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Forfait mobilités durables

Quel bilan deux ans après ?

22/04/2022

Introduit le 1er janvier 2020 par la loi d’orientation des mobilités du 24 décembre 2019, le forfait mobilités durables est entré en vigueur dans le contexte du déconfinement dès le 11 mai 2020 à la suite de la publication du décret n°2020-541 du 9 mai 2020.

Destiné à promouvoir des moyens de transport plus verts à l’heure de l’engagement des employeurs en matière d’ESG, il est temps de faire un premier bilan de son application.

I. Mise en œuvre du forfait mobilités durables

Ce dispositif dont la mise en œuvre est facultative a pour objet de permettre aux employeurs de prendre en charge les frais de transport de leurs salariés qui utilisent, pour les déplacements entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail, des moyens de transport dits « à mobilité douce ».

Il est ainsi demandé aux employeurs d’encourager leurs salariés à utiliser des « modes de transport vertueux ».

Le forfait mobilités durables (qui remplace l’indemnité kilométrique vélo et l’indemnité forfaitaire covoiturage) s’ajoute ainsi aux autres modes de prise en charge des frais de transport entre le domicile et le lieu de travail des salariés prévus par le Code du travail à savoir :

  • La prise en charge obligatoire de la moitié de l’abonnement à un service de transport public ou de location de vélo,
  • La prise en charge volontaire des frais de carburant ou d’alimentation d’un véhicule personnel exposés par les salariés ne pouvant utiliser les transports en commun.

Pour la mise en place de ce dispositif collectif – puisqu’il est expressément prévu que tous les salariés remplissant les conditions doivent en bénéficier selon les mêmes modalités – le législateur a souhaité donner la priorité aux partenaires sociaux.

En effet, le montant, les modalités et les critères d’attribution du forfait sont définis par accord d’entreprise ou interentreprises et à défaut, par accord de branche. A défaut d’accord, une décision unilatérale de l’employeur peut fixer ces modalités, après consultation du CSE s’il existe (1).

Outre la réalisation d’un déplacement domicile-lieu de travail (qui n’est pas sans poser de questions pratiques quant à leur détermination), le bénéfice du forfait mobilités durables impose le recours à l’un des modes de transport « vert » visés par les textes à savoir :

  • vélo personnel (électrique ou non),
  • covoiturage (en qualité de conducteur ou passager),
  • transports publics de personnes autres que ceux concernés par la prise en charge des frais d’abonnement,
  • autres services de mobilité partagée (location ou mise à disposition en libre-service de véhicules avec ou sans station d’attache et accessibles sur la voie publique, services d’autopartage de véhicules à moteur à faibles émissions…)
  • et depuis le 1er janvier 2022, la trottinette électrique personnelle.

Dans ce cadre, l’employeur peut décider soit d’allouer une somme d’argent (forfaitaire ou en fonction des dépenses précisément engagées par le salarié) soit décider d’attribuer un titre-mobilité.

Le titre-mobilité, qui constitue une modalité de prise en charge du forfait mobilités durables, est une solution de paiement spécifique, dématérialisée et prépayée qui, à l’instar du ticket-restaurant, ouvre droit à divers services de mobilité auprès de partenaires agréés. Les modalités de recours à celui-ci ont été fixées par le décret n° 2021-1663 du 16 décembre 2021.

Ce dispositif donne lieu à des exonérations fiscales et sociales à la condition de rapporter la preuve de l’utilisation des sommes versées conformément à leur objet.

Ainsi, si dans sa version initiale, la loi prévoyait une exonération d’impôts sur le revenu, de cotisations sociales et de CSG/CRDS à hauteur de 400 euros par an et par salarié, la loi de finances pour 2021 a relevé cette limite d’exonération.

Le plafond maximum est désormais fixé à 500 euros par an et par salarié, ce montant étant porté à 600 euros en cas de cumul avec la prise en charge des frais d’abonnement aux transports publics, déduction faite de la prise en charge par l’employeur de l’abonnement au titre des transports en commun.

Il convient toutefois de préciser que ce plafond d’exonération s’applique après déduction, le cas échéant, de la prise en charge des frais de carburant ou d’alimentation d’un véhicule électrique, hybride rechargeable ou hydrogène, ainsi que du remboursement d’éventuels frais de stationnement sur la base du tarif le plus économique (abonnement hebdomadaire, mensuel ou annuel).

