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Pratiques anticoncurrentielles - Procédure d’engagements devant l’Autorité de concurrence

Conformité à la Constitution

12/05/2023

Le Conseil constitutionnel a déclaré que la procédure d’engagements devant l’ADLC ne méconnaît ni le principe d’impartialité ni le droit à un recours juridictionnel effectif (Décision n° 2022-1035 QPC du 10 février 2023)

L’Autorité de la concurrence peut accepter les engagements proposés par des entreprises qui sont susceptibles de mettre un terme à ses préoccupations de concurrence concernant des pratiques susceptibles d’être anticoncurrentielles (art. L. 464-2, I al. 1er C. com.). Lorsque ces engagements lui paraissent insuffisants, elle peut ne pas les accepter et décider de renvoyer le dossier à l’instruction en vue de l’application de sanctions pécuniaires si la pratique illicite est avérée.

Une décision de refus d’acceptation d’engagements

Une société suspectée de pratiques anticoncurrentielles avait vu sa proposition d’engagements refusée par l’ADLC.

Elle avait alors contesté cette décision devant la cour d’appel de Paris, laquelle avait déclaré son recours irrecevable au motif que seules les décisions d'acceptation des engagements sont visées par l’article L. 464-8 du Code de commerce comme étant susceptibles de recours, à l'exclusion de celles portant refus desdits engagements tout en relevant que les entreprises ne disposent pas d'un droit aux engagements en raison du pouvoir discrétionnaire dont jouit l’Autorité en la matière (Cass. com. 2 septembre 2020 n°18-18.501).

Devant la Cour de cassation, la société avait soulevé une question prioritaire de constitutionnalité portant sur la conformité de la procédure d’engagements :

  • au principe d'indépendance et d'impartialité dans la mesure où les rapporteurs et les membres du collège, qui participent à la procédure d'engagements, peuvent se forger une opinion sur les pratiques en cause, susceptibles de justifier l'ouverture d'une procédure de sanction en cas d'échec des négociations.
  • au principe du respect des droits de la défense, dès lors qu’il n’est pas prévu que les documents et déclarations présentés dans le cadre de la procédure d’engagements ne pourront pas être utilisés à l’encontre de l’entreprise mise en cause en cas de procédure de sanction.
  • et au principe du droit à un recours juridictionnel effectif contre une décision de l’ADLC de refus d’acceptation des engagements proposés.

Pas d’atteinte au principe de séparation des pouvoirs ni au principe d’impartialité

Le Conseil constitutionnel a écarté toute atteinte au principe de séparation des pouvoirs, garanti par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, après avoir énoncé que « le principe de la séparation des pouvoirs, ni aucun autre principe ou règle de valeur constitutionnelle, ne font obstacle à ce qu’une autorité administrative ou publique indépendante ou une autorité administrative non soumise au pouvoir hiérarchique du ministre, agissant dans le cadre de prérogatives de puissance publique, puisse prononcer des sanctions ayant le caractère d’une punition dans la mesure nécessaire à l’accomplissement de sa mission, dès lors que l’exercice de ce pouvoir respecte notamment le principe d’impartialité découlant de l’article 16 de la Déclaration de 1789 ».

Le Conseil a ensuite estimé que la circonstance que l’ADLC pourrait avoir à connaître des mêmes faits dans le cadre d’une procédure de sanction faisant suite à une décision de refus d’acceptation d’engagements ne porte pas atteinte au principe d’impartialité.

Il justifie sa position par le fait que les dispositions de l’article L. 464-2, I du Code de commerce se bornent à permettre à l’ADLC d’apprécier la suite à donner aux propositions d’engagements qui lui sont présentées pour remédier à des situations susceptibles d’être préjudiciables à la concurrence, sans qu’il soit établi que de telles situations constituent, en l’état, des pratiques prohibées.

A cet effet, il renvoie à la jurisprudence constante de la Cour de cassation selon laquelle la procédure d’engagements n’a pas pour objet de prouver ou d’écarter la réalité et l’imputabilité d’infractions au droit de la concurrence en vue de les sanctionner, mais uniquement de vérifier que les propositions d’engagements présentées par l’entreprise permettent de mettre fin aux préoccupations de concurrence identifiées par l’Autorité de la concurrence, sans préjuger de la réalité ni qualifier les faits.

Pas d’atteinte au droit à un recours juridictionnel effectif

Le Conseil constitutionnel a certes écarté l’existence de toute atteinte à ce droit mais après avoir énoncé qu’ « au regard des conséquences qu’est susceptible d’entraîner pour l’entreprise en cause le refus d’acceptation d’engagements, ce refus doit être regardé comme une décision susceptible de faire l’objet d’un recours en application de l’article L. 464-8 du code de commerce».

Sans avoir à procéder à une réserve d’interprétation de l’article L. 464-8 du Code de commerce, et en se prononçant au regard du premier alinéa du paragraphe I de l’article L. 464-2 du même Code, le Conseil constitutionnel autorise expressément de manière inédite la cour d’appel de Paris – dont il censure indirectement le raisonnement - à connaître du recours contre les décisions de refus d’engagements.


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