Dans un arrêt du 19 septembre 2019 (n°18-16.986) promis à une large diffusion, la Cour de cassation a précisé les conditions d’application de la garantie décennale en présence d’une non-conformité de l’immeuble aux normes parasismiques.
La question de l’applicabilité des normes parasismiques aux travaux sur existants
Dans le cadre de travaux de transformation d’une ferme en appartements locatifs, une SCI confie différents lots à deux entreprises. Invoquant la non-conformité du bâtiment rénové aux normes parasismiques, la SCI assigne les deux entreprises et leurs assureurs en indemnisation.
- La position de la Cour d’appel
Pour la Cour : au vu de la date de délivrance du permis de construire, le chantier était soumis aux normes parasismiques prévues par le décret n°91-461 du 17 mai 1991 et l’arrêté du 29 mai 1997 pris pour son application.
Les travaux réalisés impliquaient des « modifications importantes des structures des bâtiments existants ».
L’existence d’un désordre décennal devait en être déduite.
- Le pourvoi en cassation des défendeurs
Ils reprochent à la Cour d’appel de ne pas avoir précisé les travaux énumérés par l’arrêté de 1997 constitutifs de « modifications importantes des structures des bâtiments existants ». Ils considèrent que les travaux réalisés ne seraient en réalité pas soumis au respect des normes parasismiques.
Les normes parasismiques sont applicables aux travaux litigieux
La Cour de cassation rejette le pourvoi. Elle retient :
« qu’ayant relevé que le décret du 14 mai 1991, modifié par celui du 13 septembre 2000 rendait les normes parasismiques applicables aux modifications importantes des structures des bâtiments existants et constaté que les travaux réalisés par la SCI avaient apporté de telles modifications, la cour d’appel, qui en a exactement déduit que ces normes devaient s’appliquer, a légalement justifié sa décision ».
Retour sur les règles prétoriennes applicables en matière de non-respect des normes parasismiques
L’applicabilité de la garantie décennale, en cas de non-conformité aux normes parasismiques suscite de nombreux contentieux. L’arrêt commenté est l’occasion de revenir sur les principes issus des jurisprudences les plus récentes :
- Sauf stipulations contractuelles contraires, le non-respect des normes parasismiques peut constituer un désordre décennal seulement si ces normes présentaient un caractère obligatoire à la date de délivrance du permis de construire (Cass. 3e civ., 1 décembre 2010, n°09-15.282).
- En matière de constructions neuves, il a été jugé que le non-respect des normes parasismiques constitue un désordre décennal s’il porte sur des éléments essentiels de la construction et présente un risque de destruction de l’ouvrage en cas de séisme (Cass. 3e civ., 25 mai 2005, n°03-20.247) et/ou fait courir un danger important aux personnes (Cass. 3e civ., 7 octobre 2009 n°08-17.620). Dans un arrêt du 11 mai 2011 (n°10-11.713), la Cour de cassation avait adopté une position très rigoureuse en considérant que « le dommage consistant dans la non-conformité de l’ouvrage aux règles parasismiques obligatoires (…), facteur certain de risque de perte par séisme, compromet sa solidité et [le] rend impropre à sa destination ». Mais plus récemment, la Haute juridiction est revenue à une appréciation in concreto et a écarté la garantie décennale au profit de la responsabilité contractuelle du constructeur dans une situation où les non-conformités n’étaient pas significatives (Cass. 3e civ., 5 juillet 2018, n°17-17.902). En matière de travaux sur existants, l’arrêt commenté rappelle que ces derniers ne sont pas toujours exempts du respect des normes parasismiques. Par référence au décret de 1991, la Cour de cassation retient que cette obligation s’applique en présence de travaux apportant des modifications importantes aux structures des bâtiments existants. Ainsi, désormais, tant en matière de constructions neuves qu’en matière de travaux sur existants, la Cour de cassation demande aux juges du fond de se livrer à une appréciation in concreto des éléments à leur disposition.
- La non-conformité aux normes parasismiques n’entraîne pas nécessairement la destruction-reconstruction de l’immeuble si d’autres solutions permettent de réparer intégralement le préjudice du maître d’ouvrage et apportent des garanties suffisantes (Cass. 3e civ., 14 février 2019, n°18-11.836).
Actualité du droit immobilier & construction
Cet article a été publié dans notre Lettre Promotion-Urbanisme de décembre 2019. Cliquez ci-dessous pour découvrir les autres articles de cette lettre.
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