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La SCI bénéficiaire d’un crédit immobilier est-elle un consommateur ?

12/05/2016

La question de savoir si une SCI peut, lorsqu’elle souscrit un emprunt, être considérée sinon comme un consommateur, du moins comme un non-professionnel, et bénéficier à ce titre des règles protectrices du Code de la consommation (articles L. 312-1 et suivants du Code de la consommation) est plus délicate qu’il n’y paraît. L’approche retenue est ici très restrictive : le crédit consenti ne relèvera pas du droit de la consommation lorsque, par son objet social, la société procure sous quelque forme que ce soit, des immeubles en propriété ou en jouissance.

Peu importe le nombre des immeubles sur lesquels s’exerce cette activité (une SCI dont l’objet social porte sur l’acquisition et la mise en vente d’un seul appartement ne peut pas se prévaloir du bénéfice de la réglementation : Cass. 1re civ. 10 févr. 1993) ; peu importe aussi que le crédit soit consenti à une SCI « familiale » en vue d’acquérir un immeuble n’ayant d’autre finalité qu’un usage familial, si l’objet social est très largement défini (Cass. 1re civ. 14 oct. 2015).

Ni l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 assurant la recodification du Code de la consommation, ni même l’ordonnance n° 2016-351 du 25 mars 2016 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d’habitation ne devraient modifier ces solutions.

L’enjeu du débat est important. Si le prêt consenti relève du Code de la consommation, alors doit s’appliquer l’article L. 137-2 de ce code selon lequel « l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ». En clair, lors d’un incident de paiement, la banque ne peut en aucun cas accorder à l’emprunteur un délai supérieur à deux ans pour régulariser un impayé, sous peine de voir son action prescrite.

Mais que décider lorsque la SCI et la banque ont choisi, comme c’est possible, de soumettre leur convention aux dispositions des articles L. 312-1 et suivants du Code de la consommation (relatifs aux crédits immobiliers) ? Telle était la configuration dans le litige traité par un récent arrêt de la Cour de cassation (Cass. 1re civ., 3 févr. 2016). Pour contrer la procédure de saisie immobilière engagée par la banque, la SCI avait plaidé que l’action était prescrite en application de l’article L. 137-2 ; argument admis par les juges du fond.

Cette solution pouvait en effet s’appuyer sur certains précédents jurisprudentiels ayant décidé que, en cas de recours volontaire aux règles du Code de la consommation relatives au crédit immobilier, alors que le contrat de crédit n’y était pas soumis de plein droit, l’ensemble des dispositions impératives inhérentes à ce régime avait vocation à s’appliquer. Si, donc, les parties ne peuvent, dans ce cas, écarter telle ou telle règle qui ne leur conviendrait pas, ne doit-on pas nécessairement considérer que ce sont aussi les règles de prescription abrégées de l’article L. 137-2 qui doivent s’appliquer ?

La Cour de cassation ne le pense pas et censure la décision d’appel. Selon la Haute juridiction, dès lors qu’il n’avait pas été constaté que la SCI emprunteuse avait la qualité de consommateur, la prescription biennale de l’article L. 137-2 n’avait pas vocation à jouer. Il faut comprendre que, si les parties peuvent conventionnellement se soumettre à un régime dont elles ne ressortissent théoriquement pas, il n’est pas dans leur pouvoir de transformer une SCI en consommateur.

En conséquence, il incombera à la Cour de renvoi de dire si, au regard des critères exposés plus haut (prise en compte du libellé de l’objet social), la SCI peut être considérée comme un emprunteur consommateur. En cas de réponse négative, le régime de prescription applicable sera celui du droit commun inscrit à l’article 2224 du Code civil, à savoir un délai de cinq ans.

Analyse juridique parue dans le magazine Option Finance le 2 mai 2016


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Arnaud Reygrobellet
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