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Un nouvel instrument pour l'épargne immobilière : l'OPCI

31/03/2006

Les règles de fonctionnement des sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) se sont révélées trop rigides pour satisfaire pleinement aux attentes des épargnants tentés par la "pierre-papier". L'ordonnance du 13 octobre 2005 offre une nouvelle formule, celle de l'organisme de placement collectif immobilier, appellation qui regroupe deux types d'entités :

  • la société de placement à prépondérance immobilière à capital variable (SPPICAV), société anonyme soumise aux règles du Code de commerce et du Code monétaire et financier ;
  • le fonds de placement immobilier (FPI), simple copropriété sans personnalité morale constituée par une société de gestion et placée sous le contrôle d'un conseil de surveillance.

Ces organismes ont en commun d'être à capital variable et de faire appel public à l'épargne ; ils seront constitués et fonctionneront sous le contrôle de l'AMF.
Ils ne pourront voir le jour qu'après la publication des décrets d'application de l'ordonnance et l'homologation par arrêté des dispositions qui leur seront consacrées dans le règlement général de l'AMF (le 1er jour du mois suivant la publication au JO de cet arrêté d'homologation).
Le régime fiscal des OPCI et celui réservé aux investisseurs viennent d'être fixés par l'article 28 de la loi de finances rectificative pour 2005. Les OPCI ne sont pas soumis à l'impôt sur les sociétés (ni à l'IFA). En contrepartie, des obligations de distribution sont mises à leur charge.
Les OPCI ont pour objet :

  • l'investissement dans des immeubles qu'ils donnent en location ou qu'ils font construire exclusivement en vue de leur location ; ces immeubles peuvent être détenus directement ou au travers de participations dans des sociétés à prépondérance immobilière
  • la réalisation de toutes opérations nécessaires à l'usage des immeubles et à leur revente, en ce compris tous travaux de toute nature relatifs à la construction, la rénovation, la réhabilitation en vue de la location
  • accessoirement, la gestion d'instruments financiers et de dépôt

Cet objet comporte une limite expresse : un OPCI ne peut pas acquérir des actifs immobiliers exclusivement en vue de leur revente, ce qui lui interdit les opérations de marchand de biens.
Les actifs d'un OPCI sont composés :
d'immeubles construits ou acquis en vue de la location et de droits réels portant sur de tels biens ;

  • de parts de sociétés de personnes immobilières non cotées sur un marché réglementé dont la responsabilité des associés est supérieure au montant de leurs apports
  • de parts de sociétés de personnes immobilières et d'actions de sociétés immobilières non cotées dont la responsabilité des associés est limitée au montant de leurs apports
  • d'actions cotées émises par une société à prépondérance immobilière
  • de parts ou actions d'OPCI ou d'organismes étrangers quelle que soit leur forme ayant un objet équivalent
  • d'instruments financiers
  • de parts ou actions d'OPCVM agréés par l'AMF ou autorisés à la commercialisation en France
  • de dépôts et instruments financiers à caractère liquide
  • de liquidités
  • d'avances en compte courant aux sociétés non cotées dans lesquelles l'OPCI détient une participation d'au moins 5 %.

Cette liste est limitative.
Il est en outre expressément interdit aux OPCI d'acquérir des actions, parts, droits financiers ou droits de vote d'une entité dont la qualité d'associé oblige à répondre indéfiniment et solidairement des dettes sociales (SNC, par exemple).
Le patrimoine de l'OPCI doit être composé à hauteur de :

  • 60 % au moins d'actifs immobiliers ;
  • 10 % au moins de dépôts, instruments financiers, liquidités, libres de toutes sûretés ou droits au profits de tiers.

Ces ratios tendent à la fois à maintenir la prépondérance immobilière du patrimoine de l'OPCI et à permettre à celui-ci de faire face aux demandes de rachats des porteurs.
Dans le cas de la SPPICAV, les actifs immobiliers à réunir pour satisfaire au quota de 60 % s'entendent des immeubles et des parts ou actions de sociétés à prépondérance immobilière.
A cette exigence s'en ajoute une seconde. Pour 51 % au moins, le patrimoine de la société devra être composé d'immeubles, de parts de sociétés de personnes ou de titres de sociétés immobilières non cotées.
Pour le FPI, le quota de 60 % doit être atteint au travers d'investissements en immeubles ou en parts de sociétés de personnes dans lesquelles les associés sont responsables au-delà de leurs apports. Un OPCI peut valablement :

  • emprunter dans la limite de 50 % de ses actifs immobiliers suivants : immeubles, droits réels, parts ou actions de sociétés de personnes et de sociétés non cotées. Pour apprécier cette limite, il est également tenu compte de l'endettement des sociétés susvisées à concurrence du pourcentage détenu dans ces sociétés par l'OPCI
  • emprunter dans la limite de 10 % de ses autres actifs
  • consentir des garanties sur les actifs nécessaires à la conclusion des contrats relevant de son activité.

