Home / Actualités / Transposition de la directive Omnibus

Transposition de la directive Omnibus

de nouvelles contraintes dans les relations professionnels/consommateurs

10/02/2022

Les professionnels ont jusqu’au 28 mai 2022 pour adapter leurs pratiques face aux nouvelles exigences européennes en matière de pratiques commerciales trompeuses, de clauses abusives ou de contrats conclus à distance notamment dans le domaine de l’économie numérique, mais aussi face aux risques de sanctions renforcées.

L’ordonnance n°2021/1734 du 22 décembre 2021 transpose en effet en droit interne la directive 2019/2161 du 27 novembre 2019 (directive Omnibus), comme annoncé par la loi DADUE du 3 décembre 2020 (voir notre flash).

Le nouveau dispositif a pour objectif principal d’améliorer la protection des consommateurs par un renforcement des règles existantes face à un risque croissant d’infractions à l’échelle européenne et une adaptation de ces règles à la transformation numérique.
 
Cet objectif se combine à la nécessité de procéder à une articulation avec les nouvelles règles applicables en matière de garantie légale de conformité intéressant notamment les ventes de produits et services numériques, elles aussi issues de la transposition récente de textes européens (voir notre article).

En pratique, le respect des exigences européennes se traduira principalement par les mesures suivantes :

Nouvelles définitions (art. 1)

L'article 1er du Code de la consommation s’enrichira de trois nouvelles définitions.

- Place de marché en ligne : un service utilisant un logiciel, y compris un site internet, une partie de site internet ou une application, exploité par un professionnel ou pour son compte, qui permet aux consommateurs de conclure des contrats à distance avec d'autres professionnels ou consommateurs ;

Opérateur de place de marché en ligne : tout professionnel qui fournit une place de marché en ligne aux consommateurs, au sens du 2° du I de l'article L. 111-7 C. cons. (i.e toute personne physique ou morale proposant, à titre professionnel, de manière rémunérée ou non, un service de communication au public en ligne reposant sur la mise en relation de plusieurs parties en vue de la vente d'un bien, de la fourniture d'un service ou de l'échange ou du partage d'un contenu, d'un bien ou d'un service) ;

Pratique commerciale : toute action, omission, conduite, démarche ou communication commerciale, y compris la publicité et le marketing, de la part d'un professionnel, en relation directe avec la promotion, la vente ou la fourniture d'un bien, d'un service, ou portant sur des droits et obligations. 

Etoffement de la liste des pratiques commerciales trompeuses (art. 2 et 3) 

Réintégration du prix de référence des annonces de réductions de prix (art. 2 et 3)

Les annonces de réductions de prix devront indiquer le prix pratiqué avant la réduction. A défaut, elles tomberont dans le champ des pratiques commerciales trompeuses per se (art. L. 112-1-1 nouveau et L. 121-2, 2° c modifié C. cons.). 

Le prix antérieur s’entend du prix le plus bas pratiqué par le professionnel à l'égard de tous les consommateurs au cours des trente derniers jours précédant l'application de la réduction de prix. 

Par exception, en cas de réductions de prix successives pendant une période déterminée, ce prix sera celui pratiqué avant l'application de la première réduction de prix.

A noter que l’obligation d’indiquer le prix antérieur ne s'appliquera pas aux annonces de réduction de prix portant sur des produits périssables menacés d'une altération rapide, ni lors des opérations de prix comparés avec ceux d'autres professionnels. 

En revanche constitueront une pratique commerciale trompeuse, les comparaisons de prix erronées (art. L.121-2,2° c modifié C. cons.)

Afin de garantir une sécurité juridique et de faciliter l’application de la législation de manière uniforme au sein de l’Union européenne, la Commission a publié le 29 décembre 2021 des orientations sur la manière dont les nouvelles dispositions sur les annonces de réductions de prix doivent être interprétées et appliquées. (Communication de la Commission — Orientations concernant l’interprétation et l’application de l’article 6 bis de la directive 98/6/CE relative à la protection des consommateurs en matière d’indication des prix des produits offerts aux consommateurs).

