L’article 26 de la loi de finances pour 2024 instaure un nouvel article 774 bis dans le Code général des impôts visant à refuser la déduction de certaines dettes de quasi-usufruit de l’assiette des droits de succession et à les soumettre corrélativement à l’impôt successoral.
Présenté comme un dispositif anti-abus lors de son adoption, le nouveau texte vise en priorité les donations en nue-propriété de sommes d’argent avec réserve de quasi-usufruit, qui n’emportent pas en pratique, à la suite de la donation, la remise des fonds donnés au nu-propriétaire, mais la création d’une dette de restitution à son profit, exigible en principe lors du décès de l’usufruitier. Sont aussi visées les ventes de biens démembrés lorsque les cédants dérogent au principe de répartition du prix de vente entre l’usufruitier et le nu-propriétaire, en prévoyant un report de l’usufruit sur le prix de vente, conformément à l’article 621 du Code civil. Dans ce dernier cas, l’application du nouveau texte pourra être écartée s’il est justifié que la dette de quasi-usufruit, résultant du report de l’usufruit sur le prix de cession, n’a pas été contractée dans un objectif principalement fiscal. On notera cependant que le législateur a inversé la charge de la preuve : c’est au nu-propriétaire de démontrer que le report de l’usufruit sur le prix de cession n’est pas abusif, et non à l’administration fiscale de prouver l’abus.
La loi écarte par ailleurs du champ d’application du nouvel article 774 bis les dettes de quasi-usufruit sur sommes d’argent dues par un époux et résultant d’un usufruit légal ou conventionnel (option en usufruit stipulée dans une donation entre époux ou un testament) s’exerçant sur des sommes d’argent dépendant de la succession de son conjoint. Devraient également sortir du champ d’application du texte toutes les hypothèses de quasi-usufruit sur sommes d’argent non expressément visées par cet article. On pense notamment aux legs en usufruit, aux usufruits résultant d’un contrat de mariage, aux distributions de réserves en présence de titres démembrés, ainsi qu’aux clauses bénéficiaires démembrées de contrats d’assurance-vie.
Lorsque la nouvelle mesure s’applique, elle a un double effet : la dette de restitution n’est pas déductible sur le plan fiscal de l’actif successoral de l’usufruitier, et la valeur correspondant à cette dette devient soumise aux droits de succession, calculés selon le lien de parenté existant entre l’usufruitier et le nu-propriétaire au moment de la succession ou lors de la constitution de l’usufruit si les droits de succession sont inférieurs. Concernant le tarif applicable, la loi prévoit que la donation d’origine en nue-propriété ne sera pas soumise au rappel fiscal de l’article 784 du CGI et que les droits acquittés lors de la constitution de l’usufruit seront imputés sur les droits dus par le nu-propriétaire, sans pouvoir donner lieu à restitution.
Cette mesure s’applique aux successions ouvertes à compter de la date de promulgation de la loi de finances, soit le 29 décembre 2023. La nouvelle loi est donc indirectement rétroactive puisqu’elle s’applique aux quasi-usufruits en cours.
Article paru dans la Gazette du Palais du 26/03/2024. L’intégralité de la Gazette spécialisée Droit privé du patrimoine est accessible sur la base Lextenso : Gazette du Palais | La base Lextenso (labase-lextenso.fr)
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