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L’assemblée générale impossible…

un texte spécial a été adopté au printemps dernier

24/12/2019

La pandémie de Covid-19 a fait de l’année 2020 une période hors du commun à de multiples égards. Même les personnes morales, qui ne sont pourtant pas de vraies personnes, ne sont pas parvenues à échapper au virus, qui a affecté leurs organes… Les personnes morales ont en effet besoin, notamment, que se tiennent les assemblées de leurs membres. Or, le virus empêche ces organes que sont les assemblées de fonctionner normalement. Il ne serait en effet pas raisonnable pour une société de réunir une assemblée de ses nombreux actionnaires dans le contexte de la pandémie, au risque de faire de cette assemblée un cluster.

Parce qu’il aurait été destructeur pour l’économie que l’on se contente de repousser de plusieurs mois les assemblées de toutes les sociétés, un texte spécial a été adopté au printemps dernier afin de permettre la tenue de ces réunions « à huis clos », selon la formule souvent utilisée. Ce texte est l’ordonnance n° 2020-321 du 25 mars 2020.

Il était question de porter atteinte à un droit fondamental de l’associé ou de l’actionnaire : le droit de participer aux décisions collectives, consacré par l’article 1844 du Code civil comme une prérogative d’ordre public à laquelle l’on ne peut déroger. Pour cette raison, une disposition d’exception à valeur légale était requise – en l’occurrence il a été recouru à une ordonnance prise par le Gouvernement sur habilitation du Parlement.

S’agissant d’un texte d’exception, l’ordonnance n° 2020-321 avait été dotée d’une durée de vie limitée. Prorogée une fois, elle devait se désactiver le 30 novembre à minuit… si ce n’est que la situation sanitaire et le second confinement rendaient nécessaire une nouvelle prorogation du dispositif.

Qu’à cela ne tienne, une seconde ordonnance a été « commandée » par le Parlement, puisque l'article 10 de la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 « autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire » a permis que certains dispositifs d’exception se poursuivent. Grâce à cette loi, le Gouvernement a pu adopter l’ordonnance n° 2020-1497 du 2 décembre 2020 portant prorogation et modification de l'ordonnance n° 2020-321 du 25 mars 2020. Cette seconde ordonnance relative aux AG a été publiée au Journal officiel du 3 décembre et est entrée en vigueur immédiatement… avec tout de même quelques jours de retard par rapport à la date d’expiration de la première ordonnance !

Du fait du décalage entre la date de fin de l’ordonnance initiale (30 novembre à minuit) et la date de publication de l’ordonnance de prorogation (3 décembre), on devine qu’une difficulté a existé pendant un peu plus de 48 heures. Une assemblée qui se sera tenue le 1er décembre ou le 2 décembre n’aura pu bénéficier du dispositif sur les AG à huis clos, la première ordonnance étant expirée et la seconde n’étant pas encore connue. Dans le même temps, une telle assemblée n’aura pas pu non plus se tenir en la présence physique des actionnaires, puisque ceux-ci ne pouvaient pas sortir de chez eux, dès lors que le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de Covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire dispose que « Tout déplacement de personne hors de son lieu de résidence est interdit, à l'exception des déplacements pour les motifs suivants en évitant tout regroupement de personnes ». Les « motifs suivants » ne permettent pas de participer à une assemblée générale d’actionnaires, et il faut de toute façon éviter les « regroupements de personnes »…

On peut cependant raisonnablement penser que toute difficulté est résolue, dès lors que l’ordonnance de prorogation est entrée en vigueur avec un effet non seulement immédiat, mais même rétroactif. Précisément, la nouvelle ordonnance modifie la durée de la première, qui voit la date initiale du 30 novembre 2020 remplacée par celle du 1er avril 2021. Les premiers jours de décembre sont donc couverts.

Sauf que les choses ne sont pas si simples pour les assemblées qui avaient été convoquées entre le 1er et le 3 décembre. C’est qu’il fallait oser informer les actionnaires que l’assemblée se tiendrait sans leur présence physique, sur le fondement d’une ordonnance… qui n’existait pas encore au moment, nécessairement antérieur à l’assemblée, où les actionnaires devaient recevoir cette information ! Cette situation extraordinaire, où les AG ne pouvaient se tenir physiquement du fait du confinement, et où l’on manquait dans le même temps d’un texte permettant la tenue d’une AG à huis clos, aura tout de même conduit au report d’au moins une assemblée générale – celle de la société Bonduelle.

Article paru dans Option Finance le 14/12/2020


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Bruno Dondero
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