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DAC 7 : les plateformes numériques, nouveaux acteurs dans la transparence fiscale européenne ?

Nouveau paquet fiscal destiné à soutenir la relance économique et la croissance

10/09/2020

Le 15 juillet 2020, la Commission européenne a adopté un nouveau paquet fiscal destiné à soutenir la relance économique et la croissance au sein de l’Union européenne. Poursuivant la politique fiscale menée à l’échelle de l’Union européenne, le paquet repose sur les notions d’équité, de simplicité et de transparence fiscales.  

L’un des trois volets de ce paquet est une proposition de modification de la directive 2011/16/UE relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal en vue notamment d’étendre les règles applicables en matière de transparence fiscale aux plateformes numériques1 (proposition de directive COM(2020) 314 final (2020/0148 (CNS)) ou « DAC 7 »).  

La proposition de DAC 7 impose aux opérateurs de plateformes des obligations de collecte et de vérification des informations relatives aux personnes vendant par leur intermédiaire, afin de leur permettre de les déclarer auprès des Etats membres qui pourront les échanger avec les autres Etats membres concernés.

Cette proposition repose sur une analyse d’impact qui constate que le modèle économique des plateformes numériques peut conduire dans certaines circonstances à « rendre très difficiles la traçabilité et la détection des faits générateurs de l’impôt par les autorités fiscales », notamment dans un cadre international dans lequel l’opérateur de plateforme numérique et les personnes vendant au travers de la plateforme sont établis dans des pays différents. Les opérateurs de plateforme numérique consultés ont d’ailleurs unanimement partagé la crainte d’être confrontés à des solutions nationales disparates et corrélativement à des coûts de conformité élevés. DAC 7 poursuit donc un double objectif :

  1. mettre en place un dispositif obligatoire et automatique d’échange entre autorités fiscales compétentes des informations nécessaires à la perception des recettes fiscales normalement dues sur les transactions réalisées par l’intermédiaire de plateformes numériques, et 
  2. harmoniser le cadre juridique de déclaration des informations par les plateformes. Douze Etats membres ont en effet d’ores et déjà introduit des dispositifs nationaux imposant des obligations déclaratives aux plateformes. Tel est le cas de la France dont le régime codifié à l’article 242 bis du Code général des impôts s’est appliqué pour la première fois aux revenus générés au travers des plateformes en 2019.

1. Le champ d’application de la proposition de DAC 7

Les plateformes numériques visées par l’obligation de collecte et déclaration d’informations prévue par la proposition de directive s’entendent de tout logiciel, y compris un site internet, ou toute application, même mobile, permettant à des vendeurs d’être connectés à des utilisateurs afin d’exercer l’une des activités suivantes : vente de biens, fourniture de services, location de biens immobiliers ou de modes de transport, réalisation d’investissements ou octroi de prêts au titre d’un financement participatif. Seules les plateformes qui permettent aux vendeurs d’être connectés à d’autres utilisateurs pour exercer leur activité sont inclues dans le champ de la proposition de directive, à l’exclusion de celles qui permettent exclusivement (i) de traiter les paiements liés aux activités concernées, (ii) aux utilisateurs d’en faire la publicité, ou (iii) de rediriger/transférer les utilisateurs vers une plateforme.

Les opérateurs de plateformes dans le champ du dispositif sont les entités qui concluent des contrats avec des vendeurs pour mettre à disposition de ces derniers une plateforme. Les opérateurs de plateforme déclarants sont en principe ceux ayant leur résidence fiscale dans un Etat membre, ou en l’absence d’une telle résidence fiscale, ceux constitués en vertu de la législation d’un Etat membre ou ayant leur siège de direction, ou un établissement stable dans un Etat membre. Cette définition s’étend également aux opérateurs étrangers qui ne remplissent pas les conditions ci-dessus mais permettent l’exercice des activités soumises à déclaration par des vendeurs dans le champ du dispositif, ou la location de biens immobiliers situés dans un Etat membre.

Les vendeurs devant faire l’objet d’une déclaration sont ceux qui résident dans un Etat membre ou donnent en location des biens immobiliers situés dans un Etat membre, qu’il s’agisse de personnes physiques ou morales. Un vendeur est considéré comme résidant dans un Etat membre au sens de la proposition de directive s’il y dispose d’une adresse principale, d’un numéro d’identification fiscale (« NIF ») ou d’un numéro d’identification TVA, ou encore lorsque le vendeur est une personne morale, s’il y dispose d’un établissement stable.

