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Modification d’un plan d’AGA et risque de déqualification du plan

24/03/2023

Les attributions gratuites d’actions (AGA) réalisées dans les conditions définies aux articles L.225-197-1 et s. du Code de commerce (plan dit « qualifiant ») bénéficient d’un régime social et fiscal de faveur. Ces attributions sont ainsi exclues de l’assiette des cotisations sociales1 mais soumises à des contributions sociales spécifiques2 et l’imposition du gain d’acquisition3  est reportée à l’année de cession des actions4 . Juridiquement, les conditions et, le cas échéant, les critères d’attribution gratuite des actions, sont fixés par le conseil d’administration ou le directoire, dans les limites de l’autorisation donnée par l’AGE5. Cet organe dispose d'une relative liberté et peut ainsi prévoir, en dehors des conditions liées notamment aux périodes d’acquisition et de conservation, des conditions de performance.

La vie des affaires peut entraîner une volonté de modifier les conditions d’un plan d’AGA en cours. Se pose alors la question de savoir (i) si une telle modification est possible et (ii) si elle est de nature à remettre en cause le régime fiscal et social de faveur.

Sur le premier point, le comité juridique de l’ANSA a récemment confirmé la position retenue par la pratique, après avoir été interrogé sur la possibilité de raccourcir la période d’acquisition d’un seul bénéficiaire6. Il a considéré que : « le conseil [d’administration] dispose légalement des pouvoirs de fixer les conditions d’attribution, ce qui inclut, le cas échéant, celui de les modifier, que cette hypothèse ait été prévue initialement ou pas » dans le plan. Les modifications doivent toutefois être conformes à l’autorisation donnée par l’AGE et à l’intérêt social7. Aussi, juridiquement, des ajustements d’un plan d’AGA en cours sont possibles sans entraîner sa déqualification. A titre pratique, il est cependant recommandé de prévoir cette faculté de modification dans le règlement du plan avec, le cas échéant, l’accord du bénéficiaire si cette modification est en sa défaveur.

S'agissant du second point, fiscalement, la doctrine administrative ne traite que du cas des ajustements de plans opérés dans le cadre d’opérations de restructuration. Elle précise ainsi que certaines opérations de restructuration expressément visées par le Code de commerce sont intercalaires lorsqu’elles sont réalisées pendant la période d’acquisition, sous réserve, en particulier que « les critères initiaux d’acquisition définitive, notamment ceux liés à la performance, soient adaptés de manière à conserver l’esprit des critères initiaux »8 . L’hypothèse d’une modification du plan d’AGA n’est en revanche pas abordée par la doctrine administrative fiscale.

Par extension de la doctrine applicable aux cas de restructurations, les modifications des conditions du plan, comme par exemple, celles concernant les critères de performance en cas de changement du portefeuille d’actifs de la société ou de baisse d’activité exceptionnelle (ex. période Covid), ne devraient pas remettre en cause le régime fiscal de faveur dès lors que l’esprit des critères initiaux serait conservé9. A défaut, en cas de modification substantielle du plan, la pratique majoritaire estime qu’il existe un risque que les administrations fiscale et sociale considèrent que la modification est telle qu’elle a entraîné la création d’un nouveau plan (i.e., novation du plan) faisant démarrer une nouvelle période d’acquisition (et donc une déqualification en cas d’événement de liquidité pendant cette nouvelle période).

Il devrait toutefois être possible d'opposer le fait que les textes fiscaux et sociaux conditionnent l’application du régime de faveur au fait que les AGA aient été réalisées conformément au cadre légal fixé par le Code de commerce. Or, dans la mesure où juridiquement, des ajustements d’un plan d’AGA en cours sont possibles sans entraîner sa déqualification, les régimes fiscaux et sociaux devraient en principe s’aligner.

Dans l’attente d’une éventuelle précision de l’administration sur ce sujet, il convient de rester vigilant sur les conséquences fiscales et sociales des modifications de plan en cours et de se réserver des arguments en prenant certaines précautions dans la rédaction du plan d’AGA.

Article paru dans Option Finance le 13/03/2023


[1] Exclusion conditionnée au respect d’obligation déclarative par l’entreprise (articles L.242-1 et L.242-14 du CSS). 
[2] Contribution sociale patronale au taux de 20 % (art. L.137-13 du CSS) et contribution sociale salariale au taux de 10 % (art. L.137-14 du CSS).
[3] Egal à la valeur des actions à leur date d'attribution définitive.
[4] Article 80 quaterdecies du CGI. 
[5] Article L.225-197-1 du Code de commerce.
[6] Communication ANSA, comité juridique n° 22-033 du 06/07/2022.
[7] Ainsi qu'à la politique de rémunération lorsque la société a des actions admises aux négociations sur un marché réglementé, conformément à l'article L. 22-10-59 du Code de commerce.
[8] BOI-RSA-ES-20-20-10-20-24/07/2017, n°150.
[9] Il devrait en aller de même du point de vue social même si les textes sont silencieux à cet égard.


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