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Positionnement du lanceur d’alerte dans les entités règlementées

la difficulté d’être responsable de la conformité

28/12/2021

La directive (UE) 2019/1937 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2019 sur la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l’Union (la « Directive ») doit être transposée en droit français au plus tard le 17 décembre 2021. Elle s’inspire largement de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016, dite « Sapin 2 », qui a instauré le lanceur d’alerte ainsi que le statut protecteur dont il bénéficie. Ainsi, la mise en œuvre de la Directive devrait encore renforcer ces protections.

Cette perspective doit conduire à s’interroger sur l’articulation de ce corps de règles avec celles propres aux entités réglementées (les « Entités »). En effet, l'Autorité des marchés financiers (« AMF ») et l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (« ACPR ») (ensemble les « Régulateurs ») ont compétence tant pour recevoir et traiter les alertes portant sur des manquements potentiels aux réglementations dont elles sont chargées d’assurer le respect, que d’accompagner ces Entités dans la mise en œuvre du corps règlementaire propre auquel elles sont soumises.

Ainsi, dès réception d’une alerte, l’AMF ou l’ACPR est tenue d’analyser les éléments portés à sa connaissance et de décider des suites à y apporter. Les signalements sont accompagnés de tout élément de nature à établir la réalité des faits signalés. Une demande d’informations complémentaires peut être adressée au lanceur d’alerte si cela est nécessaire à la compréhension et au traitement de l’alerte. Le Régulateur concerné apporte aux signalements les suites qu’il juge appropriées dans les limites de ses compétences légales. Si le Régulateur considère que les faits suspectés ne relèvent pas de sa compétence, il l’indique à l’auteur de l’alerte.

Les équipes des Régulateurs traitant des alertes différant de celles chargées du suivi régulier des Entités, le régime actuel – comme, probablement, celui résultant de la transposition de la Directive – laisse entière la question du bon équilibre entre un dispositif efficace de gestion des alertes et l’organisation de l’accompagnement des Entités.

En effet, l’auteur de l’alerte, les personnes visées dans les faits rapportés et les informations recueillies bénéficient d’une stricte confidentialité, aussi bien lors de la réception de l’alerte qu’à l’occasion de son traitement par l’autorité compétente. Les éléments permettant d’identifier les personnes concernées ne peuvent être divulgués qu’à l’autorité judiciaire. En parallèle, l’Entité – généralement au travers de son responsable de la conformité, fonction par essence informée des éventuels manquements – peut avoir déjà débuté des échanges avec le Régulateur pour y remédier.

Ainsi, le responsable de la conformité est confronté à un choix, par nature cornélien, entre son devoir de loyauté envers l’Entité, sa fonction d’interlocuteur privilégié du Régulateur pour résoudre les cas de non-conformité, et la faculté qui lui est donnée de lancer une alerte. Cette situation est d’autant plus délicate si ce responsable assume également la responsabilité de la lutte contre le blanchiment pouvant engager alors sa responsabilité propre.

Il faut saluer comme constituant une avancée les nouvelles dispositions protectrices des lanceurs d’alerte figurant dans le projet de loi actuellement examiné qui prévoit, par exemple, des sanctions pénales et/ou civiles à l’encontre de ceux qui divulgueraient l’identité des lanceurs d’alerte, qui feraient obstacle à un signalement ou qui engageraient des représailles à l’égard d’une personne en raison de sa qualité de lanceur d’alerte. On peut cependant regretter, qu’aucun cadre clair n’ait été donné à ceux les plus susceptibles d’être des lanceurs d’alertes et, surtout, à ceux assumant la responsabilité de la conformité des Entités. Alors même que le projet de loi envisage une protection plus large des personnes contre tout préjudice, y compris les atteintes à la réputation, on attend de la nouvelle loi qu’elle envoie un signal fort aux lanceurs d’alerte, à ceux qui les soutiennent mais également aux responsables de la conformité.

Article paru dans Option Finance le 13/12/2021


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