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Les causes d’annulation des élections professionnelles récemment rappelées par la Cour de cassation

07/02/2017

La lecture de la série d’arrêts rendus par la Cour de cassation le 7 décembre 2016 conduit à observer que les causes d’annulation des élections sont diverses et portent de plus en plus sur des irrégularités d’apparence minimes et/ou formelles. Certaines de ces irrégularités sont classiques (l’absence par l’employeur de son obligation de neutralité, mais encore faut-il savoir qui est censé incarner l’employeur), d’autres sont plus surprenantes (absence de consultation des délégués du personnel préalablement à la mise en place de la délégation unique du personnel, signature du procès-verbal par les membres du bureau de vote après –et non avant- l’annonce des résultats).

L’employeur doit donc, pour limiter les risques d’annulation des élections professionnelles qu’il met en place pour la première fois ou qu’il renouvelle, et par la même le coût financier qu’une telle organisation peut représenter, faire preuve de vigilance et de rigueur.

Les situations qui vont suivre en sont une bonne illustration.

1. La nécessaire consultation des délégués du personnel (et du comité d’entreprise) lors de la mise en place d’une délégation unique du personnel

Dans une affaire tranchée par la Cour de cassation le 7 décembre 2016 (n°15-25317) un employeur avait mis en place une délégation unique du personnel (DUP) sans avoir, au préalable, consulté les délégués du personnel.

Plusieurs salariés ont saisi le tribunal d’instance aux fins de solliciter l’annulation des élections ainsi intervenues dans le cadre de la DUP, motif pris de l’absence de consultation des délégués du personnel.

Considérant qu’une organisation syndicale (CGT) avait été avisée de l’instauration de la DUP, préalablement à sa mise en place effective, le tribunal d’instance a débouté les salariés de leur demande d’annulation.

Aux termes de son arrêt précité du 7 décembre 2016, la Haute Cour en a jugé autrement. Elle a considéré en effet que, puisque l’article L 2326-1 du Code du travail impose la consultation préalable des délégués du personnel et, s’il existe, du comité d’entreprise avant la mise en place d’une DUP, le non-respect de cette double consultation doit conduire à l’annulation des élections professionnelles.

A noter que, depuis la loi Rebsamen du 17 août 2015, il y a lieu pour l’employeur de consulter également, préalablement, le CHSCT avant la mise en place de la DUP « élargie ».

Relevons également, à toutes fins, que l’absence de consultation de l’une des trois institutions représentatives du personnel précitées est de nature à constituer un délit d’entrave.

2. L’obligation de neutralité de l’employeur

Il est de jurisprudence constante que l’employeur est tenu, lors des élections professionnelles, de respecter une obligation de neutralité et de ne prendre aucune initiative qui puisse entraver la liberté du vote. Le non-respect par l’employeur de cette obligation est de nature à emporter l’annulation des élections, et ce indépendamment de l’influence qu’elle a pu avoir sur les résultats.

A titre d’illustration, il vient d’être jugé qu’a manqué à son obligation de neutralité, laquelle emporte l’annulation des élections professionnelles, l’employeur qui a diffusé, la veille du scrutin, une note de service contenant une critique des membres du CHSCT, adhérents pour l’essentiel des syndicats ayant sollicité l’annulation des élections, et qui étaient aisément identifiables (Cass. soc. 9 novembre 2016, n°15-28461).

Si le principe de l’obligation de neutralité est acquis, il reste à savoir à qui elle s’impose précisément, la notion d’employeur étant assez générale et générique.

A titre d’exemple, dans une affaire évoquée par la Haute Cour le 7 décembre 2016 (n°15-27715), un cadre responsable de réseau avait adressé un mail à plusieurs établissements, dans lequel figuraient des informations visant les relations entre l’entreprise et les candidats aux élections (en particulier les têtes de listes).

Le tribunal d’instance, saisi d’une demande d’annulation des élections intervenues dans ce contexte, a annulé lesdites élections en s’appuyant sur la fiche de fonction de ce cadre, laquelle faisait ressortir qu’il avait un rôle fondamental dans la gestion du personnel et un pouvoir hiérarchique de nature à influencer le comportement des électeurs, puisqu’il décidait des évolutions du personnel et recrutait sur certains postes.

La Cour de cassation a censuré cette analyse. Elle a estimé en effet que seuls les salariés dotés de pouvoirs de direction ou titulaires d’une délégation écrite d’autorité permettant de les assimiler à l’employeur étaient assujettis à une obligation de neutralité, ce que le tribunal d’instance s’est abstenu de vérifier.

3. La signature du procès-verbal des élections avant l’annonce des résultats

L’article R67 du Code électoral prévoit, notamment, que le procès-verbal des élections doit être signé par tous les membres du bureau de vote avant la proclamation des résultats.

Qu’en est-il lorsque la signature desdits membres du bureau de vote intervient après la proclamation ? Une telle « irrégularité » est-elle susceptible d’emporter l’annulation des élections professionnelles en tant qu’elle constituerait une entorse au principe général du droit électoral ?

Dans un arrêt qu’elle a rendu le 7 décembre 2016, la Cour de cassation a répondu par l’affirmative et a fait preuve, sur ce point, d’une réelle rigidité. Ce alors que, dans le même temps et sur des sujets similaires, le Conseil d’Etat (en matières d’élections professionnelles) et le Conseil constitutionnel (en matière d’élections politiques) font preuve de moins de formalisme.

En statuant de la sorte, la Cour de cassation maintient le cap de la position qu’elle a précédemment adoptée en jugeant que les élections professionnelles devaient être annulées en l’absence par exemple de signature de la liste d’émargement par les membres du bureau de vote (Cass. soc. 30 septembre 2015, n°14-25925) ou la rédaction du procès-verbal par un tiers non électeur (Cass. soc. 2 juillet 2014, n°13-60218).

4. De la rigidité … à la souplesse

La Cour de cassation a fait preuve en revanche d’un peu de souplesse en considérant, dernièrement :

  • qu’une liste de candidats aux élections professionnelles pouvait comprendre un nombre de candidats inférieur au nombre de sièges à pourvoir, et qu’un salarié pouvait se porter candidat à une même fonction en qualité de titulaire et de suppléant (Cass. soc. 9 novembre 2016, n°16-11622) ;
  • qu’un syndicat constitué depuis moins de deux ans pouvait présenter des candidats au second tour des élections professionnelles (Cass. soc. 18 janvier 2017, n°15-28884). Les candidatures au second tour étant libres, elles peuvent émaner d’un syndicat non représentatif. Les règles applicables au premier tour des élections consacrant le monopole des organisations syndicales (organisations syndicales représentatives au niveau de l’entreprise ou de l‘établissement ; organisations qui remplissent cumulativement les critères d’ancienneté de deux ans, de respect des valeurs républicaines et d’indépendance, de champ de compétence géographique et professionnel ; syndicats ayant créé une section syndicale ; syndicats affiliés à une organisation syndicale représentative au niveau national et interprofessionnel) ne le sont pas pour le second tour.


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