à se restreindre.

La faute inexcusable : définition et preuve

La faute inexcusable peut être constituée lorsque l'employeur a eu ou aurait dû avoir conscience ou connaissance du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour préserver l’état de santé ou la sécurité de celui-ci. La Cour de cassation estime, en se fondant sur l'article 1315 du Code civil, que c'est au salarié victime qu'il incombe de démontrer l’existence d’une faute inexcusable imputable à son employeur.

Les conséquences de la faute inexcusable

  • Les préjudices indemnisables

Selon l’article L 452.1 du Code de la sécurité sociale, "lorsque l'accident est dû à la faute inexcusable de l'employeur ou de ceux qu'il s'est substitués dans la direction, la victime ou ses ayants droit ont droit à une indemnisation complémentaire dans les conditions définies aux articles suivants".

La faute inexcusable emporte en premier lieu, au regard de l’article L 452-2 du Code de la sécurité sociale, une majoration de la rente accordée à la victime, laquelle est en principe fixée à son maximum.

Le salarié peut par ailleurs saisir le tribunal des affaires de sécurité sociale et obtenir de ce dernier la condamnation de son employeur à l’indemnisation des différents préjudices visés à l’article L 452-3 du Code de la sécurité sociale, soit plus précisément :

  • le préjudice causé par les souffrances physiques et morales qu’il a endurées, étant précisé qu’aux termes de l’arrêt de la Cour de cassation du 28 février 2013 (n°11-21015), seules les souffrances observées avant la consolidation peuvent donner lieu à réparation. La Haute Cour a ainsi censuré la décision de la Cour d’appel qui a accordé une indemnisation au titre des souffrances physiques ou morales, sans avoir vérifié qu’elles n’étaient pas déjà dédommagées au titre du déficit fonctionnel permanent. En effet ce dernier, qui a déjà été réparé par l’attribution de la rente (Cass. civ. 2e 4 avril 2012, n°11-15393) couvre notamment les douleurs permanentes ressenties par la victime après consolidation ;
  • son préjudice esthétique ;
  • son préjudice d'agrément, lequel s’entend, aux termes de l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 7 mai 2014 (n°12-23962), de "l'impossibilité de continuer à pratiquer une activité spécifique sportive ou de loisirs". Ce qui suppose que le salarié doit être en capacité de démontrer qu’il exerçait de telles activités antérieurement à la maladie qu’il a déclarée ou à l’accident dont il a été victime ;
  • le préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle, étant noté qu’une telle réparation ne peut être octroyée qu'à la condition que l'intéressé produise les éléments établissant que ses chances avaient un caractère sérieux et certain et n'étaient pas seulement hypothétiques. A noter toutefois que si la victime est atteinte d'un taux d'incapacité permanente de 100%, il lui sera alloué, en outre, une indemnité forfaitaire égale au montant du salaire minimum légal en vigueur à la date de consolidation.

D’autres sources de préjudices, non visées par l’article L 452-3 du Code de la sécurité sociale, peuvent également donner lieu à réparation. Le Conseil Constitutionnel, dans une décision du 18 juin 2010, a estimé en effet que les dispositions de cet article "(...)ne sauraient (...), sans porter une atteinte disproportionnée au droit des victimes d’actes fautifs, faire obstacle à ce que ces mêmes personnes (…), puissent demander à l’employeur réparation de l’ensemble des dommages non couverts par le Livre IV du Code de la sécurité sociale». Les dispositions "du Livre IV du Code de la sécurité sociale" s’entendent concrètement, en l’état de la législation, des articles L 411-1 à L 482-5 dudit Code ainsi que des dispositions règlementaires qui y sont attachées. Peuvent être ainsi visés, à titre d’illustration, le préjudice sexuel et le déficit fonctionnel temporaire.

  • Les préjudices non indemnisables

Sont en revanche exclus du droit à indemnisation, par exemple, les frais médicaux, chirurgicaux ou pharmaceutiques les frais de transport ou de déplacement, la réadaptation ou la rééducation fonctionnelle, les pertes de gains ou de revenus professionnels, l’incidence professionnelle de l’incapacité, le déficit fonctionnel permanent, l’assistance à une tierce personne, les dépenses d’expertise technique, les avantages complémentaires stipulés au profit des victimes d'accident du travail et assurés par l'employeur ou les institutions de prévoyance (mutuelle, prévoyance), les frais funéraires, etc. en tant qu’ils reposent sur des dispositions se trouvant sous le Livre IV précité ou qu’ils sont déjà réparés via la majoration de la rente.

On le voit, l’employeur s’expose, dans l’hypothèse où une faute inexcusable serait reconnue à son encontre, à un coût global financier qui peut, dans certaines situations (décès du salarié, maladie engendrant de terribles souffrances, section de membres, etc.) être extrêmement onéreuses, même s'il vient d’être vu qu’un certain nombre de préjudices exposés par le salarié victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ne peuvent donner lieu à réparation judiciaire. De son côté, le salarié doit faire preuve de mesure et de discernement dans l’établissement des demandes d’indemnisation qu’il entend formuler devant le tribunal des affaires de sécurité sociale. A titre d’illustration, un journaliste présentant une ancienneté de plus de 20 ans, victime d’une maladie professionnelle (stress post-traumatique) a sollicité la condamnation de son employeur à une indemnisation globale, toutes causes de préjudices confondues, équivalente à 400.000 euros. Le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris, après avoir fait application des principes dégagés ci-avant, lui a octroyé, aux termes d’un jugement en date du 1er décembre 2014 (n°12-04656), pour l'ensemble des préjudices, la somme de 16.320 euros !  

Article paru dans le magazine Décideurs d'Avril 2015


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