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Donations, cessions : une clarification est-elle souhaitable ?

02/02/2012


On commence par donner un bien à un proche, avant de le céder à un tiers. La méthode est bien connue pour purger la plus-value sur sa vente. Parfois, elle permet de parvenir à une exonération totale d'impôt sur le revenu. Ainsi résumée, cette optimisation encourt certes la critique de l'abus de droit, sauf si la donation est réalisée avec sincérité. En l'occurrence, dès lors que le donateur s'est réellement appauvri, l'opération doit être regardée comme étant régulière, du point de vue fiscal, et cela, quelles que soient par ailleurs les conditions imposées aux donataires.

C'est ce que vient de confirmer le Conseil d'Etat. II a estimé que si les conditions sont licites sur le plan civil et si elles répondent au souci de protection des intérêts familiaux, elles ne justifient en rien une critique fiscale. Il est donc possible de lier la donation à des conditions, comme un droit de retour, une interdiction d'aliéner jusqu'à un certain âge, une exclusion de communauté, une obligation d'apporter à une société familiale à première demande du donateur, ou de placer le produit de la vente, etc.

De même, le très bref délai écoulé entre la donation et la vente ne caractérise aucunement l'existence d'un quelconque abus (arrêt n° 330940 du 30 décembre 2011). En outre, l'affaire en cause comportait une particularité qui renforce encore l'intérêt de cette décision : le donateur avait racheté auprès des donataires, par l'intermédiaire d'une société qu'il détenait par ailleurs, les titres qui faisaient objet de la donation. Ainsi, il avait pu conserver le contrôle du bien. Pour autant, le Conseil d'Etat a pu constater que les donataires avaient bien encaissé le prix de la cession des titres.

Certes, ces derniers n'étaient passés que furtivement dans leur patrimoine, mais ils y avaient bien transité.

Implicitement mais nécessairement, le donateur s'est appauvri à concurrence du prix acquitté par la société. La reprise indirecte du contrôle du bien donné est donc possible.

Elle ne doit pas être confondue avec la réappropriation par le donateur du produit de la vente du bien. Là, pour le coup, cette manoeuvre est radicalement condamnable !


Par Luc Jaillais, avocat associé, membre du Cercle des Fiscalistes

La question de fiscalité parue dans Les Echos du 2 février 2012

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Luc Jaillais
Associé
Paris