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Prix imposés et prix conseillés : bien les distinguer !

Quelles indications de prix autorisées sur catalogues et Internet ?

27/07/2021

Par deux avis, la Commission d’examen des pratiques commerciales (CEPC) apporte des précisions utiles en matière de mention des tarifs destinés aux clients finaux sur les catalogues adressés par un fournisseur à ses revendeurs ainsi que sur le site Internet exploité par un franchiseur (avis n° 21-4 et n° 21-5 du 31 mai 2021)

Distinction entre pratiques interdites et pratiques autorisées

La CEPC rappelle la nécessité de distinguer deux pratiques en matière d’indication de prix de revente :

  • la pratique consistant à imposer à un distributeur indépendant un prix de revente fixe ou minimal qui est en principe illicite en vertu du droit des pratiques anticoncurrentielles  et des pratiques restrictives de concurrence, alors que la fixation d’un prix maximal n’est pas prohibée ;
  • la pratique consistant à conseiller à un distributeur indépendant un prix de revente indicatif  fixe ou maximal qui est en principe licite.

Un prix de revente est imposé au distributeur lorsque celui-ci se trouve contraint de répercuter le prix fixe ou minimal indiqué par son partenaire commercial. Un prix de revente est au contraire conseillé au distributeur lorsque celui-ci peut en fixer un autre sans encourir de sanction dans le cadre de sa relation commerciale.

La CEPC souligne que la distinction entre les deux pratiques n’est pas toujours aisée. Elle indique à cet égard que l’Autorité de la concurrence et la jurisprudence considèrent, de façon générale, que les prix de revente sont imposés lorsque trois conditions cumulatives sont remplies :

  • communication au distributeur de prix de revente au détail (évocation de prix, généralement présentés comme n’étant que conseillés).
  • mise en place d’une police des prix  par le fournisseur pour éviter que des distributeurs déviants ne compromettent le fonctionnement de l’entente (menace de représailles, de déréférencement, etc.).
  • application significative des prix communiqués par le fournisseur par une forte majorité des distributeurs du réseau.

En matière de pré-étiquetage ou de pré-enregistrement des prix de revente au détail, le prix a priori conseillé ne sera considéré́ comme imposé que si sa modification par le distributeur est « complexe et peu réalisable » (cas par exemple lorsque la plupart des produits sont préétiquetés, les prix sont enregistrés dans les logiciels des caisses des magasins et la centrale d’achat conçoit elle-même les messages publicitaires tout en édictant des prospectus mentionnant les prix de revente, voir Cass. crim. 16 janvier 2018 n° 16-83457).     

Tempéraments à l’interdiction des prix imposés

La CEPC souligne l’existence de tempéraments apportés à l’interdiction des prix de revente fixes ou minimaux imposés :

  • en matière de réseaux de distribution : possibilité pour une coopérative de commerçants détaillants de définir et mettre en œuvre par tous moyens une politique commerciale commune propre à assurer le développement et l'activité de ses membres  « par la réalisation d'opérations commerciales, publicitaires ou non, pouvant comporter des prix communs » (art. L. 124-1, 6° C. com.) ; reconnaissance de l’absence de pratique prohibée au regard le droit des ententes en cas de fixation concertée de prix par des commerçants indépendants regroupés sous une même enseigne réalisée sous certaines modalités (notamment décision ADLC n° 10-A-26 du 7 décembre 2010).
  • de manière générale : la possibilité pour la pratique de prix imposés de bénéficier d’une exemption individuelle au titre des articles 101 § 3 du TFUE ou L. 420-4 du Code de commerce lorsque les conditions requises sont réunies (gains d’efficience, caractère nécessaire et proportionné de la restriction de concurrence induite, répercussion des profits sur les utilisateurs finaux et l’ab<sence d’élimination de toute concurrence sur le marché). Selon les lignes directrices de la Commission européenne sur les restrictions verticales, le fournisseur pourrait imposer au distributeur ses prix de revente dans trois cas : lancement d’un nouveau produit (pour assurer sa promotion) ; campagne de prix bas coordonnée de courte durée dans un réseau de franchise ou similaire (2 à 6 semaines le plus souvent) ; distribution de produits d’expérience ou complexe (notamment lorsque la marge supplémentaire offerte par les prix de revente imposés permet la fourniture de services de prévente additionnels).