2. Une nouvelle obligation d’échange automatique des informations recueillies par les opérateurs de plateformes numériques

La mise en œuvre de l’obligation d’échange des informations recueillies par les opérateurs de plateformes numériques entre les autorités compétentes des différents Etats membres implique pour les opérateurs de plateformes de vérifier l’identification des vendeurs entrant dans le champ du dispositif, puis de collecter et déclarer annuellement les informations requises par DAC 7. Au préalable, les opérateurs de plateformes déclarants doivent s’être enregistrés auprès d’un Etat membre unique.

Collecte et vérification des informations relatives aux vendeurs par les opérateurs

Les opérateurs de plateformes déclarants sont chargés d’identifier les vendeurs devant faire l’objet d’une déclaration et de collecter des informations les concernant, puis de les vérifier. A cet effet, ils mettent en place des procédures de diligence raisonnable.

Les informations à recueillir concernant les vendeurs sont leur nom/prénom ou dénomination sociale, leur adresse principale, leur NIF (incluant l’Etat de délivrance) et leur numéro d’identification TVA (s’il est disponible), leur date de naissance ou leur numéro d’immatriculation et le cas échéant l’existence d’un établissement stable (avec indication de l’Etat membre concerné). Par ailleurs, lorsque le vendeur a une activité de location de biens immobiliers au travers de la plateforme, l’opérateur doit également recueillir l’adresse du bien loué (et si possible le numéro d’enregistrement foncier).

L’opérateur de plateforme vérifie les informations collectées à l’aide des registres dont il dispose et de toute interface électronique mise à disposition gratuitement par un Etat membre ou l’Union européenne. Ces procédures de diligence raisonnable doivent en principe être réalisées au plus tard pour le 31 décembre de la période couverte par la déclaration.

Déclaration des informations collectées auprès des Etats membres

Dans un deuxième temps, les opérateurs de plateforme déclarants doivent recueillir des informations sur les transactions dans lesquelles les vendeurs concernés sont impliqués, qu’il leur revient ensuite de déclarer auprès de l’autorité compétente d’un Etat membre. Ainsi, les informations à déclarer ont trait à l’identification de l’opérateur lui-même, des vendeurs concernés (recueillies au moyen des procédures de diligence raisonnable), et des comptes financiers sur lesquels les contreparties sont versées ou créditées, l’Etat membre de résidence du vendeur, au montant total des contreparties versées et aux commissions, ou taxes retenues par la plateforme déclarante au cours de chaque trimestre de la période de déclaration. Lorsque le vendeur a fourni des services de location de biens immobiliers, outre les éléments mentionnés ci-dessus, il revient à l’opérateur de déclarer l’adresse du bien et le cas échéant son numéro d’enregistrement foncier, ainsi que le nombre de jours et le type de location réalisée.

Les informations collectées sont alors transmises par l’opérateur de plateforme déclarant à l’autorité compétente d’un seul Etat membre. Lorsqu’un opérateur peut être considéré comme résident de plus qu’un Etat membre, il peut choisir un Etat membre de déclaration unique parmi ces Etats.

Les informations recueillies doivent en principe être déclarées au plus tard le 31 janvier de l’année suivant l’année civile au titre de laquelle le vendeur doit faire l’objet d’une déclaration.

Echange automatique d’informations entre Etats membres

Enfin, les informations déclarées par un opérateur de plateforme donné à son Etat membre de déclaration unique devront être communiquées automatiquement par ledit Etat membre à l’Etat membre dont le vendeur est résident, ou à celui dans lequel les biens immobiliers loués sont situés, dans un délai de deux mois suivant la fin de la période devant faire l’objet d’une déclaration.

Si cette proposition est adoptée, DAC 7 devra être transposée par les Etats membres au plus tard le 31 décembre 2021, pour une première application au titre des revenus générés par les vendeurs concernés à compter du 1er janvier 2022.  Le cadre prévu par DAC 7 complètera le cadre français existant. Par ailleurs, l’OCDE a publié le 3 juillet dernier un rapport sur les règles modèles concernant les obligations déclaratives des opérateurs de plateformes, dont l’Union européenne pourrait tenir compte avant d’adopter définitivement DAC 7.

Article paru dans Option Finance le 31 août 2020


1 La proposition de DAC 7 vise également à renforcer l’échange d’informations entre Etats membres au travers de précisions concernant les notions de « pertinence vraisemblable » et de « demandes d’informations groupées », et l’introduction de la notion d’« audits conjoints » dans le champ de DAC.


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Annabelle Bailleul-Mirabaud
Associée
Paris
Celine Pasquier