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Mise en place du comité social et économique

Précisions sur les conditions de détermination de l'établissement distinct

31/01/2019

Depuis l’entrée en vigueur de l’ordonnance 2017-1386 du 22 septembre 2017, en l’absence d’accord portant sur le nombre et le périmètre des établissements distincts pour la mise en place du comité social et économique (CSE), c’est à l’employeur qu’il revient de les déterminer unilatéralement. Il doit tenir compte de l’autonomie de gestion du responsable de l’établissement, notamment en matière de gestion du personnel. En cas de litige, l’autorité administrative fixe le nombre et le périmètre des établissements distincts, sa décision étant elle-même susceptible de recours devant le Tribunal d’instance. Par un arrêt rendu le 19 décembre 2018 (n° 18-23.655), la Cour de cassation se prononce pour la première fois sur l’étendue des compétences du juge judiciaire et sur les critères permettant de caractériser l’autonomie de gestion nécessaire à la reconnaissance de l’établissement distinct (Cass. soc., 19 décembre 2018, FS-PBRI).

Une entreprise avait engagé des négociations avec les organisations syndicales représentatives en vue de fixer le nombre et le périmètre des établissements distincts pour la mise en place des comités sociaux et économiques.

Cette négociation n’ayant pas abouti, l’employeur, conformément aux dispositions légales, en a unilatéralement fixé le nombre et le périmètre. Les organisations syndicales ont alors saisi la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte) qui a retenu un nombre et un périmètre d’établissements distincts correspondant à ceux fixés par l’entreprise. Saisi d’une demande d’annulation de cette décision, le Tribunal d’instance a procédé, à son tour, à un découpage identique à celui retenu par la Direccte.

Après qu’un pourvoi en cassation a été formé par les organisations syndicales, la chambre sociale se prononce sur l’étendue des compétences du Tribunal d’instance statuant comme instance de recours contre la décision administrative et sur la caractérisation de la notion d’autonomie de gestion nécessaire à la détermination des établissements distincts.

L’étendue des pouvoirs et des compétences du Tribunal d’instance

Il résulte des dispositions légales en vigueur que les contestations portant sur la décision de la Direccte, fixant le nombre et le périmètre des établissements distincts, sont de la compétence du juge judiciaire, à l’exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux.

Malgré cette rédaction très large, une interrogation pouvait néanmoins subsister sur l’étendue des pouvoirs reconnus au juge judiciaire, ainsi que sur la possibilité pour celui-ci d‘apprécier la légalité de la décision rendue par l’Administration.

En l’espèce, les demandeurs reprochaient au Tribunal d’instance d’avoir refusé de se prononcer sur leurs arguments invoquant une violation des principes du contradictoire et d’impartialité, au motif qu’il s’agissait de moyens portant sur la régularité formelle de la décision (légalité externe) lesquels, compte tenu de la séparation des autorités judiciaire et administrative, ne relevaient pas de sa compétence. 

La Cour de cassation décide que la critique du jugement est justifiée sur ce point dans la mesure où le législateur a reconnu au juge judiciaire une compétence exclusive en matière de contestation des décisions de la Direccte relative à la fixation du nombre et du périmètre des établissements distincts. Il résulte que le juge doit examiner l’ensemble des contestations, y compris celles qui portent sur la légalité externe de la décision. 

Toutefois, la Cour de cassation n’annule pas la décision du Tribunal au motif que, si celui-ci a refusé à tort de statuer sur la légalité formelle de la décision, il a statué sur le fond en fixant lui-même le nombre et le périmètre des établissements distincts, ce qu’il aurait été amené à faire s’il avait accueilli la contestation et l’avait dite fondée. Le résultat juridique escompté de la demande d’annulation est donc atteint.

Sur ce point, l’arrêt apporte une précision de taille sur l’étendue des pouvoirs du Tribunal d’instance, qui doit non seulement examiner l’ensemble des contestations et fixer lui-même, en cas d’annulation de la décision, le nombre et le périmètre des établissements distincts. 

A cet égard, la note explicative jointe à l’arrêt précise que si le Tribunal dit la contestation non fondée, il peut se contenter de la rejeter sans avoir à statuer à nouveau sur le fond. En revanche, s’il accueille la contestation, il lui appartient de statuer lui-même sur les points en litige sans renvoyer devant la Direccte.

On notera que le pouvoir ainsi conféré au Tribunal d’instance est un pouvoir plus large que celui qui appartenait à la juridiction administrative qui ne pouvait qu’annuler la décision de la Direccte.

Notion d’établissement distinct pour la mise en place du comité social et économique

Depuis l’entrée en vigueur de l’ordonnance 2017-1386, la détermination des établissements distincts résulte d’un accord collectif conclu avec les délégués syndicaux de l’entreprise. En leur absence, elle peut être fixée par un accord conclu avec la majorité des membres titulaires du comité social et économique. Dans ces deux cas, les parties sont libres de définir comme elles le souhaitent les établissements distincts.

Il en va différemment lorsque, en l’absence d’accord, l’employeur fixe unilatéralement le nombre et le périmètre des établissements distincts, la loi lui faisant alors obligation de tenir compte de l’autonomie de gestion du responsable de l’établissement, notamment en matière de gestion du personnel.

En l’espèce, les organisations syndicales requérantes soutenaient que le critère d’autonomie devait s’apprécier au regard de la nécessité d’assurer une représentation de proximité des salariés, anciennement dévolue aux délégués du personnel et au Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail.

La Cour de cassation rejette cet argument. Elle précise que caractérise un établissement distinct, au sens des dispositions légales, "l’établissement qui présente notamment en raison de l’étendue des délégations de compétence dont dispose son responsable, une autonomie suffisante en ce qui concerne la gestion du personnel et l’exécution du service". Dans cette affaire, la Cour constate que le Tribunal d’instance avait bien recherché les éléments lui permettant de vérifier le critère d’autonomie ainsi défini, et que les syndicats n’apportaient aucun élément permettant de considérer qu’il existait, au sein de l’entreprise, d’autres établissements répondant à ce critère que ceux retenus par la décision de la Direccte.

Comme l’indique la note explicative, la Cour de cassation reprend ainsi à son compte la définition retenue par le Conseil d’Etat pour la mise en place des comités d’entreprise, (C. E., 29 juin 1973 n° 77982, et 27 mars 1996 n° 155791), qui s’attache essentiellement à vérifier les pouvoirs consentis au responsable de l’établissement et l’autonomie de décision dont il peut disposer pour que le fonctionnement normal des comités d’établissement puisse être assuré à son niveau. Ces pouvoirs doivent être caractérisés en matière de gestion du personnel et d’exécution du service.

Cette décision apporte un éclairage bienvenu sur les modalités d’application des nouvelles dispositions légales relatives tant à la détermination des établissements distincts, qu’au contentieux susceptible d’en résulter.


A propos du Comité Social et Economique (CSE)

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