Nouvelles informations substantielles (art. 3)

Afin de prendre en compte l’essor de l'économie numérique, relèveront de la catégorie des informations substantielles dont l’omission caractérise une pratique commerciale trompeuse (art. L. 121-2, 4° nouveau et L.  121-3 modifié C. cons.) :

- la qualité de professionnel ou non du vendeur proposant des produits sur une place de marché en ligne ;

- les principaux paramètres déterminant le classement des produits présentés au consommateur sur une interface en ligne et leur ordre d’importance. Ces éléments devront figurer dans une rubrique spécifique de l’interface directement et aisément accessible sur la page des résultats de la requête du consommateur ;

- les éléments permettant d'établir si et comment le professionnel garantit que les avis publiés émanent de consommateurs ayant effectivement utilisé ou acheté le produit.

En revanche les modalités de traitement des réclamations des consommateurs disparaîtront de la liste des informations substantielles. 

Autres pratiques commerciales trompeuses (art. 3)

Constitueront également des pratiques commerciales trompeuses en toutes circonstances (art. L. 121-2, 4° nouveau et L. 121-4 modifié C. cons.) :

- la présentation d’un bien comme étant identique à un bien commercialisé dans un ou plusieurs autres Etats membres alors qu’il a une composition ou des caractéristiques différentes ;

 - la fourniture des résultats de recherche en réponse à une requête réalisée en ligne par un consommateur sans l'informer clairement de tout paiement effectué spécifiquement par un tiers pour obtenir un meilleur classement de l'un ou de plusieurs des produits apparaissant dans les résultats de recherche ou pour qu'un ou plusieurs produits y apparaissent ;

- la revente à des consommateurs de billets pour des manifestations par l'utilisation d'un moyen automatisé permettant de contourner la limitation ou l'interdiction de revente de ces billets ;

- l'affirmation attestant que des avis sur un produit sont diffusés par des consommateurs qui ont effectivement utilisé ou acheté le produit alors que les mesures nécessaires pour le vérifier n'ont pas été prises ;

la diffusion ou le fait de faire diffuser par une autre personne physique ou morale de faux avis ou de fausses recommandations de consommateurs ou la modification des avis ou recommandations de consommateurs afin de promouvoir des produits. 

Extension de l’encadrement des contrats conclus à distance et hors établissement (art. 6)

Afin de mieux prendre en compte l’importance de l’économie numérique dans les relations professionnels/consommateurs, l’ordonnance prévoit parallèlement au nouvel encadrement de la garantie légale de conformité, les principaux aménagements suivants en matière de contrats conclus à distance ou hors établissement :

- l’extension du champ d’application de la réglementation sur les contrats conclus à distance et hors établissement aux contrats par lesquels le professionnel fournit ou s'engage à fournir au consommateur un contenu numérique sans support matériel ou un service numérique en contrepartie de la fourniture par celui-ci de données à caractère personnel, autres que celles nécessaires à la fourniture du contenu ou du service ou permettant au fournisseur de remplir ses obligations légales (art. L. 221-1, III nouveau C. cons.).

- l'obligation pour le professionnel de fournir au consommateur, préalablement à la conclusion d'un contrat de fourniture de contenu numérique ou de services numériques, de manière lisible et compréhensible, l’ensemble des informations précontractuelles dues par un fournisseur en vue de la conclusion à distance d’un contrat de vente de biens ou de fourniture de services (art. L. 221-5 nouveau C. cons.). La liste de ces informations fait l’objet d’une harmonisation européenne maximale, ce qui signifie que les Etats membres ne peuvent pas introduire de règles plus strictes.

- l’adaptation des règles de formation des contrats conclus à distance aux contrats de fourniture de contenu numérique sans support matériel ou de services numériques et la précision des obligations incombant au professionnel lors de l’exécution du contrat mais aussi lors de l’exercice par le consommateur de son droit de rétractation (notamment art. L. 221-26 modifié et L. 221- 26-1 nouveau C. cons.).