II. Un bilan mitigé

Toutefois, force est de constater qu’en dépit des efforts du législateur, ce dispositif n’a pas eu le succès escompté et que presque deux ans après son entrée en vigueur le bilan reste mitigé, à tel point que des réflexions sont aujourd’hui engagées pour rendre sa mise en œuvre obligatoire pour l’ensemble des employeurs de plus de 11 salariés d’ici à 2027 (2).

En effet, dès février 2021, le Gouvernement a lancé un « Baromètre forfait mobilités durables » dont l’objet était de dresser un premier état des lieux du déploiement de ce nouveau dispositif.

Cette enquête réalisée auprès de 1047 employeurs privés et publics (dirigeants, directions de Ressources Humaines, directions Développement Durable/RSE, fédérations professionnelles, associations…) a permis d’établir que seules 20% des entreprises avaient déployé, à cette date, le forfait mobilités durables et que parmi elles, seules 37% estimaient ne pas avoir rencontré de difficultés dans sa mise en œuvre.

Plus récemment, un rapport de mission sur la filière économique du vélo remis le 8 février 2022 au Premier ministre démontre que seules 39% des entreprises du CAC40 ont mis en place le forfait mobilités durables, 19% des entreprises interrogées réfléchissant à sa mise en place et 42% ne l’ayant pas déployé.

Si ce dispositif présente de réels avantages, la réticence des entreprises à le mettre en place peut cependant s’expliquer à plusieurs égards.

Le dispositif est aujourd’hui encore mal connu des entreprises et, comme le relevait le Baromètre du Gouvernement, celles-ci ont besoin de davantage de communication et d’accompagnement sur le sujet.

Cet outil, volontairement flexible, laisse, en effet, en suspens de nombreuses questions pratiques (sélection des modes de transport dits vertueux, types de frais à prendre en charge…) et la crainte pour les entreprises d’une augmentation de la gestion RH de ce dispositif ainsi que des coûts. De plus, il laisse également planer le spectre d’un éventuel contrôle URSSAF.

Notons d’ailleurs qu’il n’existe actuellement que peu de documentation en la matière et que les dispositions prévues par le bulletin officiel de la sécurité sociale (BOSS) et le bulletin officiel des finances publiques (BOFIP) sont incomplètes. Les entreprises peuvent donc se trouver découragées face aux incertitudes que ce dispositif soulève.

L’on peut également s’interroger sur l’impact certain de la crise du Covid-19 en la matière qui a placé l’organisation du télétravail au cœur des préoccupations des entreprises plus que les déplacements entre le lieu de résidence et le lieu de travail.

Le dispositif du forfait mobilités durables ne doit toutefois pas être négligé puisqu’il permet de mener une réflexion sur l’organisation du travail susceptible de répondre aux nouvelles aspirations des collaborateurs et aux enjeux de RSE auxquels les entreprises sont de plus en plus confrontées.

La mise en place du dispositif du forfait mobilités durables pourrait ainsi permettre aux entreprises d’améliorer leur image de marque et leur réputation et constituer un nouvel outil de communication efficace leur permettant d’attirer de nouveaux clients et talents en démontrant un fort niveau d’engagement en matière de RSE.

Enfin, si tout est fait par le législateur pour renforcer progressivement ce dispositif (revalorisation de la limite d’exonération à 500 euros par an et par salarié, prise en charge des frais liés aux trottinettes électriques personnelles depuis le 1er janvier 2022…), l’impact de l’entrée en vigueur du titre mobilité sur l’attractivité du dispositif du forfait mobilités durables reste à déterminer.

(1) Rappelons à cet égard que les entreprises mentionnées à l’article L. 2143-3 du Code du travail et employant au moins 50 salariés sur un même site ont, en principe, l’obligation de négocier chaque année sur les mesures visant à améliorer la mobilité des salariés entre leur lieu de résidence habituelle et leur lieu de travail, notamment en réduisant le coût de la mobilité, en incitant à l’usage des modes de transport vertueux ainsi que par la prise en charge des frais (Article L. 2242-17 8° du Code du travail).

(2) Rapport de mission sur la filière économique du vélo Remis le 8 février 2022 par le député Guillaume Gouffier-Cha, au Premier ministre.


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