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Changement de destination et "anciens PLU"

la CAA de Paris clarifie le régime

06/07/2021

Le 20 mai 2021, la cour administrative d’appel (CAA) de Paris a apporté des précisions importantes sur les modalités du contrôle des changements de destination en présence d’un plan local d’urbanisme (PLU) antérieur à la réforme des destinations (CAA Paris, 20 mai 2021, n° 19PA00986).

Pour rappel, le décret n° 2015-1783 du 28 décembre 2015 relatif à la partie réglementaire du livre I du Code de l’urbanisme et portant modernisation du contenu des plans locaux d’urbanisme a substitué aux neuf anciennes destinations (visées à l’article R.123-9 du Code de l’urbanisme), cinq destinations et vingt sous-destinations (désormais énumérées aux articles R.151-27 et 28 du Code de l’urbanisme). Ce décret a été complété par un arrêté du 10 novembre 2016 qui a apporté des précisions sur les sous-destinations visées à l’article R.151-28 du Code de l’urbanisme.

Dans son arrêt du 20 mai, la CAA de Paris a précisé les modalités d’entrée en vigueur de ces nouvelles destinations pour les PLU antérieurs à la réforme des destinations (les "anciens PLU").

Rappel : l’entrée en vigueur différée des nouvelles destinations pour les anciens PLU

Aux termes de l’article 12 du décret du 28 décembre 2015, les nouvelles destinations/sous-destinations ne sont applicables qu’aux PLU ayant fait l’objet d’une révision générale ou dont l’élaboration a été initiée après le 1er janvier 2016 (sauf soumission expresse aux nouvelles destinations décidée par les collectivités).

Ce principe d’application différée a été confirmé par la CAA de Paris.

Partant, les PLU n’ayant pas fait l’objet d’une telle procédure après le 1er janvier 2016 peuvent continuer à réglementer les destinations au regard des anciennes typologies de destinations énumérées par l’ancien article R.123-9 du Code de l’urbanisme.

Pour mémoire :

Anciennes destinationsNouvelles destinations

Habitation

Commerce

Hébergement hôtelier

Bureaux

Artisanat

Industrie

Exploitation agricole ou forestière

Entrepôt

Constructions et installations nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif
 

Habitation

Commerce et activités de service

Autres activités des secteurs secondaire ou tertiaire







Exploitation agricole et forestière



Equipements d'intérêt collectif et services publics
 

Pour rappel, aux termes des articles R.421-14 et R.421-17 du Code de l’urbanisme, tels que modifiés par le décret du 28 décembre 2015 susvisé :

• sont soumis à un permis de construire (PC) les travaux ayant pour effet de modifier les structures porteuses ou la façade du bâtiment, lorsque ces travaux s'accompagnent d'un changement de destination entre les différentes destinations et sous-destinations ;

• sont soumis à une déclaration préalable (DP) les changements de destination d'un bâtiment existant entre les différentes destinations.

Le décret n’a toutefois pas précisé la date d’entrée en vigueur de ces dispositions, tout en en renvoyant  aux nouvelles destinations et sous-destinations.

La question se posait donc de savoir au regard de quelles destinations (anciennes ou nouvelles) le contrôle de l’existence d’un changement de destination (ou de sous-destination) devait s’apprécier en présence d’un ancien PLU.

De nombreuses communes régies par un ancien PLU (dont la ville de Paris en l’espèce) considéraient en effet que le contrôle du changement de destination devait s’opérer au regard des anciennes destinations. Or cela aboutissait, à l’échelle nationale, à une application non uniforme des articles R.421-14 et R.421-17 du Code de l’urbanisme.

Aussi, dans son arrêt du 20 mai dernier (dans une affaire portant sur le PLU de Paris), la CAA de Paris a jugé que :

"4. Si l'article 12 du décret 28 décembre 2015 susvisé prévoit que ‘Les dispositions des articles R.123-1 à R.123-14 du Code de l'urbanisme dans leur rédaction en vigueur au 31 décembre 2015 restent applicables aux plans locaux d'urbanisme dont l'élaboration, la révision, la modification ou la mise en compatibilité a été engagée avant le 1er janvier 2016’, tout en permettant à leurs auteurs d'opter, par délibération expresse, pour la soumission au nouveau régime, cet article, ainsi qu'il résulte de ces termes mêmes, ne concerne que le maintien des règles relatives à l'élaboration et au contenu des plans locaux d'urbanisme, et non le maintien en vigueur des dispositions de l'article R.421-14 relatives aux autorisations d'urbanisme, dans leur rédaction antérieure au 1er janvier 2016.

5. Il résulte de ce qui précède que la ville de Paris, dont le plan local d'urbanisme a été adopté en juillet 2016, ne pouvait se fonder, nonobstant la circonstance que ce plan avait été mis en révision avant le 1er janvier 2016, sur les dispositions de l'article R.421-14 dans leur rédaction en vigueur au 31 décembre 2015, lesquelles renvoyaient à l'article R.123-9 du Code de l'urbanisme qui distinguait, parmi les destinations les activités de commerce de celles d'artisanat. En conséquence, saisie de la demande de la société requérante, et alors que la modification projetée d'une boucherie en commerce ne relevait plus, contrairement à ce qu'il en était dans l'état du droit antérieur au 1er janvier 2016, d'un changement de destination, les articles R.151-27 et R.151-28 regroupant désormais au sein d'une même destination le commerce et l'artisanat, le maire de Paris ne pouvait légalement s'opposer à la déclaration préalable au motif que les travaux projetés nécessitaient un permis de construire".

Il en ressort que, même dans une commune couverte par un ancien PLU, l’appréciation du changement de destination et la détermination des modalités requises (DP ou PC) se font au regard des nouvelles destinations et sous-destinations prévues aux articles R.151-27 et R.151-28 du Code de l’urbanisme (et non au regard des anciennes destinations quand bien même le PLU applicable viserait toujours ces anciennes destinations).

Cette décision permet de clarifier et d’uniformiser l’appréciation du contrôle des changements de destination à l’échelle nationale, mettant ainsi fin à des pratiques différentes selon les territoires.

Ceci étant, il conviendra de jongler entre les anciennes destinations (pour déterminer les règles de fond applicables au projet) et les nouvelles destinations (pour apprécier l’autorisation d’urbanisme nécessaire en cas de changement de destination).

Cela a d’ailleurs été mis en exergue par le rapporteur public dans cette affaire :

"Ce qui signifie qu’à Paris, les destinations à prendre en compte pour déterminer la procédure à suivre pour le pétitionnaire diffèrent des destinations sur lesquelles le service instructeur peut être amené à apprécier le respect par le projet des règles de fond. Les destinations et sous-destinations en vigueur depuis le 1er janvier 2016 n’interviennent donc à Paris que pour déterminer la catégorie d’autorisations d’urbanisme requise, pas pour apprécier le respect par les travaux des règles de fond du PLU. Cette distorsion n’est pas très heureuse, elle ne facilite pas la tâche des services et des pétitionnaires, mais elle ne pose pas non plus de problème tel qu’il y aurait matière à vous proposer une lecture contra legem du décret n° 2015-1783 du 28 décembre 2015".

A Paris, il faudra attendre l’entrée en vigueur du nouveau PLU, estimée en 2023, pour que cette distorsion disparaisse.


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