Au-delà, plus généralement, l’ordonnance :

précise les conditions dans lesquelles l’exécution d’un contrat conclu à distance donnant lieu au paiement d’un prix peut commencer avant la fin du délai de rétractation du consommateur (obtention du consentement préalable exprès du consommateur et de la reconnaissance par ce dernier de la perte de son droit à rétractation) (art. L. .L.221-25  et L. 221-28 modifiés C. cons.) ; 
  
interdit toute visite non sollicitée d'un professionnel au domicile d'un consommateur en vue de vendre des produits ou de fournir des services lorsque le consommateur a manifesté de manière claire et non ambiguë ne pas vouloir faire l'objet d'une telle visite (art. L. 221-10-1 C. cons.). 

Aménagement et renforcement des sanctions 

Informations précontractuelles (art. 4)

L’ordonnance renforce les sanctions encourues en cas de manquement aux obligations d’informations précontractuelles relatives à l'existence et aux modalités de mise en œuvre des garanties légales, notamment la garantie légale de conformité et la garantie légale des vices cachés, et des éventuelles garanties commerciales, service après-vente et informations afférentes aux autres conditions contractuelles : le montant de l’amende administrative passe de 3 000 euros à 15 000 euros pour les personnes physiques et de 15 000 à 75 000 euros pour les personnes morales (art. L. 131-1-1 C. cons.). 

Pratiques commerciales déloyales autres que trompeuses ou agressives constitutives d’une infraction de grande ampleur (art. 5)

L’ordonnance prévoit, la possibilité d’infliger, à côté de l'allocation de dommages et intérêts une amende civile au professionnel qui a recours, de manière continue, à une pratique commerciale reconnue déloyale autre que trompeuse ou agressive (i.e contraire aux exigences de la diligence professionnelle ou susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique des consommateurs) par une décision de justice devenue définitive à son égard, dès lors que cette pratique est constitutive d’une infraction de grande ampleur ou de grande ampleur à l’échelle de l’Union européenne (ci-après infraction de grande ampleur ; cf. art. 3 et 21 du règlement UE 2017/2394) (art. L. 132-1 A nouveau C. cons.).

L’amende encourue est de 300 000 euros. Ce montant peut être porté, à proportion du profit réalisé, à 4 % du chiffre d'affaires moyen annuel (calculé sur les trois derniers CA annuels connus) ou, à défaut d'information disponible sur le chiffre d'affaires, à 2 millions d'euros.

Cette amende pourra être prononcée, à la suite d'une demande d'assistance mutuelle prévue pour les infractions de grande ampleur dans le cadre de la coopération entre les autorités nationales de contrôle compétentes en matière de protection des consommateurs par le règlement (UE) 2017/2394.

Elle pourra également être prononcée, dans les mêmes conditions, à la suite de la constatation de l’infraction par une décision ou un avis du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation.

Le prononcé de l’amende pourra être sollicité par la DGCCRF, les associations de défense des consommateurs, le ministère public ou encore le consommateur. 

La juridiction saisie pourra ordonner par ailleurs la publication, la diffusion ou l'affichage de sa décision ou d'un extrait de celle-ci. 

Clauses abusives (art. 8)

De la même manière, une amende civile de 15 000 euros pour une personne physique et 75 000 euros pour une personne morale pourra, à l’avenir, être prononcée, en plus de dommages et intérêts, à l’encontre du professionnel qui continuera de recourir, dans des contrats identiques proposés ou conclus avec des consommateurs ou des non-professionnels, à des clauses jugées abusives, par une décision de justice devenue définitive à son égard (art. L. 241-1-1 nouveau C. cons.).

Le prononcé de cette amende pourra être demandé à la juridiction saisie par la DGCCRF, les associations de défense des consommateurs, le ministère public ainsi que le consommateur.

