Par une décision rendue le 31 mars 2023, le Conseil d’Etat juge que les conditions d’exonération à la taxe sur les salaires revêtent un caractère cumulatif.
Les entreprises et organismes qui emploient des salariés sont passibles de la taxe sur les salaires « lorsqu’ils ne sont pas assujettis à la TVA ou ne l’ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d’affaires au titre de l’année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations » (CGI, art. 231).
Pour mémoire, dans un arrêt rendu le 26 novembre 2014 (n° 14PA02683), la cour administrative d’appel de Paris a jugé que les conditions d’assujettissement à la taxe sur les salaires posées par ce texte étaient alternatives mais que les conditions pour ne pas être redevable de la taxe étaient cumulatives.
Autrement dit, selon la CAA de Paris, ne sont pas redevables de cet impôt les entreprises :
- en tout ou partie assujetties à la TVA au titre de leurs opérations au cours de la période correspondant au paiement des rémunérations
et - ayant été assujetties à hauteur de 90 % au moins de leur chiffre d’affaires l’année précédente.
Faisant application de cet arrêt, l’administration fiscale, après avoir constaté que la société Legris Industries, bien qu’ayant été assujettie à la TVA au titre de l’intégralité de son chiffre d’affaires au titre de l’année de versement des rémunérations, ne l’avait pas été à hauteur de 90 % au moins de son chiffre d’affaires l’année précédente, a mis à sa charge des rappels en matière de taxe sur les salaires.
Après avoir vainement contesté ces rappels devant le tribunal administratif de Rennes, la société a finalement obtenu leur décharge devant la CAA de Nantes (n° 20NT01871, 26 novembre 2021, SA Legris Industries), ayant jugé que ne sont pas redevables de la taxe sur les salaires au titre d’une année civile les personnes qui ont été assujetties à la TVA sur l’intégralité de leur chiffre d’affaires pour la période correspondant à la même année (voir également en ce sens, CAA Lyon, n°01LY0070, 29 décembre 2005, Association de gestion du foyer La Cerisaie).
Pour mémoire, dans une décision ancienne Société des brasseries et casinos « les flots bleus » (n° 49766, 21 mai 1986), le Conseil d’Etat avait jugé que « ne sont pas redevables de la taxe sur les salaires pendant une année civile les personnes ou organismes qui, au cours de cette année ont été assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée même sur une partie seulement de leurs opérations ou qui, durant l’année précédente, l’ont été sur 90 % au moins de leur chiffre d’affaires ».
Cette affaire était toutefois distincte de celle rendue ce jour par le Conseil d’Etat dans la mesure où elle concernait un assujetti dont le chiffre d’affaires de l’année précédente avait été intégralement soumis à la TVA.
Le pourvoi en cassation formé par le Ministre contre l’arrêt rendu par la CAA de Nantes était donc l’occasion pour le Conseil d’Etat de se prononcer dans un contexte distinct sur la question de savoir si le non-assujettissement à la taxe sur les salaires suppose, sur le fondement de l’article 231 du CGI, la réunion de critères alternatifs ou cumulatifs.
Par une décision rendue le 31 mars 2023, le Conseil d’Etat annule l’arrêt rendu par la CAA de Nantes et juge que « sont redevables de la taxe sur les salaires au titre des rémunérations payées au cours d’une année civile, dans la limite du rapport mentionné ci-dessus :
- d’une part, les personnes ou organismes dont le chiffre d’affaires de cette année n’est pas soumis à la taxe sur la valeur ajoutée,
- d’autre part, les personnes ou organismes dont le chiffre d’affaires de l’année précédente n’a été soumis à la taxe sur la valeur ajoutée qu’à hauteur d’une fraction n’excédant pas 10 %.
Il en résulte inversement que, pour ne pas être redevable de la taxe sur les salaires au titre des rémunérations payées au cours d’une année civile, une personne ou un organisme doit, non seulement :
- être assujetti cette année-là à la taxe sur la valeur ajoutée sur une partie au moins de son chiffre d’affaires,
mais aussi - l’avoir été l’année précédente à hauteur d’au moins 90 % de son chiffre d’affaires ».
Il résulte de cette décision que le non-assujettissement à cette taxe suppose de remplir cumulativement les deux critères suivants :
- l’assujettissement, au moins partiel, à la TVA au titre de l’année d’imposition ;
et, - à hauteur de 90 % au moins de son chiffre d’affaires au titre de l’année précédente.
En revanche, en se référant à une fraction de chiffre d’affaires n’excédant pas 10%, le Conseil d’Etat, s’éloigne de la lettre du texte et jette de nouveau le trouble sur les conditions d’assujettissement à la taxe.
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Flash info droit fiscal | Conditions d’application dans le temps de la taxe sur les salaires | 05 avril 2023
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