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Surveillance policière par drones

Le dispositif constitue bien un traitement de données à caractère personnel

23/06/2020

Dans le contexte d’urgence sanitaire, l’ordonnance rendue par le Conseil d’État le 18 mai 2020 rappelle les principes fondateurs en matière de protection des données à caractère personnel.

Le 18 mars 2020, la préfecture de police de Paris a institué un dispositif de surveillance aérien visant à capturer des images par drones et à les exploiter afin de faire respecter les mesures de confinement. Cette surveillance s’est prolongée à l’occasion du plan de déconfinement.

Sur le fondement du droit au respect de la vie privée et du droit à la protection des données personnelles, deux associations ont saisi le juge des référés du tribunal administratif de Paris d’une requête tendant à suspendre ce dispositif, à faire cesser la captation, l’enregistrement, la transmission et l’exploitation des images par drones, ainsi qu’à détruire les images déjà capturées.

Par ordonnance du 5 mai 2020, le Tribunal administratif a rejeté la requête, considérant que la collecte, l’enregistrement provisoire et la transmission d’images captées par drones ne constituaient pas un traitement de données à caractère personnel (TA Paris, ord., 5 mai 2020, n°2006861/9).

Les juges de première instance ont retenu qu’en matière de police administrative "il ne [résultait] d’aucune des pièces du dossier que les services de la préfecture de police auraient utilisé les drones dans des conditions permettant d’identifier les individus au sol", et qu’en matière de police judiciaire, "il n’[était] pas non plus établi ni soutenu que les appareils auraient été utilisés dans un tel cadre, depuis le début du confinement". Selon le Tribunal, en l’absence de tels éléments, la préfecture de police n’aurait pas procédé à un traitement de données à caractère personnel quand bien même elle aurait "procédé à la collecte, à l’enregistrement provisoire et à la transmission d’images".

Les associations requérantes ont relevé appel de cette ordonnance. L’affaire a donc été portée devant le Conseil d’Etat, comme c’est toujours le cas en matière de référé.

Par ordonnance du 18 mai 2020, le Conseil d’État a infirmé la position du Tribunal administratif jugeant qu’un dispositif de surveillance policière utilisant la captation d’images de personnes par drones constituait bien un traitement de données à caractère personnel devant être assorti d’un certain nombre de garanties pour être licite (CE, ord., 18 mai 2020, n° 440442 et 440445).

Selon la Haute juridiction, le visionnage en temps réel de secteurs situés sur la voie ou dans les espaces publics à une hauteur allant jusqu’à quatre-vingts mètres, est susceptible de permettre d’identifier des personnes physiques. Il sera rappelé en effet qu’un simple accès à des données à caractère personnel constitue un traitement. La conservation ou non des données de même que la volonté effective ou non d’identification des personnes physiques sont indifférentes.

Le Conseil d’Etat précise que ce traitement mis en œuvre pour le compte de l’Etat relève des dispositions de la directive 2016/680 du 27 avril 2016, puisque la surveillance policière par drones entre dans le cadre de mesures de protection prises par une autorité compétente contre les menaces pour la sécurité publique et la prévention de telles menaces, telles que prévues par l’article 1er de la directive.

Toutefois, le simple fait que la captation d’images par drones constitue un traitement de données personnelles n’est pas, dans son principe, illicite.

Le Conseil d’État relève ainsi que la finalité poursuivie par le dispositif litigieux qui est, en particulier dans les circonstances actuelles, nécessaire pour assurer la sécurité publique, est légitime : à savoir informer l’état-major de la préfecture de police afin que puisse être décidée le cas échéant la dispersion d’un rassemblement ou l’évacuation des lieux fermés au public. Le dispositif de surveillance n’est pas non plus "de nature à porter, par lui-même, une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales invoquées".

Dès lors, pour que le traitement soit licite, il est nécessaire :

  • soit, conformément à l’article 31 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 "Informatique et Libertés", d’autoriser ce traitement par l’intervention d’un texte règlementaire, pris après avis motivé de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), et de fixer les garanties dont il doit être entouré ;
  • soit de doter les appareils utilisés par la préfecture de police de dispositifs techniques de nature à rendre impossible, quels que puissent en être les usages retenus, l’identification des personnes filmées.

En l’absence de telles garanties, la Haute juridiction ne pouvait qu’enjoindre à l’Etat de cesser, sans délai, de procéder aux mesures de surveillance policière par drones.

En réaction à l’ordonnance de référé du Conseil d’État, la CNIL a indiqué s’interroger sur ces pratiques et avoir, depuis le 23 avril 2020, diligenté des contrôles tant "auprès du ministère de l’Intérieur concernant l’usage de drones dans plusieurs villes" qu’auprès "de plusieurs communes dont les polices municipales ont, elles aussi, semble-t-il, eu recours à des drones".

La CNIL prendra position sur cette question à l’issue des procédures de contrôle en cours.


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