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TVA : quelles conséquences pour les remises de loyer ?

Précisions sur le traitement de la non-perception temporaire de loyers suggérée par le Gouvernement

21/04/2020

Les bailleurs sont incités à renoncer temporairement à la perception de loyers de locaux occupés par des petites entreprises frappées par la crise du Covid-19.

Au plan fiscal, les conséquences d’un tel abandon de loyer pourraient être précisées par le législateur, un amendement décrivant le traitement de ces « abandons de loyers » au regard des impôts directs ayant en effet été voté lors de l’examen du PLFR en première lecture par l’Assemblée nationale.

S’agissant de la TVA, voici quelques éléments de réflexion.

1. Le loyer doit-il être soumis à la TVA ?

Sauf à avoir opté pour les débits, la TVA est exigible lors de l’encaissement du loyer. Un loyer non encaissé ne donne donc pas lieu à collecte de la taxe, y compris s’il est consenti par abandon de la créance de loyer ainsi que l’a jugé le Conseil d’Etat (CE 2 mai 2018 n° 404161). 

L’abandon de créance a fait l’objet de débats en jurisprudence, notamment parce que la cour administrative d’appel de Bordeaux y avait vu un acte de disposition entraînant l’exigibilité de la TVA (7-5-2008 n° 06-1398, 4e ch., Sté Tekoprom). Elle avait en effet estimé que l’abandon de créance revenait à encaisser un instant de raison, pour rendre les fonds un instant de raison plus tard. Ce raisonnement a heureusement été expressément démenti par le Conseil d’Etat dans l’affaire précitée.

Il n’y a pas à collecter de TVA sur les loyers qui, par définition, ne seront jamais perçus.

Le droit à déduction du preneur ne prenant naissance qu’au moment de l’exigibilité de la taxe chez le prestataire, le locataire n’acquiert de son côté aucun droit à déduction au titre des loyers non acquittés.

Lorsque le bailleur a opté pour les débits, la situation est différente car la TVA devient exigible au moment de la constatation de la créance sur le preneur et l’émission corrélative de la facture de loyer. Pour se recréditer de la TVA préalablement collectée, le bailleur renonçant à encaisser le loyer doit en principe respecter la procédure des impayés, ce qui est complexe car elle suppose la démonstration préalable du caractère définitivement irrécouvrable de la créance.

Si la renonciation intervient avant même que ne soit constatée la naissance d’une créance sur le preneur, cela doit en principe éliminer la problématique et conduire à ne jamais rendre la TVA exigible chez le bailleur.

2. La non-perception de loyers entraîne-t-elle des conséquences au regard des droits à déduction du bailleur ?

La non-perception de loyer serait temporaire et ne devrait donc pas être assimilée à une cessation d’affectation de l’immeuble à des opérations soumises à la TVA qui entraînerait une éventuelle régularisation globale de la taxe ayant grevé la construction ou l’acquisition de l’immeuble par le bailleur.

Le caractère temporaire de cette situation pourra être justifié par tout moyen, comme par exemple un avenant au contrat de bail ou tout document établissant les motifs et la durée de la non-perception du loyer.

Y-a-il en revanche lieu d’envisager la taxation d’une prestation à soi-même ?

Nous ne le pensons pas dans le cas d’une renonciation sur un bref laps de temps du loyer convenu par un bail en cours.

Le système de TVA prévoit en effet un mécanisme de correction de la taxe déduite au titre de dépenses utilisées pour rendre des prestations de services à titre gratuit et à des fins étrangères à l’activité de l’assujetti. Cette correction se traduit par la taxation, à son prix de revient, de la prestation gratuite, la taxe grevant cette prestation à soi-même n’ouvrant aucun droit à déduction.

Toutefois, autant cette question mérite d’être soulevée pour les entreprises qui envisagent de mettre gratuitement des locaux à disposition, autant la non-perception de loyers pour trois mois, telle qu’elle est suggérée par le Gouvernement, ne nous paraît pas répondre à l’objectif de ce mécanisme, qui est d’éviter toute consommation en franchise de taxe.

Les circonstances particulières liées à la crise sanitaire pourraient selon nous justifier de ne pas procéder à la taxation de cette livraison à soi-même de services, mais cela mériterait confirmation par l’Administration.

Nous attirons enfin votre attention sur un effet collatéral induit par la non-perception de loyers en principe soumis à la TVA au titre de locaux situés dans un immeuble comportant d’autres locaux donnés en location exonérée.

Au titre de l’année concernée, la non-perception des loyers commerciaux pourrait mécaniquement se traduire par une dégradation du coefficient de taxation servant à la détermination du droit à déduction des frais généraux se rapportant à l’immeuble concerné. Sauf si l’assujetti a fait usage de la faculté offerte par l’Administration de déterminer ce rapport à raison des surfaces de locaux respectivement données en location taxée ou exonérée, le coefficient est déterminé par le rapport entre, au numérateur, le chiffre d’affaires soumis à la TVA et, au dénominateur, le chiffre d’affaires total.  


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