L’amende pourra également être prononcée à la suite d'une demande d'assistance mutuelle prévue dans le cadre de la lutte contre les infractions de grande ampleur (voir ci-dessus). Dans ce cas, son montant pourra atteindre, de manière proportionnée aux avantages tirés des pratiques en cause, 4 % du chiffre d'affaires moyen annuel (calculé sur les trois derniers CA annuels connus à la date de la décision) ou 2 millions d’euros à défaut d’information suffisante disponible sur le chiffre d'affaires. 

La publication, la diffusion ou l'affichage de la décision ou d'un extrait de celle-ci pourra également être ordonnée.

A noter que cette amende sera également encourue, dans les mêmes conditions, en présence de clauses réputées abusives (clauses noires) dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs (art. L. 241-2 modifié C. cons.).

Le caractère particulièrement dissuasif de cette amende devrait conduire les professionnels concernés à expurger leurs contrats des clauses illicites. 

Contrats conclus à distance ou hors établissement (art.9)

L’ordonnance aménage le régime des sanctions applicables aux manquements à l’encadrement des contrats conclus à distance ou hors établissement. 

Elle prévoit ainsi :

- la nullité du contrat conclu hors établissement en cas d’infraction du professionnel à l’interdiction de recevoir un paiement ou une contrepartie avant l’expiration d’un délai de sept jours à compter de la conclusion du contrat (art. L. 242-1modifié C. cons.).

- une peine d’emprisonnement d’un an et une amende pénale de 150 000 euros (750 000 euros pour les personnes morales) en cas de visite non-sollicitée au domicile d’un consommateur alors que celui-ci a manifesté expressément son refus de visite (art. L. 242-7-1 nouveau C. cons.).

- la possibilité de porter le montant de l’amende pénale de 150 000 euros (750 000 euros pour les personnes morales) encourue en cas en cas de non-remise au consommateur d’un exemplaire du contrat (art. L. 242-5 C. cons.) ou du formulaire type de rétractation (art. 242-6 C. cons.) à 4 % du chiffre d'affaires moyen annuel (calculé sur les trois derniers CA annuels connus), lorsque l’amende est prononcée à la suite d’une demande d’assistance mutuelle dans le cadre des infractions de grande ampleur. La même sanction est encourue en cas de remise d’un contrat ou d’un formulaire de rétractation non-conforme (art. L. 242-7-2 nouveau C. cons.).

- le renforcement des sanctions administratives encourues en cas de manquement du professionnel aux règles de formation et d’exécution du contrat, le quantum de l’amende passant de 3 000 euros à 15 000 euros pour les personnes physiques et de 15 000 euros à 75 000 euros pour les personnes morales (art. L. 242-10, L. 242-11 et L. 242-13 modifiés C. cons.). Ce montant pourra être porté à 4 % du chiffre d'affaires moyen annuel (calculé sur les trois derniers CA annuels connus), en présence d’une infraction de grande ampleur sanctionnée dans le cadre d’une demande d’assistance mutuelle (art. L. 242-14-1 nouveau C. cons.) 

- l’adaptation de certaines peines complémentaires (art. L. 242-8 et L. 242- 9 modifiés C. cons.). 


En savoir plus sur notre cabinet d'avocats :

Notre cabinet d'avocats est l’un des principaux cabinets d’avocats d’affaires internationaux. Son enracinement local, son positionnement unique et son expertise reconnue lui permettent de fournir des solutions innovantes et à haute valeur ajoutée dans tous les domaines du droit.

cabinet avocats CMS en France

Notre cabinet d'avocats à Paris

Expertise : Concurrence

nous contacter 330x220

Nous contacter

Vos contacts

Portrait deNathalie Pétrignet
Nathalie Petrignet
Associée
Paris
Portrait deDenis Redon
Denis Redon
Associé
Paris
Portrait deElisabeth Flaicher-Maneval
Elisabeth Flaicher-Maneval
Counsel
Paris
Portrait deVincent Lorieul
Vincent Lorieul
Counsel
Paris
Portrait deMarine Bonnier
Marine Bonnier
Avocate
Paris
Portrait deAmaury Le Bourdon
Amaury Le Bourdon
Counsel
Paris
Afficher plus Afficher moins