Pratiques de prix catalogues

La CEPC considère en conséquence, pour que l’envoi par un fournisseur à ses distributeurs d’un catalogue (ou de tout autre document publicitaire), quel qu’en soit le support, contenant les prix de revente aux clients finaux puisse s’analyser en une pratique de prix conseillés licites, qu’il faut que :

  • le distributeur garde la possibilité effective de pratiquer des prix différents, ce qui suppose que le catalogue indique clairement qu’il s’agit de prix conseillés ;
  • l’auteur du catalogue s’abstienne de tout mécanisme de sanction à l’égard du revendeur en cas de non-respect de ces prix ;
  • en cas de pré-étiquetage ou de pré-enregistrement des prix, la modification du prix par le distributeur ne soit pas complexe et peu réalisable.

Par ailleurs, un prix imposé sur catalogue pourra être reconnu comme étant licite dans deux hypothèses :

  • Lorsque la pratique est mise en œuvre dans un réseau coopératif de commerçants détaillants ou, selon certaines modalités, au sein de tout réseau d’indépendants regroupés sous une même enseigne.
  • Lorsque les documents présentent des nouveaux produits sur une courte durée, correspondant à la période de lancement de ces produits, une campagne promotionnelle de courte durée (catalogue de fin d’année pour les jouets ou pour l’alimentation festive ; catalogue de rentrée avec les fournitures scolaires), ou des produits complexes, pour lesquels le distributeur s’est engagé à fournir des services qui dépassent ceux habituellement prévus pour la distribution de produits de même nature (essai gratuit, cours d’initiation…).

Pratiques de prix sur le site internet d’un réseau de franchise

La CEPC rappelle tout d’abord la possibilité pour un franchiseur d’imposer à ses franchisés le respect de prix de revente maximaux et/ou de leur conseiller des prix de revente afin d’assurer une cohérence tarifaire au sein du réseau, vis-à-vis des consommateurs.

Concernant ensuite la validité de la pratique consistant à imposer aux franchisés d’un réseau de distribution l’alignement sur les prix des produits annoncés sur le site internet du réseau, exclusivement géré par le franchiseur, la CEPC distingue selon qu’il s’agit d’un site vitrine ou d’un site marchand du franchiseur.

Site vitrine. Lorsque le site ne permet pas au consommateur d’acheter en ligne les produits présentés sur le site (site vitrine), les prix affichés sur le site sont des prix conseillés ou des prix maximaux, en fonction des contrats de franchise conclus. Dans ce cas, il appartient au franchiseur de respecter l’obligation d’information des consommateurs sur les prix, prévue par les articles L. 112-1 (obligation d’information) et L. 121-2 du Code de la consommation (interdiction des pratiques commerciales trompeuses) ; ce qui implique de préciser notamment le caractère conseillé ou maximal imposé des prix affichés.

Site marchand. La situation est différente lorsque le site internet du franchiseur est un « site marchand » puisqu’il appartient alors au vendeur du produit (franchiseur ou franchisé) d’en fixer le prix. Plusieurs cas de figure doivent donc être envisagés :

  • Lorsque le franchiseur est l’auteur de la vente, soit il livre directement au client final un produit provenant de son stock, soit il propose une option de « click and collect » dans le point de vente du franchisé.

Dans les deux cas, le franchiseur détermine le prix de vente en ligne. Mais, en cas de click and collect, lorsque le produit provient du stock du franchisé, un mécanisme de compensation de la différence entre le prix en ligne et le prix pratiqué par le franchisé peut être prévu entre franchiseur et franchisé dans le respect de leurs considérations économiques respectives.

  • Lorsque le franchisé est l’auteur de la vente en ligne et utilise le site internet du franchiseur pour vendre ses propres produits, il fixe librement ses prix de revente. Deux hypothèses sont toutefois possibles :
  • le franchisé propose le retrait en magasin : dans ce cas le prix en ligne du produit retiré en magasin peut être le cas échéant distinct du prix du produit affiché en cas de livraison à domicile ;
  • « le franchisé fournit également un service de livraison à domicile : dans ce cas, l’efficacité de la vente en ligne suppose qu’un prix unique soit affiché en ligne afin de ne pas proposer au consommateur un prix en ligne différent selon son lieu de résidence – généralement le lieu de livraison –, différence qui serait liée au franchisé identifié pour effectuer la livraison. Un mécanisme doit être prévu afin de préserver la liberté commerciale du franchisé et le respect de ses propres considérations économiques, par exemple en lui permettant de ne pas accepter la commande concernée ou en mettant en place un mécanisme de compensation ».

En tout état de cause, il conviendra de veiller au respect de l’interdiction de la revente à perte et de la fixation d’un prix de revente minimal imposé.


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