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Renoncer à une clause de non concurrence : attention aux délais !

06/04/2018

Cass. soc., 21 mars 2018, n° 16-21.021

Lorsqu’une clause de non concurrence a été stipulée dans le contrat de travail, il est fréquent qu’un délai soit fixé, soit par le contrat lui-même, soit par un accord collectif, pour permettre à l’employeur de renoncer unilatéralement à son application lors de la rupture du contrat de travail. La fixation du point de départ de ce délai est alors indispensable pour déterminer si l’employeur a régulièrement fait usage de son droit de renonciation.

En l’espèce, le contrat de travail d’une salariée stipulait une clause de non concurrence énonçant que la société se réservait le droit de la "libérer de l’interdiction de concurrence ou d’en réduire la durée en l’informant par écrit dans le délai maximal de 30 jours suivant la fin effective du travail (fin du préavis effectué ou début du préavis non effectué)". Après avoir donné sa démission, la salariée avait délibérément cessé le travail sans respecter le préavis de trois mois auquel elle était tenue et l’employeur l’avait ensuite libérée de son obligation de non concurrence avant l’échéance du terme de ce préavis. Contestant la régularité de la renonciation à la clause de non-concurrence aux motifs que le délai de renonciation courait à compter de la date elle avait effectivement cessé le travail, la salariée avait alors saisi la juridiction prud’homale d’une demande de versement de l’indemnité afférente. Par un arrêt rendu le 21 mars 2018 (n° 16-21.021), la chambre sociale de la Cour de cassation confirme la décision des juges du fond qui pour débouter la salariée de sa demande ont retenu que l’employeur n’avait dispensé la salariée de l’exécution de son préavis de sorte que la levée de la clause qui avait eu lieu au cours de ce préavis était valable.

Ainsi, la Cour de cassation précise qu’en l’absence d’accord de l’employeur concernant le raccourcissement du préavis demandé par le salarié, celui-ci continue à courir et la date de cessation effective du travail demeure fixée à son terme, peu important que le salarié ait unilatéralement décidé de cesser le travail avant cette date.

Par cet arrêt, la chambre sociale vient préciser sa jurisprudence antérieure au terme de laquelle lorsque l’employeur dispense le salarié de l’exécution de son préavis, il doit, s'il entend renoncer à l'exécution de la clause de non-concurrence, le faire au plus tard à la date du départ effectif de l'intéressé de l'entreprise, peu important que le préavis soit toujours en cours et quelles que soient les stipulations sur ce point du contrat de travail ou de la convention collective (Cass. soc., 13 mars 2013, n° 11-21.150 ; Cass. soc., 21 janv. 2015, n° 13-24.471). Elle retient, en effet, qu’une telle solution n’est pas transposable dans le cas où le salarié s’arroge le droit de cesser le travail, sans que l’employeur y ait donné son accord, se plaçant ainsi en situation d’absence injustifiée et s’exposant, de ce fait, à une sanction disciplinaire.

Cette décision est cohérente car on ne saurait admettre dans un tel cas que la date de cessation effective des fonctions fixe le point de départ du délai de renonciation de l’employeur sans reconnaître implicitement au salarié le droit de décider unilatéralement de la date de fin du contrat de travail.

En revanche, lorsque l’employeur et le salarié se mettent d’accord pour raccourcir la durée du préavis, il y a sans doute lieu de considérer, bien qu’il n’existe aucune décision sur ce sujet, que c’est la date de fin du contrat de travail décidée par les parties qui marque le point de départ du délai de renonciation à la clause de non concurrence.

Ces décisions s’appliquent à tous les modes de rupture du contrat qui supposent l’existence d’un préavis comme, notamment, la démission et le licenciement. En revanche, en cas de rupture conventionnelle homologuée, s’agissant d’une clause contractuelle fixant à un délai maximal de quinze jours suivant la première présentation de la notification de la rupture du contrat de travail, le délai de renonciation de l’employeur à la clause de non-concurrence, la chambre sociale a précisé que la date de la rupture, fixée par la convention de rupture, constituait le point de départ du délai (Cass. soc., 29 janv. 2014, n° 12-22.116).

Rappelons enfin que c’est à la date d’envoi de la lettre de renonciation à la clause de non concurrence qu’il conviendra de se placer pour apprécier si celle-ci a bien été effectuée dans le délai prévu par le contrat ou l’accord collectif (Cass. soc., 30 mars 2011, n° 09-41.583).