L'OPCI doit, sous peine de dissolution, maintenir un actif net minimum, suivant les modalités que fixera le règlement général de l'AMF et pour un montant qui sera fixé par décret. Comme les OPCVM, l'OPCI sera géré par une société de gestion de portefeuille, choisie parmi celles agréées par l'AMF.
Cette société exerce dans les SPPICAV les fonctions de directeur général (ou directeur général délégué) ou de président du directoire (ou directeur général unique) par l'intermédiaire de son représentant permanent.
Elle représente le FPI vis-à-vis des tiers et en justice.
Elle peut être dirigeante des sociétés de personnes et autres sociétés non cotées dans lesquelles l'OPCI détient des participations.
L'OPCI choisit un dépositaire, établissement de crédit ou entreprise d'investissement, qui contrôle l'inventaire de ses actifs, s'assure de la régularité des décisions qu'il prend et assure le paiement des impositions à sa charge.
L'OPCI désigne deux évaluateurs immobiliers, indépendants, avec l'agrément de l'AMF. Ceux-ci établissent un rapport de synthèse conjoint sur l'accomplissement de leur mission d'évaluation.
Les OPCI sont exonérés d'impôt sur les sociétés, en contrepartie, comme on va le voir, de l'obligation de distribuer la majeure partie de leur résultat. L'exonération couvre la fraction du résultat non sujette à distribution.
Les filiales non cotées détenues à plus de 95 % par une SPPICAV peuvent également opter pour un régime d'exonération d'IS sur leurs revenus immobiliers, en contrepartie d'obligations distributives comparables à celles mises à la charge de la SPPICAV.
Le FPI doit distribuer 85 % de chacun des éléments ci-après:

  • produits nets de location des immeubles détenus directement ou au travers d'une société de personnes, ces produits étant diminués d'un abattement forfaitaire fixé à 1,5 % du prix de revient des immeubles détenus en direct.
  • produits nets des autres actifs détenus directement ou au travers d'une société de personnes.
  • plus-values nettes réalisées directement ou au travers d'une société de personnes sur la cession d'immeubles ou de parts de sociétés immobilières de personnes non cotées. Ces plus-values sont diminuées d'un abattement de 10 % pour chaque année de détention de l'immeuble ou des parts par le fonds au-delà de la cinquième. Cet abattement s'applique également aux plus-values de même nature réalisées par les sociétés de personnes détenues par le FPI lorsque les immeubles ou parts étaient détenus par cette filiale depuis plus de cinq ans.
  • plus-values nettes réalisées directement ou au travers d'une société de personnes sur la cession des autres actifs, ces plus-values étant augmentées de la fraction mise en réserve des plus-values antérieures de la catégorie.

La mise en paiement de la distribution doit être opérée dans les cinq mois suivant la clôture de l'exercice. Par dérogation, les plus-values de cession d'immeubles ou de parts de sociétés de personnes non cotées doivent être distribuées dans les six mois de leur réalisation.
Les sommes distribuables annuellement sont constituées par le résultat net de l'exercice augmenté du report à nouveau et par le solde net des plus-values réalisées au cours de l'exercice sur la cession des immeubles ou des parts de sociétés immobilières, augmenté de la fraction mise en réserve des plus-values nettes de même nature réalisées au cours des exercices antérieurs. Ces montants sont corrigés du solde des comptes de régularisation qui seront définis par décret.
La SPPICAV devra distribuer annuellement :

  • 85 % des produits nets des immeubles détenus directement ou indirectement, diminués d'un abattement forfaitaire égal à 1,5 % du prix de revient des immeubles détenus en direct.
  • 50 % des plus-values nettes réalisées au titre des deux années précédentes sur les cessions d'immeubles, de parts de sociétés de personnes et de titres de sociétés non cotées bénéficiant d'une exonération d'IS, ce poste étant majoré de 1,5 % précité pratiqué depuis l'acquisition de l'immeuble cédé.
  • 50 % des plus-values nettes réalisées au titre des deux années précédentes par ses filiales sociétés de personnes et sociétés de capitaux bénéficiant d'une exonération d'IS.
  • 100 % du résultat distribuable afférent aux produits distribués par les filiales non cotées exonérées d'IS sur leur activité immobilière.

Les différents mécanismes de correction des sommes distribuables peuvent conduire à réduire fortement les obligations distributives des OPCI. Dans ce cas, la mise en réserve des résultats non distribués augmente la valeur des titres détenus et potentiellement la plus-value de rachat (le régime d'imposition des investisseurs sera exposé dans le second volet).

Article paru dans la revue Option Finance du 6 février 2006

Authors:
Hubert Bresson, Avocat Associé - Yves Butzerin, Geneviève Olivier, Avocats