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Clause de préemption et transmission de titres : des enjeux rédactionnels

Par Christophe Blondeau, avocat associé

29/05/2009

Une décision récente de la Cour d’appel de Versailles du 30 octobre 2008 vient rappeler l’importance de la rédaction d’une clause de préemption. Au cas particulier, après avoir cédé les titres d’une filiale, les actionnaires des deux entités avaient conclu une convention par laquelle ils se concédaient un droit de préemption mutuel « en cas de cession de leurs titres » respectifs. Peu après, l’une des parties avait constitué une société holding au sein de laquelle il avait apporté ses actions sans pour autant purger le droit de préemption accordé. La question posée à la Cour de Versailles apparaissait donc relativement simple et consistait à savoir si la clause litigieuse s’appliquait au cas d’apport des titres. Autrement dit, que doit-on entendre par le terme « cession » ? Rappelons que la Cour de cassation avait considéré, dans un arrêt rendu en matière de clause d’agrément, qu’une telle clause s’appliquait aux apports en société (Cass. com. 21 janvier 1970).

C’est en ce sens que la Cour d’appel de Versailles a tranché le litige et condamné l’actionnaire fautif au paiement des pénalités contractuellement prévues. La Cour a en effet considéré, d’une part, que l’opération d’apport a pour résultat de transférer les actions de l’apporteur qui se trouve dépossédé au profit de la société bénéficiaire qui en devient propriétaire et, d’autre part, que le transfert ainsi opéré est intervenu à titre onéreux puisque des valeurs mobilières ont été remises à l’apporteur en contrepartie. En conséquence, cette dernière a estimé que l’opération constituait bien une cession au sens de la clause litigieuse. Une décision inverse aurait d’ailleurs pour résultat de permettre à un cocontractant de détourner le droit de préemption en apportant ses actions à une société.

S’inscrivant dans le droit fil de la jurisprudence, cette solution est parfaitement logique et cohérente en ce qu’une cession doit être entendue comme englobant uniquement les transferts à titre particulier (vente, échange ou apport en société) et en aucun cas les transmissions universelles qui procèdent d’un mécanisme juridique différent comme les fusions, les scissions ou encore les apports partiels d’actif soumis au régime des scissions. Ainsi, une clause d’agrément qui stipulait que « les parts sociales ne pouvaient être cédées à une personne étrangère à la société, que du consentement des associés représentant les trois quarts du capital social » n’est pas applicable « à la transmission des parts par voie de fusion-absorption de sociétés dont le mécanisme est différent de la cession » (Cass. com. 12 février 2008, n° 06-20.966).

Reste que les rédacteurs peuvent malgré tout étendre une clause de préemption ou d’agrément à des opérations de fusion ou de scission par l’insertion d’une mention expresse en ce sens.

Article paru dans la revue Option Finance le 16 mars 2009

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