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Google condamnée par la justice française pour clauses abusives et illicites

Lettre Propriétés Intellectuelles | Mai 2019

09/05/2019

En 2014, l’association de consommateurs UFC Que Choisir a assigné en justice Google pour insertion de 209 clauses dans ses conditions d’utilisation et ses règles de confidentialité, considérées comme abusives et illicites.

Par jugement du 12 février 2019, la chambre sociale du tribunal de grande instance de Paris a exigé la suppression d’anciennes clauses contenues dans ces deux corps de règles et a condamné le géant de l’Internet à verser 30 000 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral porté à l’intérêt collectif (TGI Paris, 12 février 2019, UFC-Que Choisir c/ Google Inc.).

Les juges ont adopté un raisonnement en deux temps : 

  • le Tribunal a d’abord appliqué le droit de la consommation à l’ensemble des clauses litigieuses. En effet, si Google offre des services sans paiement monétaire, ils ne sont pas gratuits. Au contraire, la société américaine commercialise à titre onéreux auprès d’entreprises partenaires, publicitaires ou marchandes, des données déposées gratuitement par l’utilisateur à l’occasion de son inscription, de ses navigations ou utilisations de la plate-forme. Ainsi, en exploitant et en valorisant des données collectées gratuitement auprès des utilisateurs, Google agit à des fins commerciales, tire profit de son activité, de sorte qu’elle doit être qualifiée de professionnel au sens du Code de la consommation.  
  • les juges se sont ensuite livrés à une analyse minutieuse des clauses issues de versions successives des conditions d’utilisation et des règles de confidentialité de Google. Au total, 38 clauses ont été déclarées abusives et illicites et donc réputées non écrites.

S’agissant d’abord des règles de confidentialité, le Tribunal relève notamment que : 

  • les clauses relatives à la collecte de données personnelles sont insuffisamment précises en ce qu’elles n’offrent aucune information quant aux destinataires des données partagées par Google, aux modalités des traitements effectués et aux finalités pour lesquelles ces données sont partagées. En définitive, elles ne permettent pas à l’utilisateur de prendre conscience de la portée de son engagement ;
  • les clauses portant sur la géolocalisation des utilisateurs ne prévoient ni le recueil du consentement de l’internaute à ce traitement ni les moyens pour ce dernier de s’y opposer ;
  • les clauses relatives à l’utilisation de cookies doivent, quant à elles, être censurées en ce qu’elles ne permettent pas à l’utilisateur d’exprimer son accord, ni de s’y opposer et ne précisent pas les finalités afférentes à l’utilisation de ces cookies ;
  • s’agissant du transfert des données, la clause qui présume acquis par acceptation implicite le consentement de l’utilisateur au transfert de ses données personnelles vers des pays tiers, sans que ceux-ci ne soient identifiés, doit être déclarée illicite et abusive ;
  • la possibilité que se reconnaît Google d’effectuer un recoupement général de l’ensemble des données personnelles collectées auprès de ses utilisateurs dans le cadre de toutes ses différentes offres de services doit également être déclarée illicite en ce qu’elle postule une véritable présomption du consentement du consommateur ;
  • la clause présentant le droit d’accès des utilisateurs à leurs données comme une simple faculté qui serait consentie par l’opérateur est jugée contraire à l’article 39 de la loi Informatique et libertés. 

Concernant les conditions d’utilisation, les juges retiennent notamment que : 

  • la clause aux termes de laquelle l’inscription suivie de la navigation sur la plate-forme vaut acceptation par l’internaute des conditions d’utilisation du site, sans même qu’il ait pu y avoir accès, est contraire aux dispositions du Code de la consommation ;
  • les clauses visant à concéder à Google une licence d’exploitation mondiale, non exclusive et gratuite, sur l’ensemble des contenus communiqués par l’utilisateur, pendant toute la durée légale de protection des contenus, même si le consommateur cesse d’utiliser les services souscrits, contreviennent au formalisme des articles L.131-1 et suivants du Code de la propriété intellectuelle ;
  • doivent également être réputées non écrites les clauses ayant pour effet d’écarter systématiquement la responsabilité du professionnel en cas de dysfonctionnement des prestations fournies au consommateur, en ce qu’elles tendent à supprimer le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur lors de manquement par le professionnel à l’une de ses obligations. 

Ce jugement s’inscrit dans une série de victoires pour l’association de défense des consommateurs. En effet, en 2014 l’UFC Que Choisir a assigné en justice pour les mêmes raisons les géants Twitter et Facebook. Alors que le tribunal de grande instance de Paris avait déjà condamné le premier, le 7 août 2018, à 30 000 euros de dommages-intérêts au titre du préjudice moral, Facebook vient, à son tour, d’être condamnée pour 430 clauses jugées abusives et illicites.


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