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Le Conseil d'Etat précise la notion de déchet

l'intention de se défaire du déchet est déterminante

28/01/2022

Par un arrêt rendu le 24 novembre 2021, le Conseil d’Etat a apporté des précisions importantes sur la notion de déchet en matière de police des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE).

En l’espèce, la société Ahouandjinou exerce une activité de vente et d’export de pneus usagés qu’elle acquiert auprès de centres de véhicules hors d’usage (VHU) et qu’elle stocke dans un entrepôt situé sur le territoire de la commune de Saint-Apollinaire.

A la suite d’une visite de l’entrepôt par les services de l’inspection des ICPE, le préfet de la Côte d’Or a, par un arrêté du 3 juin 2016, mis en demeure la société Ahouandjinou de régulariser sa situation en déposant une déclaration au titre de la rubrique n° 2714 de la nomenclature des ICPE (qui visait, dans sa rédaction en vigueur à la date de l’arrêté, les "Installations de transit, regroupement ou tri" de différents types de déchets non dangereux, comme le caoutchouc), accompagnée d’une demande d’agrément préfectoral pour la collecte de déchets pneumatiques tel que prévu à l’article R. 543-145 du Code de l’environnement. Dans l’attente de cette régularisation, le préfet a interdit à la société de collecter et d’exporter des déchets de pneumatiques.

Le tribunal administratif (TA) de Dijon a, par un jugement du 10 juillet 2017, rejeté la demande de la société tendant à l’annulation de l’arrêté préfectoral. Mais par un arrêt rendu le 22 octobre 2019, la cour administrative d’appel (CAA) de Lyon a annulé ce jugement et l’arrêté préfectoral, considérant que les pneus usagés n’étaient pas des déchets en l’espèce.

La question à laquelle devait ainsi répondre le Conseil d’Etat, saisi d’un pourvoi en cassation formé par la ministre de la Transition écologique et solidaire, était celle de savoir si les pneumatiques stockés par la société devaient être considérés comme des déchets du caoutchouc.

Le Conseil d’Etat a commencé par rappeler la définition du terme "déchet" donnée par la directive n° 2008/98/CE du 19 novembre 2008 et transposée par l’article L.541-1-1 du Code de l’environnement, selon lequel constitue un déchet "toute substance ou tout objet, ou plus généralement tout bien meuble, dont le détenteur se défait ou dont il a l’intention ou l’obligation de se défaire".

Sur le fondement de cette disposition, le Conseil d’Etat a rejeté l’analyse de la CAA en ce qu’elle avait estimé "pour annuler l’arrêté litigieux, que des pneumatiques ne pouvaient pas être regardés comme des déchets s’ils n’avaient pas été recherchés comme tels dans le processus de production dont ils sont issus" (CE, 24 novembre 2021, n° 437105).

Ainsi que le rappelle le Conseil d’Etat, l’article L. 541-1-1 précité du code de l’environnement se borne à définir le déchet comme un "bien dont son détenteur se défait ou dont il a l’intention de se défaire" : il s’agit donc de savoir si le détenteur des pneus a entendu s’en défaire ou non et non pas de vérifier si l’on a affaire à un sous-produit non-recherché d’une production comme les résidus d’une installation classée.

La Haute juridiction précise que dès lors que les centres de VHU se défont auprès de la société Ahouandjinou des pneus usagés, ces derniers acquièrent la qualité de déchets, "la circonstance qu’ils aient une valeur commerciale et soient susceptibles de donner lieu à une réutilisation économique étant à cet égard inopérante".

Le Conseil d’Etat a ainsi suivi son rapporteur public, Stéphane Hoynck, qui indique dans ses conclusions que le fait "de savoir si le détenteur des pneus a entendu s’en défaire" est central dans la définition du déchet et que, de fait, "la possibilité de réutilisation d’un produit ne suffit pas à exclure la qualification de déchet". L’élément de certitude est ainsi déterminant.

Enfin, le Conseil d’Etat ajoute que la société n’a apporté à l’appui de son argumentation aucun élément permettant de soutenir que les pneus stockés seraient dans un état assurant de façon certaine leur réutilisation dans l’usage initial, sans transformation ou réhabilitation préalable, et qu’ils auraient ainsi perdu la qualité de déchets.
 
Par conséquent, le Conseil d’Etat considère que les pneus usagés sont des déchets pneumatiques et juge ainsi que l’activité de stockage de ces pneus est soumise à la règlementation ICPE (rubrique 2714) et à l’agrément prévu à l’article R. 543-145 du Code de l’environnement.

L'équipe de droit de l'environnement de CMS Francis Lefebvre est à votre disposition pour toute question.


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